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Faizal Jeeroburkhan membre de Think Mauritius: « La politique est aujourd’hui perçue comme une chose malpropre»
28 septembre 2014, 11:16
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Faizal Jeeroburkhan membre de Think Mauritius: « La politique est aujourd’hui perçue comme une chose malpropre»

Citoyen engagé, membre du groupe de réflexion Think Mauritius et de la Royals and Friends Action Line (RAFAL), il s’exprime sur la situation politique et le rôle des citoyens dans la gestion du pays.
Vous avez récemment organisé une conférence avec RAFAL sur les changements politiques. Quelle est votre lecture de la situation actuelle ?
Je suis très inquiet. Tout se résume à l’ambition de deux personnes en fin de carrière politique. Elles ont décidé de s’entraider pour partager le pouvoir sans tenir compte des aspirations du peuple.
Le pays fait face à beaucoup de difficultés d’ordre social et économique. Tous ces problèmes ne seront pas réglés comme le promettent les politiciens. Le fait que le Parlement n’ait pas siégé pendant des mois est un mauvais signal pour les travailleurs.
Je crains l’instabilité de l’alliance PTr-MMM. Il y a déjà des signes annonciateurs avec la déclaration du ministre de l’Éducation Vasant Bunwaree lors d’un congrès à Plaine-Magnien mercredi soir. Ce n’est que le début. Il y aura d’autres tiraillements qui auront certainement un impact sur la mise en oeuvre des programmes électoraux.
Y a-t-il une différence entre les projets de société proposés par l’alliance PTr- MMM et l’alliance MSM-PMSD-ML ?
Ces deux blocs politiques se ressemblent. Ils ont les mêmes réflexes politiques. Que ce soit sur les questions économiques ou de société.
L’exception pourrait être sur la question du Law and Order. De la lutte contre la fraude et la corruption. Nous avons espoir qu’avec l’alliance MSM-PMSD-ML, il y aura plus d’ordre dans le pays, surtout avec la présence de sir Anerood Jugnauth. Il est connu comme une personne capable de faire respecter la loi. Mis à part cela, je ne vois rien d’autre.
Il n’y a pas trop d’espoir non plus sur le plan économique. En fait, nous avons le choix entre deux alliances. L’une est très mauvaise, l’autre moins. Tout se limite à cela.
Pourquoi les petits partis peinent-ils à émerger ?
Il y a beaucoup de tiraillements entre les petits partis. Il faut peut-être qu’ils se rejoignent au sein d’une alliance. D’un autre côté, c’est dans la tradition mauricienne de voter pour les grands partis. Nous sommes dominés par ces deux grands partis politiques.
Il faut changer cette mentalité. Ces grands partis ont fait leur temps. Il faudrait faire de la politique autrement. La politique est aujourd’hui perçue comme quelque chose de malpropre. Les politiciens ont enlevé toutes les valeurs de la politique. L’honnêteté et la sincérité ont fait place aux mensonges et aux promesses creuses.
Ces deux blocs politiques peuvent-ils apporter un renouveau dans le pays ?
Non. Ce sera la continuité. Ce qu’il faut faire, c’est éviter que l’alliance PTr-MMM ait une majorité de 75 %. C’est très important car si on lui donne ce pouvoir, la IIe République verra le jour et celle-ci sera taillée sur mesure pour ces deux leaders qui veulent seulement partager le gâteau entre eux deux.
Est-ce que les dynasties familiales en politique sont destinées à se perpétuer dans le temps ?
Cette approche dynastique est très mauvaise et il faut absolument se défaire de tout cela. Elle a commencé avec Ramgoolam père et fils, ensuite les Jugnauth père et fils et maintenant les Duval. On ne peut pas avoir uniquement des gens d’une même famille en politique. Ce n’est pas possible.
Selon vous, est-ce que les Mauriciens votent de manière émotionnelle ou rationnelle ?
Il faut classer la population en plusieurs groupes. Un groupe de personnes va dire ‘Mo enn die hard’ et ça, ce sont des gens qui votent émotionnellement, peu importent les actions des leaders, le parti restera dans leur coeur.
Un autre groupe de personnes, lui, peut réfléchir et comprendre l’enjeu, mais il se tient à l’écart et n’entre pas dans les débats. L’autre groupe pense, réagit, élève la voix et se fait entendre. Ce petit groupe de personnes a une approche différente avec des idées nouvelles.
Les citoyens sont-ils suffisamment engagés politiquement ?
