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Échouement du «Wakashio»: risque de cassure, l’urgence de pompage d’huile s’accentue

11 août 2020, 05:00

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Échouement du «Wakashio»: risque de cassure, l’urgence de pompage d’huile s’accentue

Les conditions climatiques se dégraderont à partir d’aujourd’hui et plusieurs questions se soulèvent sur une éventuelle cassure du «Wakashio». Si jamais le vraquier résiste au mauvais temps, pourra-t-il être renfloué ? Sombrera-t-il dans les abysses ? Que deviendra-t-il ?

Les heures du MV Wakashio, battant pavillon panaméen sont comptées. Samedi, lors d’une conférence de presse, le Premier ministre (PM) a annoncé que suite au temps qui va se dégrader, il y a un risque que le vraquier se brise en deux. «Il y a une autre fissure aux environs des cales n°6 et 7, là où le navire s’est incliné. Sé la ki li kapav kasé», a affirmé le chef du gouvernement. À noter qu’à l’heure où nous mettions sous presse, ce n’était pas encore le cas mais… 

Les services météorologiques de Vacoas annoncent pour aujourd’hui un vent du sud-est avec des rafales pouvant atteindre les 50 km/h aux endroits exposés. La météo annonce également une mer forte au-delà des récifs avec des houles du sud-ouest de l’ordre de 3 mètres allant jusqu’à 5 mètres. Les sorties en haute mer de même que dans les lagons du Sud et du Sud-Est sont déconseillées. Même si la météo prévoit une amélioration graduelle du temps tard dans la nuit, le MV Wakashio peut d’ici là être une épave.

Ce que confirme une source scientifique. Tous les matériaux à bord se dégradent. Le bateau peut se fissurer encore plus. «Nous sommes dans un fractual processus avancé. Le vraquier n’a pas beaucoup de temps devant lui.» Les deux réservoirs qui sont jusqu’à présent intacts vont être affectés à cause de la corrosion et des forces du vent et des vagues. D’où l’urgence de pomper rapidement l’huile lourde à bord. «C’est un produit extrêmement dangereux. Il est hautement volatil. Il faut que le gouvernement pompe cette huile le plus vite possible. Quatre compagnies pétrolières à Maurice ont les équipements et l’expertise nécessaires. Elles peuvent non seulement assurer la sécurité mais aussi accélérer la capacité de stockage.» Selon notre source, il semble que l’urgence de la situation n’ait pas été comprise. Elle met aussi en garde contre la mauvaise manipulation de cette huile lourde par les volontaires. Une explosion serait une catastrophe. D’où le besoin que le fioul soit collecté de façon professionnelle.

Un professionnel maritime abonde dans le même sens. Il aurait fallu pomper toute cette huile depuis le début. «L’huile lourde est tellement visqueuse qu’il faut la chauffer pour que le pompage aille plus vite. Je ne suis pas sûr que ce soit ce qui se fait car il n’y a pas d’électricité à bord. L’huile est pompée à froid.» Lors de l’échouement d’Angel 1, en 2011, les «salvers» ont pris trois semaines pour pomper 1 100 tonnes métriques de fioul. Si le vraquier se casse en deux, il y a un risque que tout ce mazout se déverse et souille encore plus le lagon. Lors de la conférence de presse samedi, le Premier ministre a affirmé que des dispositions seront prises pour que la partie du bateau qui abrite le fioul soit sécurisée avec des remorqueurs. Entre-temps, des hélicoptères font le va-et-vient entre le vraquier et la terre ferme pour y déposer des cubitainers. Mais les autorités font face à deux problèmes de taille, soit une saturation de la capacité de stockage et la capacité des pompes qui est limitée. «Engen et Indian Oil nous ont donné deux barges mais elles sont remplies, ainsi que d’autres capacités de stockage. Valer di zour nou pena kapasité pou stock tou delwil.» Les équipements venant de La Réunion devraient accélérer l’exercice de pompage.

Si jamais le vraquier résiste au mauvais temps, pourrat- il être renfloué ? Sombrera- t-il dans les abysses ? Que deviendra-t-il ? Selon notre professionnel maritime, même si l’armateur veut couler le vraquier, il lui est impossible de le faire dans ces conditions. «Des autorités internationales suivent la situation de près. Et s’il faut couler le navire, il faut le nettoyer, enlever toute l’huile, le renflouer et ensuite le pousser vers le large à une profondeur de 5 000 mètres. C’est impossible de le couler avec toute l’huile à l’intérieur.» Sollicité samedi pour cette éventualité, un préposé de Nagashiki Shipping Ltd nie en affirmant qu’aucune décision de le faire sombrer n’a été prise. «L’opération de renflouage est en cours. L’objectif principal pour l’heure est de pomper toute l’huile et de mitiger les effets environnementaux.» 

