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Renuka Sawoky, assistante surintendante: sa patience a payé

11 octobre 2014, 09:36

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Renuka Sawoky, assistante surintendante: sa patience a payé

Renuka Sawoky, une des deux policières récemment nommées assistantes surintendantes de police, a failli jeter l’éponge après une mutation qui lui a déplu. Sa patience est aujourd’hui récompensée.

 

Bien que Renuka Sawoky soit responsable du poste de police de Floréal, elle ne joue pas à la chef. Chaque policier servant sous ses ordres semble connaître son travail et vaque à ses occupations. La nouvelle assistante surintendante n’est dérangée que pour être notifiée de la présence d’une autre visiteuse qui se trouve être Sundee Beedassy,  conseillère à la mairie de Curepipe. Les deux femmes se jettent alors dans les bras l’une de l’autre et ce sont des effusions et des félicitations à n’en plus finir. Sont-elles apparentées ? Pas du tout, expliquent-elles. Leur relation, au départ professionnelle, s’est tissée il y a quelques années et a progressivement mué en amitié. «C’est une policière très à l’écoute et toujours prête à aider», confie Sundee Beedassy.

 

Cela fait 40 ans que Renuka Sawoky a intégré la force policière. Si cette cadette de huit enfants vivant à Plaine-des-Papayes a choisi cette filière, c’est sur l’insistance de son père, Arjoon, qui du temps de sa jeunesse, voulait être policier. Il avait même passé un entretien d’embauche à cet effet. Mais comme il avait une malformation à un doigt, on lui a conseillé de se faire opérer avant de retenter sa chance.

 

«Mon père avait un peu la frousse des interventions chirurgicales et a donc laissé tomber. Mais il a toujours nourri un regret de n’avoir pas été policier.» De tous les  entretiens d’embauche qu’elle obtient à l’issue de ses études au collège Bhujoharry et de son cours de secrétariat, elle hésite entre la Banque de Maurice et la police. Comme les deux sont programmés le même jour mais à des heures différentes, Renuka Sawoky se rend d’abord aux Casernes centrales en pensant qu’elle pourra maintenir son rendez-vous à la Banque de Maurice par la suite.

 

Or, dès qu’elle met les pieds au quartier général de la police, elle et les autres recrues sont happées et conduites à l’aéroport SSR de Plaisance où elle est affectée à la fouille des passagers. Adieu donc l’entretien d’embauche à la Banque de Maurice. Mais Renuka Sawoky pense n’avoir pas dit son dernier mot et refait une demande d’emploi auprès de la Banque de Maurice. Son père coupe court à son désir de quitter la police. Si elle apprécie son affectation à l’aéroport, le trajet aller-retour en autobus de Plaine-des-Papayes à Plaine-Magnien l’éreinte.

 

Au bout d’un an, la constable Sawoky est transférée aux Casernes centrales où elle fait du travail administratif. Après deux ans de ce régime, c’est à la Traffic Branch qu’elle est envoyée. Le travail de dactylographe finit par lui peser, elle est donc heureuse lorsqu’on la mute au National Security Service. Elle préfère ne pas s’étendre sur la nature de son travail dans cette division spéciale de la police.

 

Après une escale au Port-Louis Sud District Headquarters, elle goûte aux joies du travail administratif au sein de la Special Supporting Unit. «Les Casernes centrales étaient devenues ma deuxième maison.» Les femmes n’étaient pas aussi nombreuses au sein de la force à cette époque. Tout au plus, une cinquantaine. Elle est promue inspecteur de police en 1995. Son désir de faire du terrain est entendu car après un retour à la Traffic Branch, c’est à la DomesticViolence Protection Unit du ministère de la Femme qu’elle est mutée. Sa base d’opération est l’unité de Mahébourg. Là, en tant qu’Enforcement Officer, elle prend la pleine mesure de la violence envers les femmes. Elle réalise aussi que l’Interim Protection Order ne suffit pas pour les protéger. «Cela me peinait de voir cette escalade de violence contre les femmes.» Certains cas la choquent et la  bouleversent, à tel point qu’elle demande une mutation.

