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Milan Meetarbhan, Ancien directeur de la FSC «Qui a décidé qu’il y avait fraude à la BA Insurance ou à la Bramer Bank ?»

18 avril 2015, 07:26

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Milan Meetarbhan, Ancien directeur de la FSC «Qui a décidé qu’il y avait fraude à la BA Insurance ou à la Bramer Bank ?»

Directeur de la Financial Services Commission de 2005 à 2010, Milan Meetarbhan est prudent face à la chute du Groupe BA Investment. Pour l’heure, insiste le juriste, il n’y a aucun élément qui pousse à croire à une fraude. Ce dont il est sûr, c’est que le gouvernement est en train de se substituer aux autorités. Et cela l’inquiète.

 

Abonderez-vous dans le sens de ceux qui crient à la vendetta politique et au hold-up d’État face aux malheurs du Groupe BA Investment ?
Les circonstances dans lesquelles ces décisions ont été prises donnent lieu à beaucoup de spéculations sur les motivations réelles. Il n’y a pas eu suffisamment de transparence dans la prise de décision. On n’a jamais dit quelle était la nature de la fraude et comment on est arrivé à conclure qu’il y avait une fraude de 25 milliards.

 

Vous doutez de l’existence de la fraude ?
Non. Mais jusqu’ici personne n’a expliqué. Le régulateur a justifié la nomination de conservateurs par le fait que la licence de la banque avait été révoquée et que cela pourrait avoir des répercussions. Le régulateur n’a jamais parlé de fraude. Mais je ne dis pas qu’il n’y a pas de fraude.

 

L’argent des policy holders a été investi à 85 % dans des related companies qui font faillite. Le gouvernement se devait d’intervenir, non ?
Justement, je pense qu’il y a une confusion au niveau des rôles, ce qui m’inquiète. Je suis tout à fait d’accord pour que toute infraction à la loi par une institution financière ou un politicien soit sanctionnée et qu’on rétablisse la confiance des Mauriciens. Mais il faut absolument que le rôle des institutions soit respecté dans le cadre d’un état de droit. C’est au régulateur de déterminer s’il y a fraude. Donc la question fondamentale est : qui a décidé qu’il y avait fraude ? Si c’est le régulateur, pourquoi le régulateur ne l’a pas dit. On nous a parlé de manque de liquidités et de méga scandale. C’est un scandale le manque de liquidités ?

 

Le ministre Bhadain affirme que KLAD faisait des pertes de 118 millions de dollars au 31 décembre 2012. Les passifs dépassent les actifs par 302 millions de dollars. N’est-ce pas suffisant pour concéder que le groupe dont font partie la Bramer Bank, BA Insurance et Bramer Asset Management a un énorme problème ?
Je fais confiance à ce que disent les régulateurs indépendants.

 

Vous ne faites pas confiance aux chiffres de Roshi Bhadain ?
Je ne vois pas pourquoi je devrais évaluer la situation en me basant sur ce que dit un politicien.

 

Il est aussi ministre de la bonne gouvernance.
Ah bon ? C’est de la bonne gouvernance quand quelques jours avant que la licence de la Bramer Bank ne soit révoquée, certaines personnes le savaient déjà ? Pour moi il faut se baser sur ce qui est crédible et je fais confiance aux régulateurs et auditeurs indépendants.

 

Roshi Bhadain cite la note 38 du rapport des auditeurs de KLAD Investment en avançant ces chiffres. Vous refusez de les voir ?
Quand je vois à quel point tout est politisé actuellement, et que je constate une confusion totale de rôles ; quand des politiciens agissent comme enquêteurs, procureurs ou juges, vous me permettrez d’accorder plus de crédibilité à ce que disent les régulateurs.

 

Celui qui était directeur de la FSC quand BA Investment a commencé son expansion massive défend Dawood Rawat. Ça fait un titre vendeur pour cette interview, vous ne trouvez pas ?
Qu’est-ce qui vous permet de dire que je défends Dawood Rawat ? Je trouve insultant qu’à chaque fois qu’on soulève desquestions de principe, la seule réaction possible c’est qu’ondéfend untel. C’est aberrant qu’on n’arrive toujours pas à dire que le respect des normes, le respect du droit, et l’image de Maurice comme un pays de droit est important et concéder qu’il y a des gens de principe qui peuvent défendre l’état de droit sans vouloir défendre qui que ce soit. Je répète, je suis tout à fait pour les sanctions contre ceux qui ont enfreint la loi.

