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Natation | En marge des Jeux de la CJSOI: l’Etat doit-il venir en aide aux clubs ?

21 janvier 2022, 12:04

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Natation | En marge des Jeux de la CJSOI: l’Etat doit-il venir en aide aux clubs ?

Covid ou pas, les Jeux de la Commission de la Jeunesse et des Sports de l’Océan Indien (CJSOI, du 4 au 11 décembre 2022) se tiendront cette année à Maurice. Quatorze nageurs mauriciens y prendront part. Mais à ce jour, on peut se demander si les 25 athlètes (12 filles, 13 garçons) présélectionnés pour la CJSOI recevront un encadrement idéal pour se préparer durant cette période de restrictions sanitaires. Nous avons demandé à quelques membres du CAMO - dont le tiers des nageurs a été présélectionné pour cet événement – ce qu’ils en pensaient. Sans hésitation, ils affirment que tous les clubs qui aident actuellement à promouvoir la natation mauricienne – sans l’aide d’un DTN ou entraîneur national – devraient être grandement soutenus par l’Etat. 

Le soutien de l’Etat peut être vu à deux niveaux. Tout d’abord au niveau de l’autorisation de faire nager plus d’athlètes dans les piscines. Puis, à celui d’un soutien financier apporté aux clubs chargés de préparer des athlètes compétitifs. En ce qui concerne le nombre de nageurs dans les couloirs, il est évident que l’Etat, à travers le Mauritius Sports Council (MSC), devrait redoubler d’efforts pour que la situation s’améliore. En coulisse, il est dit que le MSC augmentera le nombre de nageurs par couloir (Ndlr : plus de 4 nageurs par couloir dans les piscines de 25 m et plus de 5 dans les bassins de 50 m). Est-ce que cela sera suffisant pour que les nageurs présélectionnés pour la CJSOI ? Cela est une autre histoire. Mais en attendant, les nageurs ne sont pas dans les conditions idéales pour progresser. « Depuis deux ans, nous slalomons entre toutes les mesures restrictives qui nous sont imposées par la MSC. C’est donc du « on and off » périodique, qui n’est pas l’idéal pour faire évoluer un athlète mais auxquelles nous essayons de trouver la meilleure réponse possible » fait savoir Philippe Pascal, head coach du CAMO. Est-il possible de ‘fabriquer’ un athlète performant pour la CJSOI d'ici décembre ? Dans la mesure du possible, tout reste possible. Mais pour Philippe Pascal, un athlète n’est pas une machine sans âme.  « Il se donnera les moyens d’être performant si les enjeux lui font envies. La motivation est la clé de la performance ; sans elle, un athlète n’exprimera pas tout son potentiel. De ce fait, la grande difficulté actuelle c’est que, depuis les derniers JIOI, nos jeunes sont dans un contexte totalement démotivant. Les dommages collatéraux des différentes mesures imposées dans le cadre de la covid-19 sont inestimables pour le futur » poursuit-il. Par ailleurs, Eric Tin, vice-président du club, est d’avis que les jeunes sont en manque de repères et que les entraînements seuls ne mettent pas les nageurs dans les meilleures dispositions pour la CJSOI. « Entre maintenant et décembre, il faudrait avoir d’autres compétitions. Il faut des repères aux nageurs sinon ils s’entraîneront dans le vide » dit-il.

Elites du CAMO lors d'un entraînement.

Dans un autre ordre d’idées, les mesures restrictives, bien que justifiées par un impératif de santé publique, ont affaibli les clubs, dont le CAMO. Or, le Ministère de l’Autonomisation de la Jeunesse, des sports et des loisirs (MAJSL) a fait récemment savoir aux responsables de la natation mauricienne qu’il recherchait des nageurs potentiellement ‘médaillables’ pour la CJSOI. Il est dans son droit de le demander. Mais fournira-t-il des moyens aux clubs pour atteindre cet objectif ? En l’absence de DTN ou d’entraîneur national, ce sont les clubs, par le biais de leurs entraîneurs, qui préparent nos champions. Or, durant cette période difficile, des clubs encourent des frais importants en louant des couloirs à des piscines privées. Et ce, pour permettre à plus de nageurs de s’entraîner, faute de place dans les couloirs du MSC, restrictions sanitaires oblige.  Il se trouve que les clubs n’opérèrent, en grande partie, que grâce au soutien financier des parents d’athlètes. Pour le moment, le CAMO tient le coup. Mais il appréhende que les choses empirent si rien n’est fait, selon Patrick Yene Teck, président du club de Beau Bassin. Aussi, l’idée que l’Etat aide financièrement les clubs n’est pas saugrenue. Si L’Etat veut des résultats, il faut – selon le CAMO - qu’il vienne soutenir les clubs. Ce sont eux qui encadrent les athlètes qui représenteront Maurice. Or, ces clubs sont au bord de l’étranglement actuellement. « C’est l’Etat qui doit venir en aide aux clubs. Les coachs seront dédiés à nos élites par rapport, entre autres, aux Jeux de la CJSOI. Mais nous sommes aussi redevables envers les parents. Actuellement, tout se fait à leurs frais. Ce sont eux qui contribuent dans les clubs, pour encadrer les futurs médaillés. C’est pourquoi nous aurons aussi à étoffer l’équipe des coachs pour pouvoir ménager les autres nageurs. C’est pourquoi, l’aide de l’Etat aux clubs permettrait de soulager ces derniers » déclare Eric Tin.

La situation est urgente. Comme l’ont fait ressortir d’autres membres du CAMO, la tendance est que les parents préfèrent diriger leurs enfants vers les études plutôt que la natation. « Les parents sont plus aptes de demander à leurs enfants de rattraper leur retard sur le plan académique que sportif. Pour eux, les choses ne s’arrangeant pas, le sport devient de moins en moins une priorité » rapporte Josian L’Arrogant. Il appartiendra très certainement à la Fédération Mauricienne de Natation et le MAJSL – eux seuls, puisque l’Etat ne deviendrait ainsi qu’un facilitateur – de trouver une solution voire plusieurs pour sortir de ce qui ressemble de plus en plus à une impasse.

Ce qu’implique la perte d’une semaine d’entraînement

Mathieu Marquet, nageur du CAMO est un athlète ayant représenté Maurice à multiples compétitions internationales dont  les derniers jeux olympiques au Japon en 2021.  En tant que sportif mauricien de haut niveau, il est à même de dire ce que représente la perte d’une semaine d’entraînement. « Pour toute semaine perdue il faut 3 ou 4 semaines pour retrouver le niveau à l’entraînement. Et pour deux mois de perdus, il faut une année de travail pour retrouver son meilleur niveau. Si on y arrive … » précise Mathieu Marquet.

C’est pour cela que Patrick Kok Shun, membre du CAMO, craint que la natation mauricienne ne cessera de régresser si des décisions ne sont pas prises en haut lieu. Les tranches d’âge de 9 à 11 ans sont les plus affectées aujourd’hui. « Il y aura un vide de 2 à 3 ans. A ce jour, les 16-18 ans peuvent évoluer. Mais les 9-11 ans n’auront pas le niveau actuel de leurs aînés quand eux atteindront l’âge de 16 ans. Il faut s’attendre à ce qu’il n’y ait plus d’excellence pendant une certaine période » affirme Eric Tin.

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