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Christian Lefèvre :« Un obsédé de la qualité »

5 avril 2014, 20:35

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Christian Lefèvre :« Un obsédé de la qualité »

Christian Lefèvre, directeur général du réceptif «Coquille Bonheur», vient d’être nommé à la tête de la Tourism Authority (TA),organisme qu’il connaît bien car il a fait partie du comité d’élaboration de cette structure.

 

Il se reconnaît deux défauts : «une impatience à apporter des changements» et «une obsession pour la qualité». Et le parcours de ce professionnel de 53 ans, qui a voué sa vie au tourisme, en témoigne.

 

Enfant de Terre-Rouge, c’est à Eden de Rose-Hill qu’il fait ses études secondaires et choisit la comptabilité. Dès la fin des classes, il prend de l’emploi dans l’hôtellerie, plus précisément dans le département de comptabilité de «l’Auberge Isle de France», hôtel d’IBL à Grand-Baie où il travaillera pendant cinq ans. Entre-temps, il décroche son diplôme de l’Association of Accounting Technicians.

 

Muté au département de comptabilité d’Avis, compagnie de location de voitures, il y reste deux ans avant d’être transféré chez British Airways (BA). Lorsque la direction de la BA l’envoie à Londres en formation, il découvre le marketing et la gestion. Et en 1988, dépêché aux Comores où IBL a ouvert un réceptif, Christian Lefèvre espère pouvoir approfondir ses nouvelles connaissances.

 

L’occasion lui est offerte à l’expiration du contrat de Jean Adolphe, le General Manager. C’est lui que l’on nomme comme successeur. Le contexte est particulier car la situation politique est difficile. Loin de le rebuter, l’idée l’attire. «La comptabilité est un domaine où il faut garder la tête froide et les pieds sur terre. Dans le tourisme, il faut se remettre en question tout le temps et être inventif. Dès cette époque, j’ai compris que pour gagner, il fallait soigner la qualité du service.»

 

À peine rentré, ce père de quatre enfants aujourd’hui adultes, est envoyé au Zimbabwe pour démarrer des opérations de réceptif et négocier l’acquisition de cinq « lodges». Peu de temps après, c’est aux Seychelles qu’il est muté pour gérer  Services Seychelles, agir comme le General Sales Agent d’Air Mauritius et d’Air France et superviser la gestion des hôtels Desroches et Alphonse. Il rentre en l’an 2000 à Maurice où il travaille sous la direction de Didier Giraud. Il s’investit corps et âme dans le tourisme qui devient pour lui «un sacerdoce».

 

 

Didier Giraud meurt subitement en 2001. Pour Christian Lefèvre, c’est un choc, auquel vient s’ajouter une volonté de désengagement d’IBL de ses investissements africains. Avec Peter Goldsmith, son ancien mentor, sir René Seeyave et Éric Dalais, ils décident de racheter la division Tourisme d’IBL. La nouvelle société est nommée Destination Management Ltd. «C’était une opportunité. Je venais de décrocher un MBA et je savais que j’avais les compétences et la capacité de relever ce défi. Et puis, c’était mon rêve d’enfant d’être mon propre patron.»

 

 

Si au départ, les partenaires s’entendent, au bout de trois ans, ils ne partagent plus la même vision. «White Sand Tours accueillait plus de 100 000 touristes l’an. Moi, je voulais revoir le concept, la façon de travailler pour être plus armé pour le futur, focaliser davantage sur la qualité que la quantité. L’avenir m’a donné raison.» Il prend alors la décision de vendre ses parts. Neuf mois plus tard, il lance sa propre société, Coquille Bonheur, en souvenir du coquillage offert par Didier Giraud quelques jours avant sa disparition. On est alors en 2007.

 

Avec Coquille Bonheur, il peut continuer à miser sur le haut de gamme. «Ce qui ne veut pas dire cher. Les touristes ne sont pas tous riches. Certains économisent sou pour sou pour venir en vacances avec leur famille et il faut les traiter comme des VIP. Ce n’est pas en brassant du volume qu’on va donner de la qualité. On ne peut desservir à la fois le tourisme de masse et le tourisme haut de gamme».

 

En sept ans, Coquille Bonheur passe de quatre à 55 employés. Avec une flotte d’une vingtaine de voitures de luxe et deux minibus, il brasse un chiffre d’affaires de 1,5 million de dollars l’an. Pour se différencier de ses concurrents, il met l’accent sur d’autres aspects de l’accueil. «Tous les réceptifs entraînent leurs touristes au Jardin de Pamplemousses après la visite de Port-Louis. Chez nous, les déplacements s’articulent autour de la légende de Paul et Virginie. Nous ne faisons pas du copier-coller».

 

Quel regard porte-t-il sur l’industrie du tourisme en 2014 ? La croissance de 2,7% dans les arrivées est honorable, mais le manque à gagner de Rs 4 milliards inacceptable. Il l’attribue en partie à la pratique du All- Inclusive «qui fait non seulement baisser la catégorie mais aussi du mal à l’économie indirecte car les touristes ne font plus travailler les taxis et les restaurateurs. La Turquie, la Jamaïque et les Caraïbes ont fait la même erreur et en paient le prix. Ce qu’il faut, c’est un All-Inclusive de qualité comme le Club Med ou le Shandrani. Les touristes parlent aussi d’une dégradation de l’environnement, et je crois que cela a aussi un impact sur les revenus».

 

La Tourism Authority, c’est un sujet que ChristianLefèvre connaît. En 2002,Nando Bodha, alors ministredu Tourisme, fait appel à luipour participer à sa miseen place. Lorsque, 12 ans plus tard, Michael Sik Yuen,ministre du Tourisme, luipropose de diriger le conseil d’administration, il n’hésitepas. «Michael Sik Yuen n’est pas mon ami. Je le respecte et j’ai beaucoup d’estime pour lui. Mais avec moi, il n’y a pas de copinage. Je pense avoir été nommé pour mon professionnalisme. Sur beaucoup de conseils d’administration à Maurice, il manque justement des professionnels.» Mais avec les électionsgénérales dans un anet demi, le nominé qu’il est pourrait voir ses projets êtrecompromis. «Si l’on me remercie, je n’aurai aucune inquiétude. J’ai un métier…»

 


 

 

SES PROJETS

Christian Lefèvre veut revoir la catégorisation des hôtels. Pour cela, il fera appel à des sociétés internationales. «Je suis inflexible dessus : la MTPA doit se concentrer sur la promotion et la TA doit offrir des produits aux normes acceptables internationalement. » Il veut aussi se concentrer sur les techniciens qui effectuent des vérifications et octroient des permis. «Ils doivent être bien équipés et formés.» Il prône «un partenariat pluriel et fécond entre tous les acteurs en faveur d’un tourisme de communauté, équitable et durable dans le temps». Une semaine après sa nomination, il a déjà exprimé ses vues à son ministre, au directeur de la TA et au Principal Assistant Secretary du ministère.

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