Face à la pollution grandissante sur la côte est-sudest, l’armateur souligne dans une correspondance que l’ITOPF (International Tanker Owners Pollution Federation - Fédération internationale des armateurs pétroliers contre la pollution) donne actuellement des conseils au propriétaire, à l’équipe de sauvetage et au gouvernement sur la pollution et les effets possibles. Il ajoute : «Le propriétaire et son club P + I ont engagé une équipe spécialisée d’intervention et de sauvetage qui coordonne ses actions avec les autorités mauriciennes pour atténuer les effets de toute pollution. Nagashiki Shipping assume ses responsabilités environnementales très au sérieux et, avec les agences et contractants partenaires, mettra tout en oeuvre pour protéger l’environnement marin et prévenir toute nouvelle pollution.»

Pour rappel, une fissure a été détectée sur le réservoir d’une capacité de 1 183 tonnes métriques qui se trouve à tribord du vraquier. Mais d’autres apparaissent.

Plus de 2 500 tonnes de carburant encore sur le navire

Plus de 500 tonnes métriques d’huile lourde se sont déversées dans nos lagons. 170 tonnes ont été pompées de la mer. C’est ce qui ressort du point de presse de Pravind Jugnauth, hier. Depuis vendredi soir, environ 760 tonnes métriques de carburant ont été pompées de la cuve endommagée. Selon le PM, il reste 2 500 tonnes métriques à bord. 

Une deuxième cuve qui contient de 800 tonnes métriques d’huile se trouve dangereusement proche de celle qui est endommagée. Un exercice transfert est effectué d’une cuve à l’autre. À ce jour, 65 % de ce liquide a été envoyé à la cuve qui est «mieux protégée». Le reste sera transféré lorsque les conditions climatiques le permettront.

Les plongeurs des sociétés de sauvetage maritime ont fait comprendre aux autorités que des fissures additionnelles se sont présentées sur le navire. Du coup, les autorités s’attendent à ce que le navire se casse en deux à n’importe quel moment. «Nous nous préparons au pire.» 

Toutefois, toute l’huile qui se trouvait encore dans la cuve endommagée a été retirée avec l’aide des hélicoptères. Selon les prévisions météorologiques, ce n’est que vers 19 heures ce soir que les conditions seront plus propices pour faire enlever une quantité plus importante de mazout du vraquier. 

En attendant, les opérations de nettoyage des côtes affectées se poursuivront aujourd’hui. Des écumoires en provenance de Rodrigues, de La Réunion et de la Grèce seront opérationnelles le plus tôt possible pour accélérer le processus. Le PM a expliqué que la priorité est de gérer la catastrophe écologique avant de réclamer des dédommagements au propriétaire de Wakashio. 

Par ailleurs, les établissements scolaires de la zone affectée resteront fermés aujourd’hui et demain.

 

 

«Fouiller un puits pour enfouir tout le fioul»

<p><em>&laquo;On pompe le carburant mais on ne sait où le mettre&raquo;</em>, a rappelé un avisé du secteur maritime à l&rsquo;express, hier. <em>&laquo;Or, un produit émanant de ce navire ne doit jamais être mélangé avec un stock de produits certifiés aux normes. Il faut plutôt, après le transfert de la barge à un camionciterne, stocker le fioul en isolation pour qu&rsquo;il puisse être revendu pour utilisation dans des fourneaux&raquo;,</em> soutient notre interlocuteur.&nbsp;</p>

<p>Toutefois, poursuit-il, comme cela n&rsquo;est pas possible à Maurice, il est d&rsquo;avis qu&rsquo;il faut donc enfouir tout ce fioul. &laquo;<em>Il faut pour cela fouiller un grand puits. Le fioul se dégradera sous la terre. Il ne faut pas oublier que le pétrole sort du sous-sol et reste un produit organique. Il est biodégradable car il existe dans la nature une multitude de micro-organismes capables de le transformer en source d&rsquo;énergie pour leur propre consommation. Par contre le plastique, produit par l&rsquo;homme à partir du pétrole n&rsquo;est pas biodégradable. L&rsquo;homme n&rsquo;a pas produit de microorganismes capables de reconnaître le plastique comme source d&rsquo;énergie.&raquo;&nbsp;</em></p>

<p>Par ailleurs, il a fallu que le pire se produise pour que les autorités s&rsquo;activent et dépêchent deux barges, Tresta et Elise, vendredi. Celles-ci étaient pourtant amarrées au port.&nbsp;</p>

<p>Des voix averties dans le domaine maritime estiment qu&rsquo;il fallait les envoyer en toute urgence depuis le premier jour pour vider les réservoirs de fioul du Wakashio en attendant les sauveteurs. <em>&laquo;Le principe de base est de se débarrasser de tous polluants liquides et solides et non pas attendre des fissures dans la coque du bateau pour le faire. Le renflouage et le remorquage viennent bien après&raquo;</em>, fait-on valoir sous le couvert de l&rsquo;anonymat par peur de représailles.&nbsp;</p>

