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MTC: Nathalie Henry, assistant entraîneur

2 août 2014, 09:23

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MTC: Nathalie Henry, assistant entraîneur
Les temps changent, même au «Mauritius Turf Club», après 202 ans d’existence. Pour la première fois, une femme a obtenu sa licence d’assistant entraîneur. Et vise désormais la casaque d’entraîneur.
 
 
Ce ne sont pas les critiques, les remarques acerbes ou les sous-entendus mesquins qui l’arrêteront. «Les circonstances de la vie m’ont rendue forte», lance Nathalie Henry. À 48 ans, elle vient de réussir l’examen théorique et pratique d’assistant entraîneur, faisant  d’elle la première femme à obtenir sa licence.
 
 
«Entrer dans le box, seller le cheval, faire craquer ses jambes, le faire sortir et marcher, le tout en 12 minutes, croyez-moi, ce n’est pas évident. Je l’ai fait, indique Nathalie  Henry. Avoir la licence d’assistant entraîneur me donne une légitimité. Plus personne ne pourra dire que l’on me l’a donnée sur un plateau parce que je suis la fille de Serge Henry.»
 
 
Du reste, concède-t-elle, sur les 450 membres que compte le Mauritius Turf Club, il y a une dizaine de femmes membres, dont elle. C’est, dit-elle, un milieu «très macho, où les femmes ne sont pas prises au sérieux». «On m’a déjà demandé ce que je faisais là et si je n’avais pas d’enfants à m’occuper ! Ces remarques me laissent de marbre car pour les Henry, la passion du cheval et du sport prime sur tout le reste.»
 
 
Et puis, il faut dire que Nathalie Henry a affronté des épreuves plus dures dans sa vie. Car si elle a une enfance dorée, sa vie prendra un cours inattendu lorsqu’elle entame ses études universitaires en médecine. Elle se trouve alors au Connecticut, où elle a complété ses études secondaires, sa mère Linda étant américaine.
 
 
Six mois après avoir démarré ses études de médecine, en rentrant un soir, elle s’endort au volant. Sa voiture heurte violemment un arbre. Les urgentistes mettent deux heures pour l’extraire du véhicule. Tout son côté droit est écrabouillé, elle souffre d’un important traumatisme crânien et vit une expérience de mort imminente. Elle n’a, à l’époque, que 18 ans. «Quand on parle du tunnel, avec des formes lumineuses de chaque côté et une grande lumière au bout, tout cela, je l’ai vécu. Je me suis réveillée d’un coup car une des premières personnes à tenter de me secourir parlait français et cela m’a ramenée.»
 
 
Elle restera six jours dans le coma. À son réveil, elle séjourne pendant un mois aux soins intensifs avant de subir plusieurs interventions chirurgicales, y compris de reconstruction faciale. Sa rééducation est longue. «Les séquelles de cet accident m’ont coûté deux ans de ma vie. Deux années de grandes souffrances tant j’étais cassée de partout et meurtrie.  Pendant longtemps, j’ai eu le visage bandé. J’étais comme un bébé à qui il fallait tout réapprendre. Des aides-soignants et les membres de ma famille se sont occupés de moi à tour de rôle. C’était pénible mais dépendre ainsi des autres vous rend forcément  humble.»
 
 
Une fois rétablie, cette ancienne championne de Maurice de natation migre vers la Floride et étudie les sciences sociales. Elle épouse un ingénieur américain à qui elle donne deux enfants. Pendant la vingtaine d’années qu’elle passe aux États-Unis, elle se spécialise en gestion et rejoint notamment l’équipe de management de General Electrics et de la United Technologies. 
 
 
Comme son couple ne va pas fort, elle fait un break et passe quelques mois à Maurice avec ses enfants. Elle n’en repartira pas,  divorçant de son mari. Nathalie Henry s’occupe en gérant un restaurant et un snack. Le personnel qu’elle dirige est presque exclusivement masculin. «Je suis très ouverte dans ma façon d’être et de gérer. Je traite tout le monde de la même façon en autonomisant l’équipe. Il n’y a rien que je ne peux demander à mes employés que je ne sache pas faire.»
 
 
Après une incursion au Dodo Club en tant que Social Manager, feu le Cardinal Margéot fait appel à elle pour transformer le Couvent de Bonne-Terre en maison de retraite. Elle est aussi appelée à diriger l’établissement  pendant quatre ans.
 
 
Son cousin, Hervé Henry et Mélanie Faugier, qui ont un projet de construction de 84 résidences de luxe avec clinique intégrée à Moka pouvant accueillir une centaine de personnes âgées, handicapées et malades, la contactent pour qu’elle le mène à bien et le dirige par la suite. Elle accepte. 
 
 
L’établissement nommé «Les Jardins de Chanterey», n’est pas encore officiellement ouvert. Ayant accompagné des mourants aux États-Unis, elle ne peut s’empêcher de réfl échir sur la finalité de la vie. «Parmi les dizaines de personnes que j’ai accompagnées, uneseule n’avait aucun regret. C’est triste que les gens ne peuvent pas vivre comme ils l’entendent et se laissent infl uencer par les pressions familiales, sociales ou acceptent les compromis par lâcheté pour ensuite avoir des regrets lorsqu’ils sont sur le point de quitter ce monde.»
 
 
Ce n’est pas pour autant que Nathalie Henry met de côté sa passion pour les chevaux. D’autant plus que depuis 2012, son père lui a demandé de l’assister. Bien que cela lui fasse de longues journées, elle ne s’en plaint pas. Levée tous les jours, à 3 h 30 du matin, elle s’occupe des écuries de Floréal et de La Brasserie et à 7 h 30 pile, elle se rend à Moka où elle passe sa journée. Le dimanche, elle est avec les chevaux à La Brasserie. Ses deux enfants et son compagnon, le Dr Jean-François Madeleine qu’elle qualifie de son «âme soeur», la soutiennent à fond dans tout ce qu’elle fait.
 
 
Elle reconnaît que depuis les trois dernières années, «ce n’est plus le cheval qui prime mais l’argent et le pouvoir. Cela me dérange énormément. Ma famille et moi luttons contre cela en nous concentrant sur le cheval et le sport. Les autres problèmes nous attristent et nous inquiètent par rapport à l’avenir de notre club et du sport. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour préserver l’image noble et pure du cheval et du sport en restant fidèle à mon éducation et mes valeurs inculquées par mes ancêtres qui étaient de grands turfi stes».
 
 
Nathalie Henry a désormais les yeux rivés sur la licence d’entraîneur. «Je me donne jusqu’à décembre pour passer l’examen et obtenir cette licence. Je suis prête. Tout est une question de détermination…»
 

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