 

Comme elle est bonne en informatique et que la Traffic Branch commençait à  s’informatiser, elle y est envoyée en tant que responsible du processus. Après quoi, c’est à l’Oral Test Centre qu’elle est affectée et supervise tout ce qui s’y déroule. Ses supérieurs étant satisfaits de son travail, en 2007, elle est promue chef inspecteur et nommée responsable du Licensing Office. Elle dirige alors une quarantaine d’hommes.

 

Autant ses rapports avec les plus jeunes sont cordiaux, autant les plus anciens la regardent non sans une certaine méfiance. «Ils ne montraient pas d’hostilité ouverte mais je voyais bien dans leurs regards qu’ils se demandaient si j’allais être à la hauteur. Lorsqu’ils se sont rendu compte que je l’étais et que je n’allais nullement les tyranniser, les rapports se sont améliorés.» La politique qu’elle applique relève davantage du donnant donnant que de celle de la carotte et du bâton. «Je veux du rendement et si c’est fait dans la manière et qu’ils ont besoin de quelque chose, je l’accorde. Et cela marche à merveille. Mais je reconnais qu’il faut parfois utiliser le bâton.» Ses coups de ‘bâton’ prennent la forme de mouvements de colère. «Il arrive que je montre mon   mécontentement lorsqu’un travail a été mal fait ou si le contraire de ce que j’ai demandé a été fait.»

 

C’est depuis 2008 qu’elle a été envoyée à la Central Division de Floréal qui s’étend de Vacoas à Midlands. Une mutation pas vraiment à son goût. À tel point qu’elle pense à démissionner. C’est sans compter les encouragements de son mari Rajhun, enseignant désormais à la retraite, et de sa fille Davina, aujourd’hui mariée à Pravin et établie à Cape Town en Afrique du Sud où elle travaille pour la société pétrolière Engen. Renuka  Sakowy prend donc son mal en patience et se donne à fond dans le travail. D’abord en poste à Midlands, elle est ensuite basée à Floréal où elle est responsable du poste de police et de la région. Elle et la cinquantaine de policiers qu’elle commande ont sous leur supervision les quartiers huppés avec notamment les ambassades et les belles demeures des notables, ainsi que les cités Mangalkhan et Loyseau.

 

Les délits les plus récurrents sont les vols et la consommation de gandia, de même que les rapports sexuels avec des mineures. «La société est devenue sexuellement permissive et c’est navrant. Je vois aussi beaucoup d’agressions entre conjoints avec l’alcool en toile de fond. C’est triste.»

 

Ce qu’elle apprécie le plus, c’est le contact avec le public. «Je crois dans la relation entre le public et la police et là où il est possible d’aider, nous aidons.» Et même les rondes après minuit que tout policier doit faire quatre fois par mois ne la dérangent pas. D’autant plus que depuis que son mari est à la retraite, il l’accompagne durant ces tournées nocturnes.

 

Sa nomination en tant qu’assistante surintendante ne va pas sans des responsabilités accrues. En sus du poste de police de Floréal, cette grand-mère de deux petits enfants, Shayne, deux ans et demi, et Rayaan, un an, a désormais sous son contrôle le poste d’Eau-Coulée.

 

Elle est heureuse qu’il y ait un plus grand nombre de femmes dans la force policière car selon elle, les femmes font la différence. «Elles sont plus consciencieuses et plus soucieuses des détails. Elles sont beaucoup plus orientées vers le public. De plus, j’ai noté que la présence des femmes policières dans un poste dissuade leurs collègues à se montrer grossiers.»

 

Renuka Sawoky est peinée lorsqu’elle entend dire qu’un policier a commis un délit. «Ils ne réalisent pas la chance qu’ils ont d’exercer un métier d’autorité. Ils ne connaissent pas la valeur de l’uniforme et c’est incompréhensible.» Elle ne serait pas opposée à l’idée que les policiers puissent se syndiquer. «C’est le cas en France. Pourquoi pas chez nous ?»

 

La nouvelle assistante surintendante n’a pas encore décidé de son plan de carrière à venir. Va-t-elle viser le ciel ou se retirer après 2018, d’autant plus qu’il y a l’attrait de ses petits-enfants chéris en Afrique du Sud ? «Je l’ignore encore à ce stade.» Elle a bien raison. À chaque jour suffit sa peine…

 

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