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Comra Singaravelloo et Hemraz Bessondyal - «diehards» du Parti travailliste: Irréductibles mais pas aveugles
22 février 2014, 10:42
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Comra Singaravelloo et Hemraz Bessondyal - «diehards» du Parti travailliste: Irréductibles mais pas aveugles

Demain, le Parti travailliste aura 78 ans. Un anniversaire marqué uniquement par un dépôt de gerbes. Canagasaby Singaravelloo dit «Comra» et Hemraz Bessondyal, deux irréductibles rouges, qui ont connu les grands tribuns disparus, évoquent leur passion politique. Sans aveuglement.
Contrairement à Hemraz Bessondyal dont seulement les coussins d’ameublement du salon sont rouges, Comra Singaravelloo affiche ses couleurs. Un pan du mur de son salon est recouvert de photos où l’on peut voir son leader, Navin Ramgoolam, en sa compagnie. Bizarrement dans le lot, il n’y a aucune photo de Ramgoolam père qu’il a pourtant côtoyé pendant des décennies. Sa femme Neelambigay réplique que les photos de Comra en compagnie de sir Seewoosagur Ramgoolam (SSR) sont dans un album. Et au septuagénaire de nous fourrer une grande enveloppe en papier kraft sous le nez dans laquelle se trouvent des photocopies de photos noir et blanc du «Bolom» et de ses proches.
Dans un langage parfois vert, Comra Singaravelloo, Portlouisien de souche, raconte qu’il connaît SSR depuis qu’il a dix ans. Un jour que sa mère est souffrante, son père, qui travaille au marché central, fait appeler le Dr Ramgoolam qui réussit à soigner sa mère. Depuis, l’homme voue une admiration sans bornes à SSR.
Comra Singaravelloo revoit le «Bolom» deux ans plus tard lors de la campagne municipale de 1953. Son père est déjà acquis à la cause de SSR et répète à qui veut l’entendre que «si enn zour bizin vot kont SSR ek Renganaden Seeneevassen, li prefer koup so de pwagne». Comra Singaravelloo qui est obligé d’abandonner le collège Bhujoharry après la Form II parce que son papa «ti pe fer impe move ar maman» et qu’il doit travailler pour aider à nourrir les enfants, est inséparable de son beau-frère, Gaston Mareemootoo, chef agent de SSR.
Lors des municipales, le jeune Comra s’amuse à courir derrière la voiture à bord de laquelle voyage son beaufrère. Ce dernier le présente aux grands tribuns que sont Guy Forget, Eddy Changkye, Harold Walter, entre autres, et Comra Singaravelloo devient lui aussi agent.
Lors de la victoire du PTr aux municipales de 1956, il est déjà bien rodé et figure dans l’équipe d’agents de SSR qui devient maire. SSR n’hésite pas à faire monter ses agents en voiture après la tenue du conseil. «Li dir nou : rantre zenfan, sa loto la pou zot, pa pou moi sa e li al kit nou nou lakaz.»
À chaque retour de SSR de Londres, Comra Singaravelloo est de ceux qui vont l’accueillir à l’aéroport. Le PTr milite alors pour l’indépendance tandis que le Parti mauricien social-démocrate (PMSD) est pour l’intégration au Royaume-Uni. C’est justement parce que le PTr est «la voix des sans voix» et pour que «Maurice devienne un État souverain capable de prendre ses propres décisions», qu’Hemraz Bessondyal, 70 ans aujourd’hui, habitant la route Bassin, à Quatre-Bornes, s’intéresse de près à la politique.
Il a à l’époque 24 ans et est pharmacien. Il décide de devenir agent à ses heures perdues et se jette corps et âme dans la campagne de 1965. C’est aussi le cas de Comra Singaravelloo.
Ces deux agents parlent de la campagne électorale pour l’indépendance comme la plus terrible qu’ils aient jamais vécue. Alors qu’Hemraz Bessondyal est dans une voiture avec trois autres personnes et qu’ils reviennent du Sud, ils tombent sur un défilé de voitures du PMSD à Rivière-Noire. «Noun bizin sorti dan loto ek noun al koz-koze amba pie pou pa gayn problem. Traditionnelman bann Travailliste dans kôté non violans e nou pa ti le cede a la provokation. Ti ena boukou tansion pandan sa campayn là.» Comra Singaravelloo sillonne Flacq et se trouve un soir à Trou-d’Eau-Douce avec d’autres agents. À un moment, leur voiture est encerclée par des voitures d’agents du PMSD armés de sabres et de gourdins. «Noun resi vire, demare ek rant dan lacour enn dimounn. Nounn rant dan lakaz ek nou teiyn lalumier. Enn tigit nou manke mor ! Move kalite bandi zot ti ete sa lepok la dan PMSD».
