Publicité
Louis Rivalland, CEO, Swan Group: «Un minibudget offre l’opportunité de réajuster certains fondamentaux économiques»
Par
Partager cet article
Louis Rivalland, CEO, Swan Group: «Un minibudget offre l’opportunité de réajuster certains fondamentaux économiques»

Le Chief Executive Officer (CEO) du groupe Swan, Louis Rivalland, plaide en faveur de la présentation d’un minibudget afin de maintenir le cap économique et de donner une nouvelle impulsion à certains secteurs générateurs d’investissement direct étranger.
Des développements politiques importants sont intervenus lundi avec un accord entre les deux leaders pour une alliance politique entre le Parti travailliste et le Mouvement militant mauricien.Quelle lecture faites-vous de cet événement ?
Je ne fais que prendre note de la décision de deux leaders politiques de trouver une entente politique. Je comprends qu’il revient aux instances des deux formations de se prononcer sur cette démarche politique. Si alliance politique il y a, il faudra que la période électorale soit relativement courte et que les institutions et autres ministères continuent à fonctionner normalement.
Il est clair aujourd’hui que la politique a pris le dessus sur l’économie avec les tractations d’alliance. Ne pensez-vous pas qu’une telle démarche pourrait nuire aux attentes de la communauté des affaires ?
La confiance est importante dans les affaires. Tout gouvernement a ainsi le devoir de créer des conditions pour stimuler l’investissement privé qui est primordial pour l’emploi. Tout investisseur, qu’il soit Mauricien ou étranger, recherche avant tout la stabilité politique mais aussi une certaine cohérence dans la politique fiscale, et cela, nous nous devons de la garder.
Le propre d’une démocratie, c’est qu’il y ait des élections régulièrement avec leur lot d’incertitude. Ce n’est ni la première, ni la dernière des tractations politiques qui a lieu en ce moment, surtout si l’on considère que la politique est l’un des sports favoris des Mauriciens. La communauté des affaires doit savoir préparer ces moments-là, composer avec et continuer à faire de son mieux, même s’il paraît évident qu’une économie avec moins d’incertitude politique présenterait une situation plus rassurante.
J’ajouterais cependant qu’il est très important que les différents ministères et institutions continuent à opérer aussi normalement que possible durant la période qui précède les élections, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas.
Êtes-vous favorable à la présentation d’un minibudget en attendant la tenue des prochaines élections générales ?
Autant que je le sache, une équipe mise en place par le présent titulaire du portefeuille des Finances, qui n’est autre que le Premier ministre, prépare activement le prochain budget. D’ailleurs, les consultations pré-budgétaires ont commencé très tôt.
Un minibudget offre l’opportunité de réajuster certains fondamentaux économiques et de mettre en place des mesures pour stimuler la croissance et l’emploi en attendant la tenue des élections. En sus des défis macroéconomiques, un minibudget peut aussi aider à revoir des points microéconomiques pour donner un coup de pouce à certains secteurs porteurs de l’économie qui peuvent attirer du Foreign Direct Investment (FDI) et stimuler l’investissement privé.
Comment analysez-vous le contexte économique dans lequel le prochain exercice budgétaire se fait actuellement ?
L’économie mauricienne est aujourd’hui en transit et essaie de se retrouver dans un monde en pleine évolution avec, d’un côté, un essoufflement de nos marchés traditionnels et, de l’autre, beaucoup de compétition provenant des marchés émergents tels que l’Inde, la Chine, le Brésil et même plus près de nous, l’Afrique du Sud.
La croissance du produit intérieur brut (PIB) prévue pour 2014 est de 3,5 %, ce qui est certes encourageant (comparativement aux pays dits développés) mais qui reste en dessous des moyennes de croissance historique de 5 % dont le pays a besoin pour un développement vraiment inclusif. Par ailleurs, le niveau d’endettement national qui oscille près du seuil de 60 % est toujours à un niveau raisonnable, mais il faut tout de même y faire attention.
L’île Maurice s’en est finalement bien tirée après la crise de 2007-2011 qui a secoué le secteur financier mondial. Il nous reste quand même pas mal de restructurations stratégiques à compléter, notamment dans l’éducation et la formation, l’infrastructure, certains services essentiels et la productivité en général, qui sont des tremplins essentiels pour un développement soutenable.
Qu’attendez-vous d’un tel exercice budgétaire ?
Dans les grandes lignes, le prochain exercice budgétaire devrait aborder les problèmes auxquels notre économie fait face actuellement, notamment trouver des solutions pour nous sortir du «middle income trap» et renforcer notre compétitivité tout en trouvant de nouveaux piliers économiques et de nouveaux marchés.
Plus particulièrement, je m’attends aussi à ce qu’il y ait une continuité des directives annoncées dans le passé et des supports/ incitations pour les traduire dans le concret. Par exemple, il reste encore beaucoup d’efforts à fournir pour mettre le projet Maurice Île Durable sur les rails.
Il y a aussi la diversification de l’économie sur d’autres piliers de croissance – le knowledge hub, le medical hub ou encore le logistic hub. L’économie bleue déjà annoncée dictera très certainement une grande partie de notre PIB dans les années futures. Il y a comme toujours un savant dosage à trouver entre des mesures susceptibles d’élargir notre champ économique, mais il faut aussi trouver l’équilibre entre l’économie et le social.
Quels sont les grands défis économiques auxquels le pays est confronté actuellement ?