Dans une vraie démocratie, le citoyen est le patron, alors qu’à Maurice, le citoyen a un rôle uniquement quand il faut voter. Malheureusement, beaucoup de citoyens ne réalisent pas le pouvoir qu’ils ont entre les mains. Certains se laissent facilement embobiner par des politiciens malhonnêtes et accapareurs.
Si les citoyens réagissent ainsi, c’est parce qu’ils sont le produit de notre système éducatif qui forme des gens qui n’arrivent pas à exprimer leurs opinions.
Ces citoyens se laissent facilement convaincre par des considérations communales, castéistes, et des promesses creuses. Certains citoyens sont même disposés à vendre leur vote aux politiciens qui, eux, vont bâtir leur empire sur leurs faiblesses.
Il y a aussi cette mentalité de roder bout qui a contaminé toute la population. Même à la tête du pays, ils sont tous des roder bout.
Que faut-il faire concrètement pour changer la donne ?
Il faut une éducation citoyenne au niveau de l’école. Il faut que cette éducation soit faite de manière non partisane et les gens doivent réfléchir et réaliser qu’en fin de compte, s’ils ne votent pas avec intelligence, ils seront eux-mêmes les dindons de la farce.
Notez-vous une différence entre les citoyens engagés de votre génération et ceux qui ont actuellement moins de 30 ans ?
Les citoyens engagés de ma génération veulent faire quelque chose pour le pays. Mais tout tourne autour de l’éducation que nous avons reçue. Elle est très différente de l’éducation que reçoivent les jeunes actuellement. Les jeunes d’aujourd’hui ne montrent pas d’intérêt car ils sont dans un système éducatif où tout est focalisé sur les examens. L’éducation d’aujourd’hui est très académique mais ce n’est pas seulement ça, le rôle de l’éducation. Il faut aussi former les citoyens.
On note quand même l’absence des jeunes sur le front. Pourtant, ils sont présents sur les réseaux sociaux. Ceux-ci ont-ils un poids ?
Les jeunes s’identifient aux réseaux sociaux car ils trouveront en particulier des jeunes de la même tranche d’âge qu’eux et ils auront les mêmes centres d’intérêt et les mêmes motivations. Mais bien souvent, tout ce qui se dit sur les réseaux sociaux, ce sont des banalités sans réflexion profonde sur les difficultés de la société.
Pour que le pays connaisse un véritable progrès, qu’est-ce qu’il faut changer en priorité ?
Il faut d’abord s’attaquer à l’économie et on a un gros problème en ce qui concerne la sécurité alimentaire, qui représente une bombe à retardement pour demain. Tous ces produits qu’on importe aujourd’hui, on ne sait pas si on pourra les importer demain. Il faut revoir l’agriculture et essayer de produire le maximum de ce que nous consommons.
L’économie bleue doit être développée. On parle beaucoup de l’économie bleue mais en pratique, il n’y a rien qui se passe. L’économie verte, avec le projet Maurice île durable, doit aussi être développée pour faire durer nos ressources.
On parle de progrès et les partis politiques parlent de développement, mais quid de l’essentiel : des problèmes du peuple comme la pauvreté ?
Sur le plan social, il y a en effet beaucoup à faire. Il faudrait commencer par consolider le mauricianisme. En ce qui concerne la pauvreté, on ne peut pas, avec notre revenu par tête d’habitant, avoir autant de personnes pauvres. Certaines familles vivent avec un salaire de Rs 2 000 par mois. Sur le plan social, il faut également mettre l’accent sur la sécurité. Les gens doivent être plus protégés physiquement et aussi psychologiquement.
Pourquoi ne pas vous jeter dans l’arène politique ?
J’ai beaucoup réfléchi à cette éventualité et j’ai des demandes de différents partis politiques qui m’invitent à les rejoindre. Selon moi, un politicien doit se mettre au service des citoyens et si ce n’est pas le cas, je renonce.
Les politiciens parlent aussi d’approfondir la démocratie mais notre modèle de démocratie actuel n’a-t-il pas fait son temps ?
Notre démocratie est représentative. Une fois élus, les politiciens font ce qu’ils veulent mais il faut passer à une démocratie participative où le citoyen a son mot à dire. Il faut qu’au niveau du Parlement, on ait des comités parlementaires où les gens pourront faire entendre leur voix. Pour approfondir la démocratie, il faudrait aussi avoir une réglementation pour le financement des partis politiques.
Que pensez-vous de l’attitude des politiciens vis-à-vis de la presse, qui incarne le chien de garde de la démocratie ?
Pour commencer, les politiciens, en particulier ceux de l’opposition, devraient eux-mêmes être des chiens de garde de la démocratie. Les politiciens attaquent la presse, car ils n’ont pas d’arguments pour se défendre.
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