Publicité
Collectif Arc-en-Ciel
20 ans de lutte, de résilience et d’amour
Par
Partager cet article
Collectif Arc-en-Ciel
20 ans de lutte, de résilience et d’amour
En 2025, le Collectif Arc-en-Ciel célèbre ses vingt ans d’existence. Deux décennies de combat passionné pour les droits des personnes LGBTQI+ à Maurice. À l’approche de la Marche des fiertés, prévue le 7 juin, de 9 heures à 15 heures, au Plaza, à Rose-Hill, l’express a rencontré Nathalie Germain, cofondatrice et vice-secrétaire du collectif. Celle-ci revient sur ce parcours de lutte, les obstacles, les accomplissements et les espoirs du collectif.
■ Vingt ans de combat. Quel regard portez-vous sur cette aventure humaine et militante ?
C’est un regard rempli d’émotions. Le chemin n’a pas toujours été facile. Il y a eu des moments de joie, de tristesse, des luttes difficiles mais aussi des victoires. Cette aventure, à la fois collective et personnelle, a profondément marqué nos vies. La création du collectif répondait à un besoin urgent dans la société mauricienne. Aujourd’hui, nous sommes fiers d’être toujours debout.
■ Quels étaient les principaux défis à vos débuts ?
Le premier défi a été de trouver des personnes de la communauté LGBT prêtes à s’exposer, à porter la voix de la communauté. Beaucoup craignaient le rejet ou les représailles. Heureusement, nous avons pu compter dès le départ sur des alliés hétérosexuels qui nous ont épaulés. Ce soutien a été précieux. Puis, petit à petit, des membres de la communauté ont trouvé le courage de s’affirmer, de sortir de l’ombre. Cela a eu un effet boule de neige.
Aujourd’hui, nous avons des personnes qui n’hésitent plus à prendre la parole, à montrer l’exemple. C’est fondamental, car beaucoup restent encore dans la peur, victimes de discriminations ou d’exclusion. Autre grand défi : créer un sentiment d’unité. Il fallait faire comprendre à la communauté que l’on est plus fort ensemble. Que l’écoute, le soutien mutuel, et la solidarité peuvent tout changer.
■ Quels sont aujourd’hui les projets portés par le collectif ?
Au cœur de l’action du Collectif, un travail discret mais essentiel :
Le «samedi santé», une initiative hebdomadaire permettant aux membres de se faire tester gratuitement pour les IST (VIH, syphilis, etc.) avec accompagnement et séance de counselling ; des soutiens psychologiques gratuits, ouverts aux membres comme à leurs proches ; l’accompagnement des victimes de discrimination, qu’il s’agisse d’insultes, d’exclusion familiale ou professionnelle. Nous les aidons à faire valoir leurs droits, à engager des démarches, à être entendus.
Le collectif anime aussi des groupes de parole. Certaines de nos séances sont sans paroles, où l’on communique par les émotions, les regards, les silences. D’autres permettent de verbaliser et partager les vécus. Ces moments sont forts et créent des liens. Un projet phare : Transform, en collaboration avec l’ONG Genderlinks. Ce programme est dédié à la communauté trans. Il aborde l’estime de soi, les relations familiales, et aide les parents à renouer le dialogue. Nous en sommes particulièrement fiers. Enfin, des événements festifs et communautaires, karaokés, soirées, permettent à chacun d’évoluer dans un espace sûr, bienveillant et inclusif.
■ Identité de genre, non-binarité, queer… Comment expliquer ces concepts ?
L’identité de genre, c’est la manière dont une personne se ressent intérieurement : homme, femme, ni l’un ni l’autre. Les personnes non-binaires ne se reconnaissent pas entièrement dans les catégories classiques de genre. Elles sont entre les deux, ou en dehors de ces cadres. Le terme queer est plus large. C’est une affirmation de soi. Même s’il a pu être péjoratif à ses débuts, aujourd'hui il signifie : «je suis qui je suis, avec fierté. Je ne rentre pas dans vos cases. Je suis queer, et j’existe».
Des propos haineux, il y en aura toujours. Mais notre posture est claire : nous ne sommes pas là pour convaincre ou convertir. Chacun a droit à ses croyances et à ses opinions, tant que cela se fait dans le respect et sans violence. Nous militons pour les droits humains et cela concerne tout le monde.
■ Quel est le message porté par la Pride 2025 ?
Cette année, nous célébrons 20 ans d’amour, mais aussi 20 ans de lutte. La marche n’est pas qu’une fête. C’est aussi un acte de résistance. Un moment pour dire que nous sommes là, que nous existons, que nous ne sommes pas des citoyens invisibles. La Pride est un espace de célébration, de visibilité, de solidarité. Mais aussi d’ouverture : nous y accueillons toutes celles et ceux qui croient en une société inclusive. Nous sommes une partie intégrante de ce pays et nous participons, à notre manière, à le faire avancer.
■ Quel regard portez-vous sur l’avenir du collectif et de la cause LGBTQI+ à Maurice ?
Tant qu’il y aura de la stigmatisation, notre action restera indispensable. Beaucoup de jeunes continuent de vivre dans la peur. Certains s’exilent parce qu’ils ne se projettent pas dans un avenir ici. Il faut se demander pourquoi. Les chantiers sont multiples : plus de reconnaissance légale, une meilleure éducation à la diversité, davantage de soutien institutionnel. Nous rêvons d’une société où l’on peut aimer sans se cacher, vivre sans avoir peur, être soi-même sans devoir se justifier.
Ce que nous voulons, c’est créer des ponts, pas des murs. Une synergie entre militant·es, allié·es, institutions. Seul·es, on va vite. Ensemble, on va loin. Malgré les obstacles, nous restons confiants. Il y a encore tant à faire, mais je suis pleine d’espoir. L’amour, la résilience, la solidarité… voilà ce qui nous guide. Vingt ans après sa création, le message du Collectif Arc-en-Ciel reste intact : « Nous ne sommes pas seuls. Nous sommes ensemble. Et ensemble, nous sommes plus forts.»
Propos recueillis par A. P. et D. T.
Publicité
Publicité
Les plus récents