<p>D&rsquo;autre part, il nous revient qu&rsquo;un navire de forage, le Saipem 12000, battant pavillon des Bahamas, qui est équipé de pompes avec rallonges et dont la fonction comprend le pompage du carburant même en pleine mer houleuse, se trouve également au port depuis quelques jours. <em>&laquo;Ces navires vont ravitailler des plateformes de forage et il y en a toujours qui passent à côté de Maurice et qui ont besoin eux aussi de ravitaillement durant la traversée.&raquo;</em></p>

<p>Sauf que les autorités n&rsquo;ont pas jugé utile de le solliciter. Ce qui provoque la consternation chez ces avisés des activités maritimes et du commerce du pétrole, c&rsquo;est que les autorités soient restées les bras croisés en attendant l&rsquo;armateur et ses assureurs.&nbsp;</p>

<p><em>&laquo;Les premiers soins doivent être administrés par les autorités locales et celles-ci peuvent aussi mobiliser toutes les ressources qu&rsquo;elles souhaitent pour se protéger. Par la suite, les sauveteurs dépêchés par les assureurs prennent le relais.&raquo;</em></p>

 

 

 

«L’express» et «Top FM» interdits à la CP du PM

Un de nos journalistes, accompagné d’un photographe, a été expulsé, hier, de la réunion du National Crisis Committee. Un policier les a tous deux interpellés pour leur demander de sortir. Ken Arian, Senior Advisor du PM, leur aurait fait comprendre qu’ils n’étaient pas invités, sauf qu’une invitation avait bien été envoyée en ce sens à la presse. Ce que le journaliste lui a montré, en vain. Les envoyés de l’express ont par la suite attendu plusieurs heures dehors pour finalement aussi se voir interdire l’accès au point de presse du PM. «L’express, Top FM pa rantré», leur-t-on lancé.

 

 

Les membres d’équipage ne sont plus en quarantaine

<p>Deux semaines après l&rsquo;échouement du vraquier à Pointe-d&rsquo;Esny, les vingt membres d&rsquo;équipage, dont le capitaine indien, ont pu quitter le centre de quarantaine d&rsquo;Ambre. Une partie a eu le feu vert samedi alors que le reste de l&rsquo;équipage est sorti hier après avoir effectué des tests de dépistage au Covid-19. Ils sont actuellement hébergés à l&rsquo;hôtel <em>Le St-Georges</em>, à Port-Louis, comme c&rsquo;était le cas pour les membres d&rsquo;équipage du MV Benita, il y a quatre ans.&nbsp;</p>

<p>Ils sont sous stricte surveillance policière. Il était prévu que des enquêteurs de la police fassent une descente à bord du vraquier en compagnie du capitaine hier. Après la saisie des documents et de la boîte noire, les enquêteurs procéderont à l&rsquo;interrogatoire de l&rsquo;Indien ainsi que des autres membres d&rsquo;équipage.</p>

 

 

 

 

Presse internationale : Maurice au centre de l’attention

<p>Les médias du monde entier diffusent désormais les images du naufrage du Wakashio, évoquant une future catastrophe écologique. Le Japon a réagi hier face à la marée noire au large de la côte sud-est. Plusieurs médias nippons ont relayé l&rsquo;information indiquant que le gouvernement japonais va envoyer une équipe aujourd&rsquo;hui vers Maurice pour prêter main-forte à cet arsenal tous azimuts déjà en place. En effet, les deux compagnies qui détiennent le vraquier ont présenté leurs excuses pour les dégâts causés. La <em>BBC, DeutscheWell</em> and <em>Al Jazeera </em>ont, pour leur part, relayé les informations de <em>Reuters, AFP</em> et <em>AP</em> au sujet de l&rsquo;envoi d&rsquo;une équipe d&rsquo;experts japonais à Maurice. La conférence de presse et la courbette des dirigeants de la compagnie maritime ont aussi été retransmises. Toutefois, ce sont les images des dégâts prises par les drones, celles des zones sinistrées et aussi l&rsquo;opération pour la confection des bouées artisanales par les citoyens qui ont attiré l&rsquo;attention des médias internationaux.&nbsp;</p>

<p>Au journal de 13 heures de <em>TF1</em>, des images des zones affectées et l&rsquo;envoi du matériel par la France via l&rsquo;île de la Réunion ont été retransmises.</p>

 

 

L’opérateur japonais du Wakashio s’excuse

<p><em>&laquo;Nous nous excusons profondément pour les gros ennuis que nous avons causés</em>&raquo;, a déclaré Akihiko Ono, viceprésident exécutif de <em>Mitsui OSK Lines</em>, l&rsquo;opérateur japonais du vraquier <em>Wakashio</em>, lors d&rsquo;une conférence à Tokyo, samedi. Les propos ont été rapportés par le <em>NewYork Times </em>et <em>Reuters.</em></p>

<p>Il a ajouté que la société<em> &laquo;fera tout ce qui est en son pouvoir pour résoudre le problème&raquo;.</em></p>

 

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