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Suttyhudeo Tengur et Jimmy Harmon comptent faire de leur organisme respectif une référence pour la région

5 octobre 2014, 12:18

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Suttyhudeo Tengur et Jimmy Harmon comptent faire de leur organisme respectif une référence pour la région
 
Suttyhudeo Tengur et Jimmy Harmon ont été nommés respectivement au Mauritius Standards Bureau et au centre Nelson Mandela par le cabinet la semaine dernière. Tous deux vont relever le défi pour faire de leur organisme respectif une référence pour la région pour le premier et un phare pour l’ethnie créole pour le second.
 
Suttyhudeo Tengur
Offrir plus de visibilité au Mauritius Standards Bureau
 
«Je n’ai reçu aucune lettre de nomination, ni de coup de téléphone pour m’en avertir. J’ignore pourquoi ils m’ont nommé à la tête de ce conseil. Petet zot inn pense ki bizin enn dimounn fer kiksoz pou konsomater. Me mo pa pou fer kado okenn dimounn, ni Sayed Hossen (NdlR : Cader Sayed-Hossen, ministre du Commerce et de la protection des consommateurs), ni so Premie minis. Mo pa dwa zot sa nominasyon la. Zot kinn nom mwa. Zot pa pe fer mwa enn faver ler zot nom moi laba», insiste Suttyhudeo Tengur. Toujours est-il qu’il oeuvrera pour que ce conseil devienne la référence régionale en matière de normes.
 
Lorsque cet homme, qui compte 38 ans dans l’enseignement de langue orientale (hindi), dont 34 ans de lutte syndicale, déterre un os, il ne lâche pas prise facilement comme l’atteste son parcours.
 
Il a présidé pendant 32 ans le Government Hindi Teachers’ Union, tout en modernisant ce syndicat et l’obligeant à constituer des archives sur les évènements économiques, politiques et sociaux du pays, à conserver des coupures de presse, les révisions salariales pré et post-indépendance et tout ce qui a trait aux relations industrielles. Il n’a jamais lâché du lest dans ses contestations.
 
C’est ainsi qu’il n’a pas hésité à saisir le conseil privé de la reine lorsqu’il a été débouté en Cour suprême par rapport à sa demande d’inclusion des langues orientales dans le classement à l’examen du Certificate of Primary Education (CPE). Tout comme il a contesté la pratique des places réservées dans les collèges confessionnels en Cour suprême et a obtenu gain de cause lorsque la Roman Catholic Education Authority a été déboutée au conseil privé de la reine. Il a aussi lutté pour que les enseignants de langues orientales puissent finalement avoir la possibilité d’accéder aux postes les plus élevés dans la hiérarchie éducative.
 
Avant de céder sa place aux plus jeunes au sein du syndicat, Suttyhudeo Tengur veut absolument modifier le ratio enseignant/élèves car actuellement, il est d’un enseignant pour 40 élèves alors que l’Unesco recommande que ce ratio soit d’un enseignant pour 24 élèves : «Li imposib tel ki li ete. Samem kalite inn besse dan rezilta CPE.» S’il a fondé l’APEC, il y a cinq ans, c’est parce qu’il considère que l’environnement et les consommateurs sont deux sujets qui domineront le monde dans les années à venir. «Il y a les menaces à l’environnement et en matière d’alimentation, la production baisse alors que la consommation augmente. Ces deux sujets domineront le monde», prédit-il.
 
La force de l’APEC est son site web animé et réactualisé par une dizaine de personnes incluant lui et dont l’objectif est d’éduquer les consommateurs par le biais d’une communication adéquate, moderne et efficiente. «Un individu infor mé peut résoudre ses problèmes à plus de 50 %.»
 
L’APEC, souligne-t-il, a réussi à forcer la main à Michaël Sik Yuen, ex-ministre du Commerce et de la protection des consommateurs et à lui faire mettre sur pied un Observatoire des prix. «Malheureusement Sayed-Hossen pa finn konpran sa ek finn les sa instans la vinn enn Observatoire des fonctionnaires. Sayed-Hossen fer ditor konsomater. Li pa finn resi amand Consumers’ Protection Act ki date de zane 90 et ki bizin reaktialize. Sayed-Hossen fer figirasion. Mo harsh kan mo koze me mo kone kifer. Li riske regrete linn nom moi…»

Jimmy Harmon
Un chercheur engagé à la tête du centre Nelson Mandela
 
À la mi-octobre, Jimmy Harmon prendra un congé sans solde de l’Institut Cardinal Jean Margéot (ICJM) où il dirige le département de pédagogie appliquée pour prendre ses fonctions au centre Mandela. S’il assume l’appellation de nominé politique, il estime avoir été choisi avant tout pour son profil.
 
