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Dev Ramano : «Les travailleurs serviront de chair à canon dans les projets des politiques»
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Dev Ramano : «Les travailleurs serviront de chair à canon dans les projets des politiques»

A quelques jours de la fête du travail, l’avocat, Dev Ramano, spécialiste des lois du travail et des relations industrielles, revient sur les sujets d’actualité ayant trait au monde du travail. Il aborde également la politique et jette un regard critique sur le monde syndical.
 
Pourquoi  les syndicats éprouvent des difficultés à réunir quelques milliers de personnes à l’occasion de la Fête de Travail ?
C’est principalement à cause de la manipulation de la population par les partis politiques traditionnels qui réussissent à attirer les gens grâce au pouvoir de l’agent. Il y a aussi les effets de la régulation du monde du travail et de la privatisation qui contribuent à la mobilisation au niveau de la masse. Il faut aussi prendre en compte la désillusion et la trahison des partis politiques qui ont incarné dans le passé l’engagement syndical.
Que doit faire le mouvement syndical dans cette situation ?
Le mouvement syndical a également besoin de repenser sa démocratie et de revoir son organisation. Mais ce qui manque vraiment c’est une troisième force politique crédible et efficace pour créer un vrai rapport de force, voire une nouvelle dynamique. Je persiste à dire que le rassemblement, chaque année, des travailleurs à Beau-Bassin est une initiative très louable et porteuse d’espoir. Mais ce n’est pas assez. Il faut que les animateurs des nombreuses organisations de gauche puissent mettre de côté leur ego afin de dégager une force de frappe efficace que ce soit en termes de quantité et que de qualité.
Comment avez-vous trouvé la campagne de mobilisation des partis politiques ?
Année après année les politiques continuent à highjack la Fête du Travail en la transformant en une vulgaire bataille des foules pour que chacun puisse se positionner en termes d’alliance et de quête du pouvoir. Ce sont les intérêts personnels et partisans qui priment sans aucun élément programmatique pour un changement sociétal.
Y a-t-il une différence entre la pratique de ces partis ?
Dans la forme, nous voyons des deux côtés la même politique avec des emballages différents. Les partis politiques n’ont aucune réponse face à la crise économique, écologique et sociale qui s’est déjà installée dans le pays. C’est triste que ce soit la classe vulnérable, la classe moyenne, bref les travailleurs qui paieront le prix fort des conséquences de la crise. Et les travailleurs serviront de chair à canon dans cette énième manipulation de la masse.
Le projet d’amendements aux deux lois du travail annoncé à quelques jours du 1er mai est-il un joli cadeau aux travailleurs ?
Sans détour, le projet d’amendement est  un leurre. Je prends par exemple la proposition d’instituer un tribunal pour statuer sur les licenciements abusifs. Elle ne contient aucun grand changement par rapport aux procédures actuelles. Surtout en ce qu’il s’agit des moyens mis à la disposition de l’employé de prouver que son licenciement est injustifié.
Expliquez-nous cela...
L’introduction des négociations via des comités d’entreprise est une stratégie bancale qui vise à tuer les syndicats. N’importe quel groupe de quelques travailleurs, manipulé par le patronat, pourra signer un accord collectif avec son employeur. Le rapport de force tourne alors en faveur de la puissante machinerie patronale. Il y a plusieurs exemples d’espace propice à la manipulation. Si au début, l’employé pouvait se retrouver avec des avantages, il sera livré au diktat des patrons une fois que les syndicats auront été totalement écartés.
Quelles sont les implications légales de la mainmise des partis politiques sur le transport en commun à l’occasion de la fête du travail ?
Il faut en premier saluer l’action des camarades menés par Jack Bizlall et Ashok Subron qui attirent l’attention sur cette aberration. C’est inacceptable que les bus désertent les lignes qu’ils desservent normalement pendant toute une journée. Le transport en commun est un service qui doit répondre aux attentes des usagers.
Et le rôle de la Compagnie Nationale de Transport (CNT) ?
L CNT a, plus que les autres compagnies d’autobus, une responsabilité importante dans le respect de cet engagement. Elle ne peut pas se contenter de l’aspect contractuel entre elle et le client. Et quid de l’intérêt public qui est inscrit dans la loi qui régit le fonctionnement de la CNT. Il faut tout faire pour qu’une action légale soit initiée.
Il serait peut-être même temps qu’il y a une commission d’enquête sur les tractations « meeting, bis piknik, briani » à travers lesquelles les politiciens soudoient l’électeur et instaurent une mentalité de « bater bis » au détriment des considérations plus nobles qui peuvent faire avancer la société.
Propos recueillis par Jean-Yves Chavrimootoo
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