Au niveau macroéconomique, je dirais le vieillissement de la population : nous vivons plus longtemps et avons moins d’enfants. Ce qui veut dire que nous avons à repenser et à réformer certains éléments de notre État providence pour qu’on puisse le sauvegarder et surtout pour qu’il puisse aider ceux qui sont vraiment dans le besoin.
Il faut une refonte de notre système d’éducation et de formation pour qu’il soit plus adapté aux besoins du marché du travail d’aujourd’hui et surtout de demain avec les nouveaux secteurs que nous voulons développer. Ceci est à mon avis primordial car sans cela, nous n’aurons pas une croissance à laquelle tout le monde pourra participer, avec les conséquences que l’on connaît sur la stabilité sociale, etc.
Améliorer et hausser notre niveau de productivité est essentiel pour faire face à nos futurs compétiteurs. Nous devons tout mettre en oeuvre pour y arriver. Et là, j’inclurai aussi la qualité de nos infrastructures, les services essentiels et l’administration publique.
Au niveau microéconomique, les défis majeurs sont étroitement liés à la globalisation et le niveau intense de la compétitivité est un défi pour bon nombre de nos piliers économiques. Le secteur sucrier survit difficilement dans l’attente des baisses du prix du sucre raffiné sur le marché européen.
L’hôtellerie se refait une santé en 2014, essentiellement grâce à la diversification de nos marchés touristiques et à l’accessibilité de notre destination sur la Chine et à travers Dubaï. Le problème reste cependant que la croissance de nos arrivées touristiques est très en dessous de celles des Maldives, des Seychelles ou du Sri Lanka. Nos marchés traditionnels, comme La France, sont toujours en contre-performance et là où le bât blesse, c’est que malgré la hausse des arrivées touristiques, les revenus perçus sont nettement inférieurs.
Quant à l’industrie manufacturière, elle doit continuer à se repositionner. Aujourd’hui, Maurice s’en sort car le pays maîtrise la production haut de gamme comparativement à la production de masse à moindre coût que pratiquent la Chine, le Bangladesh et l’Inde. Ce n’est qu’une question de temps avant que ces géants industriels ne contre-attaquent.
Enfin, il y a le secteur offshore mauricien qui s’est longtemps positionné en fonction des nombreux traités de non double imposition. On s’est longtemps sur concentré sur l’accord entre Maurice et l’Inde et toute renégociation reste un facteur risque. Une diversification en Afrique à travers le hub model doit être appliquée.
Il y a aussi le chômage des jeunes…
Le problème réside dans le fait que la croissance actuelle ne génère pas suffisamment de nouveaux emplois capables de résoudre la disparité entre les attentes des employeurs et l’expérience ou les qualifications des demandeurs d’emploi.
Au niveau de l’expérience, c’est parfois un cercle vicieux car sans travail, l’on n’acquiert pas d’expérience et donc le candidat se trouve souvent en difficulté face aux demandes du marché.
Il y a des solutions à court terme telles que celles proposées par le gouvernement à travers le YEP (Youth Employment Programme) pour encourager les entreprises à employer plus de jeunes.
Mais le challenge pour Maurice est de former nos jeunes à devenir des entrepreneurs. C’est ce qui a fait notre force dans le passé. Nous en avons ainsi encore plus besoin aujourd’hui et comme je l’ai dit plus tôt, nous devons revoir notre système d’éducation pour qu’il soit davantage en adéquation avec nos besoins.
Vous êtes le CEO du groupe Swan. Comment se présente cette industrie aujourd’hui. Estimez-vous que la restructuration engagée ces dernières années est arrivée à terme ?
Le secteur des assurances a connu une évolution importante durant cette dernière décennie. Les dispositions de l’Insurance Act 2005 et tout récemment la Private Pension Scheme Act 2012 ont fait que Maurice dispose aujourd’hui d’une législation et d’un cadre régulateur moderne. Les plus grands défis de l’industrie, c’est d’avoir un marché professionnel qui jouit d’une bonne réputation et aussi de sensibiliser tout un chacun au besoin de se protéger correctement et de prévoir son avenir.
Le secteur de l’assurance à long terme dans son ensemble reste soutenu et très concurrentiel et le marché possède une vaste gamme de produits sophistiqués et innovants. Il joue un rôle important et contribue dans une large mesure à l’économie mauricienne et à son avancement.
Tout comme le secteur de l’assurance à long terme, celui de l’assurance à court terme est mis à rude épreuve par la concurrence féroce pratiquée par la plupart des acteurs.
Le marché est en constante évolution et il est important que la qualité des produits et des services réponde aux attentes de la clientèle. Il va sans dire que le secteur de l’assurance à Maurice est et restera très dynamique et réactif afin de s’adapter aux réalités des marchés local et international.
L’Afrique attire les entreprises mauriciennes. Mais en même temps, faire du business dans ce continent relève parfois d’un parcours du combattant ?
Effectivement, les affaires se passent différemment sur le continent africain et le niveau de planification requis est beaucoup plus complexe que dans un contexte purement local. Il faut bien faire son «homework» avant de s’y lancer ; il faut installer des filets de protection adéquats, notamment en termes de diversification des risques. Il faut surtout aussi prendre le temps de développer un bon réseau de ressources locales.
En même temps, l’Afrique d’aujourd’hui offre des possibilités extraordinaires avec une population jeune qui participe davantage à la croissance qui tourne autour de 7-10 % en fonction des sous-régions. La demande africaine est aujourd’hui une réalité confirmée qui ne peut être négligée.
La Swan est présente en Afrique par le biais d’un véhicule de fonds propres privés.
Publicité
Publicité
Les plus récents




