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Benoît Lebon: «Le préservatif est plus tendance pour les jeunes que la fidélité»
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Benoît Lebon: «Le préservatif est plus tendance pour les jeunes que la fidélité»

Benoît Lebon de l’ONG Youth Alive, qui existe depuis 2005 et chargée d’éduquer les jeunes à prendre des décisions responsables pour combattre le sida, revient sur les valeurs qui animent son combat, en passant par ses accomplissements, ses difficultés et ses projets pour les années à venir.
Parlez-nous du mouvement Youth Alive?
Youth Alive est un mouvement en provenance d’Afrique du Sud. Il a débarqué en 2004 à Maurice et a été reconnu comme une ONG en 2005. Son objectif est de lutter contre le sida chez les jeunes. C’est un mouvement de jeunes qui éduque les autres jeunes à avoir un comportement sain par rapport à ce fléau. Et bien évidemment, on ne pourra pas le faire sans parler de la sexualité, de l’alcool et de la drogue avec eux.
Quelle est la philosophie derrière Youth Alive?
Nous voulons former les jeunes pour qu’ils forment d’autres jeunes à leur tour, là où ils se trouvent. C’est un peu comme combattre le feu par le feu. Ici, c’est combattre le sida auprès des jeunes par les jeunes eux-mêmes. Nous leur proposons notre A-B-C-D de la prévention. Le A-c’est l’abstinence. Le B-c’est la fidélité, Be faithful. Le C-c’est le condom (préservatif) mais nous le considérons pour Character Building, c’est-à-dire, se forger un caractère pour refuser de suivre le courant. C-c’est aussi changer, comme changer des choses dans ma vie en me disant que j’ai la capacité de changer et si je ne peux pas le faire, je peux me faire aider en faisant appel aux autres comme choisir mes amis, retrouver la spiritualité qui prône des valeurs universelles surtout vis-à-vis de l’autre. Et le D-veut dire, Drug Free ou Don’t Discriminate, c’est-à-dire, ne pas juger.
Comment faites-vous pour toucher les jeunes?
A travers un programme qui a fait ses preuves sur le continent africain, un programme utilisé dans une vingtaine de pays et qui s’appelle le programme d’éducation à la vie. C’est un séminaire de six jours sur le changement de comportement. L’objectif de ce programme résidentiel, c’est de faire passer l’information et d’aider les jeunes à traduire cette information concrètement sur le terrain. Nous les sensibilisons sur les comportements à risques et les comportements qui peuvent nous protéger. Mais ce programme ne s’arrête pas qu’à ce séminaire. Il y a également l’accompagnement après la session. Cet accompagnement prend deux formes. La première, c’est l’organisation des activités après 2-3 mois. Nous appelons cela des Recalls. La deuxième forme d’accompagnement, ce sont les clubs en régions. Les anciens qui ont suivi la session se soutiennent mutuellement à travers ces clubs. Ils le font pour les aider à mettre en pratique un nouveau mode de vie. Par exemple, vivre l’abstinence, vivre sans drogue, sans alcool demande beaucoup de courage. Nous avons organisé, tout récemment, des soirées sans alcool pour jeunes. Ces soirées ont bien marché.
Arrivez-vous à mesurer les retombées de votre travail auprès de ces jeunes?
Nous avons touché jusqu’à maintenant que 520 jeunes de 14 ans à monter. Nous avons eu des parents qui sont venus suivre des sessions et également des familles toutes entières. Après 5 ans d’existence, nous pouvons dire que nous commençons à voir les fruits de nos efforts à travers les témoignages et à travers les activités organisées. Par exemple, le week-end du 12 au 13 décembre, 182 adolescents du club de la région de l’ouest ont organisé un programme de porte à porte pour que les jeunes, ayant reçu une formation au sein de Youth Alive, puisse partager leurs connaissances sur le sida. L’organisation et la participation à ce genre d’activités sont des signes qui ne trompent pas.
Quel bilan faites-vous de l’année écoulée?
Cette année, nous avons organisé trois séminaires avec des groupes de 60 personnes environ. Dans les régions, en clubs plus précisément, dans ceux de l’est et du centre, il y eu la célébration du Candlelight Memorial, un événement pour faire mémoire des gens qui meurent du sida et dénoncer la discrimination envers les personnes atteintes du virus. Cette dernière cause a suscité l’engouement des jeunes.
Et pour l’année prochaine que prévoyez-vous?
Nous allons continuer la formation auprès des jeunes à travers les séminaires. Nous voulons également renforcer les clubs en région. Une levée de fonds est prévue car nous manquons actuellement de ressources. La formation d’un jeune coûte actuellement Rs 1 300, je ne vous parle pas de la formation des animateurs qui coûte beaucoup plus chère.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez à faire face?
Outre le problème financier, l’encadrement des jeunes par des personnes qualifiées est un de nos soucis majeurs. Pour le moment, nous appelons que des volontaires et nous en manquons dans les régions pour l’accompagnement de ces jeunes. Nous manquons donc de personnes ayant une certaine compétence en accompagnement et en développement de projets. Les idées ne manquent pas mais il nous faut trouver des gens capables pour les réaliser. Je pense à une campagne dans les collèges. Pour le moment, nous ne pouvons pas l’envisager à cause de ce problème de ressources humaines. Et il y a de quoi faire. Notre message est clair, il suffit de présenter les comportements qui me protège du sida et quels sont les comportements qui m’exposent à ce fléau. Il y a le problème de la sexualité: connaître mon corps et celui de l’autre est important dans une relation saine. Le physique, de même que l’affectivité…autant de sujets où les jeunes attendent une parole.
Toucher le plus grand nombre de jeunes n’est pas une mince affaire, quelle est votre stratégie?
Parler le même langage qu’eux. Proposer aux jeunes un nouveau mode de vie relève de la psychologie collective. Nous ne pouvons pas leur parler uniquement d’abstinence et de fidélité. Le préservatif est plus tendance. Et proposer uniquement le préservatif, c’est aller dans le sens du poil et se révèle comme la solution la plus facile. Il faut oser tout dire pour permettre aux jeunes de faire un choix. Tout dire, c’est évoquer les difficultés et les joies de vivre l’abstinence et la fidélité, mais c’est également leur parler de la responsabilité de chacun de leurs actes, surtout dans le domaine de la sexualité. Les jeunes attendent cela. Et notre but, c’est de les former à faire un choix et non pas choisir à leur place. Voilà pourquoi, il nous faut tout leur dire. L’abstinence, la fidélité, le préservatif et le respect de l’autre doit venir d’un choix libre du jeune. C’est tout cela combattre le sida. Il vaut mieux prévenir que guérir.
 
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