 

Mais en contestant la forme vous contestez aussi le fond !
Absolument pas. Qu’estce qui vous permet de dire cela ? Depuis quelque temps on veut faire croire que la fin justifie les moyens. Dans un état de droit, la fi n ne justifie pas les moyens. Il faut agir conformément aux droits.

 

Sans ces moyens-là la fi n aurait pu être une crise sociale avec des policy holders qui ne récupèrent pas leur argent et des investisseurs qui ne touchent pas leurs intérêts.
Le régulateur doit agir. Mais que ce soit dans le secteur financier ou dans tout autre sphère, les politiciens ne peuvent pas se substituer aux institutions. Dire cela ne veut pas dire que je défendsqui que ce soit.

 

À part la forme de l’action gouvernementale, rien dans les finances du Groupe BAI et de ses filiales ne vous interpelle ?
Si, bien sûr. Il y a une question fondamentale. L’institution détient-elle suffisamment d’actifs pour couvrir ses obligations? Si c’est le cas, les policy holders n’ont rien à craindre. Par contre, si la réponse est non, alors nous aurions un problème. Mais je ne suis plus le régulateur, je ne détiens pas ces informations.Peut-être que le rapport desconservateurs nous aidera à mieux comprendre.

 

Quand vous étiez directeur de la FSC, Dawood Rawat a utilisé les fonds au sein même de BA Investment, ceux de Bramer Asset Management et de Bramer Property Fund notamment pour acheter le groupe. Les related party investments au sein du groupe étaient à leur summum. Vous n’avez rien vu ?
Je ne peux rien vous dire à ce sujet. La loi m’en empêche. Même après mon départ de la FSC, je suis tenu à respecter une clause de confidentialité. Mais ce que je peux vous dire, puisque c’est du domaine public, c’est qu’il y avait des inquiétudes par rapport à trois compagnies d’assurance aumoins et nous avons agi. Tous ces cas étaient liés à la question de non compliance. Il n’y avait jamais d’indications ou d’éléments de fraude.

 

Mais compliance veut aussi dire respecter le règlement qui impose un plafond de 10 % pour les investissements dans des related parties. Quand vous étiez directeur de la FSC, BA Insurance a toujours été bien au-dessus de ce plafond. Pourquoi n’était-elle pas dans votre collimateur ?
Je vous répète que je suistenu par loi à ne pas divulguer les observations faites et décisions prises au sujet d’un opérateur particulier. Demandez à la FSC. Elle est autorisée à vous le dire. Pas moi.

 

Mais Marc Hein a bel et bien parlé la semaine dernière dans l’express samedi. Il a enfreint la loi ?
Marc Hein a sa propre interprétation de la loi. C’estun bon juriste qui sait ce qu’il fait. I am my own legal adviser.Vous m’invitez à enfreindre la loi. Allez voir l’article 83 du Financial Services Act.

 

Le rapport du FMI et de la Banque mondiale en février 2007 n’était-il pas alarmant ?
Ce rapport ne nous a rien appris. Il nous a dit ce que nous savions déjà. Mais, encore une fois, je ne peux rien vous dire sur ce que nous avons fait avant et après ce rapport.

 

On ne vous a jamais empêché d’agir contre BA  Investment quand vous étiez directeur de la FSC ? 
Jamais. Ni les filiales de BA Investment ni contre qui que ce soit.

 

Dans le Budget 2007, Rama Sithanen introduit la taxe sur les intérêts bancaires. Juste après, les ventes de certains produits de BA Insurance grimpent en flèche. Logique, puisque les polices d’assurance, contrairement aux dépôts bancaires, n’étaient pas taxées. Connivence ou coïncidence ?
Ceux qui voient une connivence font un procès d’intention à Rama Sithanen. Mais demandez à Rama Sithanen,je ne peux pas répondre à sa place.

 

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