Il se souvient aussi d’un 1er mai 1967, quand il se met à injurier Jacques Ribet, le commissaire de police d’alors qui a autorisé le PMSD à tenir un meeting au Champ-de-Mars alors que le PTr anime un meeting à Plaine-Verte. Les partisans des deux partis finissent par s’affronter.
À la rue Desforges, le commissaire Ribet demande l’autorisation à SSR d’utiliser son téléphone pour appeler des renforts. Ce dernier l’autorise à le faire et laisse son agent continuer à insulter le chef de la police. Jacques Ribet s’en plaint. «Bolom inn get li : ki ou gayne ar sa garson la ? Pa zoure ki li bizin donn ou, kout pie dan ou f… ! Se premier fois ki monn truv Bolom enkolère».
Les deux agents rouges sont évidemment aux premières loges au Champ-de-Mars le 12 mars 1968. «Sa viktwar la ti ena enn but : l’indépendance. Letan monn truv sa pavillon mauricien la monte ek tann sa l’hymne national la, monn senti enn fierté d’être Mauricien, pa pou deloz bann Anglais me pou nou aprann diriz diferan départments nou pei. Sa l’emosyon ti intans, indeskriptib», raconte Hemraz Besoondyal.
Si Comra Singaravelloo se contente d’être agent toute sa vie, Hemraz Bessondyal veut faire de la politique active et prétend à un ticket aux municipales de 1969. Or, il n’obtient malheuresement rien.
À partir de là, il a des rencontres régulières avec SSR qu’il décrit comme «jovial, à l’écoute. Ler ou dir li enn zafer, mem si li pa dakor sur le moment, li pou ekout ou, verifie l’information ek fer seki li bizin». Il dit avoir plaidé auprès de SSR la cause des laboureurs municipaux qui étaient des contractuels. «Kelk tan apre, zot inn vinn lor permanent and pensionable establishment ki ti existe sa lepok la ».
II reste conseiller jusqu’en 1972. En 1976, il s’attend à obtenir un ticket pour les élections générales surtout qu’il a travaillé le terrain pendant huit mois. Or, c’est un néophyte qui lui passe sur la tête. Sa déception est cuisante. Lui et Comra Singaravelloo savent exprimer leur mécontentement aux dirigeants rouges. Ami du militant mauve Devanand Rottoo, Hemraz Bessondyal accepte de poser sous la bannière du Mouvement militant mauricien pour les municipales de 1976. Il quitte ce parti trois mois plus tard sur une question de démilitarisation de l’océan Indien qui, estime-t-il, doit s’appliquer aussi bien aux navires américains que russes. Or à l’époque, le MMM ne veut pas d’antagonisme avec la Russie qui entretient des liens étroits avec les Seychelles, pays ami des militants.
Lorsque Comra Singaravelloo n’est pas content du choix d’un candidat, il se met en colère et fonce jusqu’au bureau de SSR. «Li pa les so sekreter ouver la porte. Limem li recevoir ou e sa manier li met so lamin lor ou zepol la, ou lacoler tom amplas ! »
Hormis ses trois mois d’incartades du PTr, Hemraz Bessondyal n’a jamais dévié de ses convictions.
Il cite l’indépendance et l’État providence comme les plus belles réalisations des Rouges. Pour lui, Navin Ramgoolam assure la continuité du travail accompli par son père. Pour Comra Singaravelloo, c’est le suffrage universel qui a été le plus grand cadeau du PTr. Aujourd’hui, il trouve que le «garçon Bolom» a surclassé le père. «Bolom la ti ena evvnn kote lizie me li ti malin ek li ti truv divan li. Garson la ena de kote lizie, li pli malin ki so papa e li truv ankor pli divan.»
Ces deux irréductibles souhaitent une alliance entre le PTr-PMSD et le MMM. Comra Singaravelloo pense qu’une telle alliance sera porteuse de stabilité pour le pays. Hemraz Bessondyal qui a été nommé président du National Trust Fund for Community Health en 1996 et qui a été le premier à faire les techniciens du Jaipur Foot Initiative venir réaliser 125 prothèses pour amputés mauriciens, considère que ces deux partis sont «nés pour défendre la cause des travailleurs». Reste à savoir si ce voeu de la base demeurera pieux…
«Bolom la ti ena en kote lizie me li ti malin ek li ti truv divan li.»
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