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Surprescription de médicaments: un contrôle est-il nécessaire?
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Surprescription de médicaments: un contrôle est-il nécessaire?

Si l’automédication affiche une forte prévalence à Maurice, celle des ordonnances pèse aussi lourd dans la balance. En particulier, sur le budget des personnes âgées, constate Mosadeq Sahebdin, président de la Consumer Advocacy Platform. Il s’inquiète d’une «tendance à la surprescription de médicaments» aux patients âgés, plus particulièrement. «Une enquête auprès d’une vingtaine de pharmacies a révélé que plus de la moitié des prescriptions contiennent des médicaments et compléments alimentaires dont le patient n’aurait pas besoin immédiatement.»
Selon lui, plus de 50 % des ordonnances concernent les séniors. À titre d’exemple, il cite une octogénaire à qui ont été prescrits pas moins de neuf médicaments pour des courbatures liées à une grippe. Parallèlement, une autre patiente s’est vu prescrire huit médicaments pour un mal de tête qui lui a fait perdre l’équilibre. «Un examen de ces ordonnances indique la présence de médicaments inutiles. Des pharmaciens interrogés confirment avoir noté des cas de surprescription», poursuit-il. Est-ce une situation généralisée ? Armoogum Parsuramen, président et fondateur de la Global Rainbow Foundation, s’interroge. «Je ne suis pas en présence de tels cas rapportés. Si cela s’avère, ce serait grave. À la fondation, nous avons trois médecins qui travaillent avec nous. C’est très structuré. Il faut tout faire pour les aider à vieillir en bonne santé», explique-t-il.
Normalement à Maurice, poursuit le Dr Yasheel Aukhojee, directeur de Médecin à domicile, un praticien prescrit uniquement des médicaments en fonction des symptômes du patient. «On ne va pas prescrire pour rien. Les médicaments s’alignent sur les conditions de santé du malade. Mais, dans certains cas, on a remarqué une surprescription d’antibiotiques pour des maladies virales alors que ces produits n’étaient pas nécessaires», déclare-t-il.
Il observe une surprescription médicale effective en Europe, en Inde et dans d’autres pays où le système préconise une connexion entre pharmaciens et médecins. «Là, ils pratiquent plutôt du commerce et ne traitent pas les patients comme il faut. On voit cela notamment si ces derniers sont assurés et souffrent de maladies chroniques. Ce risque d’abus génère des questions sur la santé dans le monde, en général», critique-t-il. Pour Arshad Saroar, pharmacien, tout médecin se doit de ne pas prescrire trop de médicaments. «D’un point de vue général, les prescriptions viennent des cardiologues pour les personnes âgées, à raison de trois à quatre médicaments pour le cœur et la clarification du sang. Ce même nombre s’applique pour les pédiatres», confie-t-il.
Éduquer le patient
Pour Ramesh Purrunsingh, porte-parole et animateur du Comité amélioration de la santé (CAS), il incombe, en auscultant les patients, surtout les plus âgés, d’analyser leur résistance. «Il faut savoir quels médicaments leur prescrire et leur métabolisme s’y adaptera. Il y a aussi des aliments nourrissants qui pourraient être utilisés», indique-t-il.
Comment contrôler une telle pratique ? En France comme dans d’autres pays européens, les firmes pharmaceutiques font pression pour être autorisées à informer directement les patients, y compris sur des médicaments soumis à prescription, souligne Mosadeq Sahebdin. Suivant une enquête de Health Action International Europe (HAI), toutes les associations de patients financées par des firmes pharmaceutiques qui y participaient plaident en faveur d’une législation permettant à ces opérateurs de diffuser des informations sur les médicaments, précise-t-il.
Et à Maurice ? «Les proches sont souvent dans l’incapacité de conseiller aux personnes âgées de ne pas acheter tout ce qui est prescrit», soutient-il.
De son côté, Yasheel Aukhojee affirme que le groupe de médecins à domicile se doit d’expliquer aux malades l’importance de chaque médicament prescrit ainsi que ses effets. «Il faut éduquer le patient qui devient aujourd’hui très averti avec l’Internet. De plus, les hôpitaux ont commencé à répertorier ce suivi sur ordinateur pour les pharmaciens, médecins, etc.» ajoute-t-il.
Ramesh Purrunsingh est d’avis que les pharmaciens devraient pouvoir discuter avec les médecins sur l’ordonnance et les raisons y relatives. «Cela devrait s’appliquer aussi aux prescriptions pour les enfants. Les autorités pourraient instituer un comité pour les secteurs public et privé», estime-t-il. Le président de la Global Rainbow Foundation appelle à l’auto-responsabilisation de chacun. «Au moindre abus, c’est le devoir de tout individu de protester et de dénoncer cela», soutient-il.
Pour Arshad Saroar, un contrôle peut être difficilement exercé dans la mesure où c’est le médecin qui émet la prescription. «C’est dans la loi. Le prescripteur vous donne comme un ordre. Le pharmacien ne peut pas, de son propre chef, prendre un produit des rayons et le dispenser au patient. Il est obligé d’appliquer la prescription du médecin.»
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