«Lorsque je vois la mission du centre qui est la promotion de la culture africaine et créole dans toute sa diversité et dont le rôle est de faire des recherches et de les publier, je trouve que le poste offert est parfaitement dans mes cordes car la carrière académique, la recherche et l’engagement dans la communauté m’intéressent.»
 
D’ailleurs, la philosophie de l’université de Western Cape, auprès de laquelle il soumettra prochainement sa thèse de doctorat sur la langue créole et l’identité, est celle de «Militant Scholar». «C’est exactement moi.» Il entend faire du centre «un phare qui indique les obstacles sur le chemin et la voie à suivre. Je ne suis pas Zorro mais je travaillerai avec l’équipe et le Board pour dynamiser le centre et l’emmener plus loin.»
 
Jimmy Harmon puise ses racines du milieu ouvrier chrétien. Son père, Claude, est un travailleur du port aujourd’hui retraité et sa mère Yvette, originaire d’Agalega, est femme au foyer. Les deux n’ont pas fait de grandes études mais ils avaient de l’ambition pour leurs trois enfants. C’est pour cela que leur père leur a souvent répété qu’ils ne doivent pas «trap marto kouma papa» car ils valent plus que cela.
 
Scolarisé, Jimmy Harmon est conseillé dans ses lectures par un proche, qui est frère spiritain missionnaire et marxiste dans l’âme tandis que ses voisins, un frère et une soeur, recteurs à la retraite, lui prêtent d’anciens questionnaires d’examens.
 
Il s’applique et absorbe tout ce qu’il peut de ses enseignants du collège Bhujoharry. Cela ne l’empêche pas de militer auprès de plusieurs organisations dont le Front Anti- Apartheid. Au final, ce passionné de langues qui rêve d’être journaliste, sort premier en World Affairs en Form VI. Et bien qu’il écrive dans les journaux «Nouvo Lizour» et «Horizons Nouveaux» depuis l’âge de 13 ans, il ne trouve pas d’emploi comme journaliste.
 
C’est donc vers l’enseignement qu’il se dirige. Employé au collège London, il étudie en parallèle et décroche une licence en lettres auprès de l’université de La Réunion qui donne des cours à Maurice. Après sept ans, il se laisse débaucher par les religieuses de la congrégation réunionnaise des Filles de Marie, qui ont ouvert le collège Notre Dame à Maurice à la fin des années 50 pour les enfants du milieu ouvrier. Elles l’incitent à passer son Post Graduate Certificate in Education afin de l’orienter vers l’administration.
 
Et lorsqu’un poste d’adjoint au recteur est vacant, Jimmy Harmon est nommé. Il reprend les études et obtient une maîtrise en Educational Leadership auprès de l’Australian Catholic University. Sa perception de la catégorisation sociale en lutte des classes prend une autre dimension lorsqu’il s’intéresse au vécu de la fondatrice de la congrégation qui s’est lancée dans l’éducation d’enfants issus de milieux ouvriers à La Réunion dès l’abolition de l’esclavage.
 
«Je sentais que pour pouvoir gérer le collège Notre Dame en étant fidèle à l’esprit et aux idéaux de la fondatrice de la congrégation, il me fallait m’intéresser à son vécu. Chez les Filles de Marie, j’ai compris qu’il y a certes la lutte des classes mais aussi la couleur et les origines ethniques. Et qu’en tant qu’éducateur et humain, je devais m’occuper de tout le monde. C’est à partir de là que je me suis intéressé aux pauvres et ce faisant, j’ai découvert que ce sont surtout des créoles qui sont affectés. De là, j’ai épousé la conscience créole.»
 
C’est ainsi qu’il s’est engagé auprès du Comité diocésain 1er février qui a déposé devant la Commission Justice et Paix, tout comme il a fait partie des organisateurs de la première Convention créole appelée à se répéter tous les trois ans.
 
Après une incursion dans le secteur public en tant que manager du projet Prevok à la demande de l’ancien ministre de l’Éducation, Steven Obeegadoo, il a démissionné quand il a eu le sentiment que le projet serait modifié par le successeur du ministre. Il a alors retrouvé le collège Notre Dame pour quelques mois car le diocèse de Port-Louis l’a invité à intégrer le Centre d’Information pour les Éducateurs devenu par la suite le département de pédagogie appliquée de l’ICJM.
 

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