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Didier Robert, Président de la Région Réunion : «La Réunion dispose d’une compétence reconnue»

18 octobre 2012, 07:36

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Les premières rencontres Maurice-Réunion du développement durable qui se poursuivent aujourd’hui permettent de constater l’intérêt d’un rapprochement des îles soeurs. Le Président de la Région Réunion, Didier Robert, dresse la listes des atouts réunionnais, conscient que Maurice a aussi à apporter à son île.

La Réunion est manifestement en avance en matière de développement durable. Quels sont les principaux domaines d’expertise de La Réunion ?

Nous avons développé une expertise complète sur cette question en travaillant dans le cadre de l’Eranet Biome avec l’ensemble des régions ultrapériphériques de l’Europe sur la question de la préservation et de la valorisation de notre biodiversité.

C’est un enjeu déterminant pour notre attractivité, particulièrement en matière de politique touristique. Notre deuxième domaine d’action stratégique développé, c’est d’agir et d’anticiper les impacts possibles du changement climatique. Dans cette perspective, la Région Réunion s’est fi xée des objectifs ambitieux en matière d’autonomie énergétique tant du point de vue de la consommation d’énergie électrique que de celui des déplacements, de l’urbanisme et des énergies renouvelables. En ce qui concerne l’autonomie énergétique, la Région Réunion oeuvre au développement de différentes filières d’énergie renouvelable, de l’éolien et du photovoltaïque en passant par des filières nouvelles comme l’énergie thermique des mers, l’énergie de la houle ou l’expérimentation de nouvelles technologies.

Les transports publics sont aussi une de nos préoccupations majeures avec la mise en place à La Réunion d’un Transport Public Réunionnais. Les premiers échanges avec les collectivités locales ont abouti à une vision partagée de ce que doit être le futur réseau Trans Eco Express et nous travaillons à l’émergence dans le paysage réunionnais de bus propres (hybrides, électriques, électrique et biogaz).

Le développement durable est donc l’un des points forts du resserrement des liens entre nos îles...

Après le tourisme et la promotion commune des «îles Vanille», une nouvelle coopération autour développement durable est devant nous. En ce domaine notre collaboration a d’ores et déjà pris des formes variées, qui toutes vont dans le sens d’une plus grande interpénétration de nos savoir faire.

Je pense notamment à l’initiative de l’Association pour le développement industriel de La Réunion (ADIR) qui engagé dans un projet de maîtrise de l’énergie avec l’Association of Mauritian Manufacturers, je pense aussi au partenariat de l’Agence française de développement et de l’Agence régionale de l’énergie Réunion (ARER) qui a permis la mise en place de l’observatoire mauricien de l’énergie, ou encore à l’implication du CIRAD dans la valorisation énergétique de la biomasse. Je veux souligner aussi le rôle moteur pour la réunion du Club Export. D’autres pistes restent à explorer. Cette attention que nous portons au développement durable est en effet une belle occasion d’enrichir nos relations. Sur le plan des énergies renouvelables, La Réunion dispose déjà d’une vraie expérience et d’une compétence reconnue. Qu’il s’agisse de l’hydraulique, du solaire, notre notoriété est déjà importante. C’est vrai si l’on retient l’exemple des fermes photovoltaïques : quatre des dix plus grandes fermes photovoltaïques de France sont opérationnelles à La Réunion, y compris la plus grande de 13,5 mégawatts... Sur tous ces sujets, La Réunion entend partager son expertise avec Maurice dans un esprit de réel partenariat et de réciprocité. Mais en ce domaine comme en bien d’autres, l’île Maurice dispose aussi de vrais atouts et d’une expertise que nous pouvons en définitive utilement mettre en commun.

L’expérience mauricienne qui peut profiter à La Réunion, c’est celle de l’ouverture, des marchés extérieurs...

En effet, l’exploration commune de marchés étrangers doit aussi devenir un des axes prioritaires de notre coopération future. Certains pays de la zone se développent à un rythme soutenu. C’est vrai pour la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud.

Nous savons aussi que les autorités de ces pays veulent trouver les voies nouvelles d’une croissance plus respectueuse de l’environnement. Nous devons profiter de cette montée en puissance des préoccupations environnementales dans la zone, nous devons tout faire pour que ces opportunités soient comprises par nos chefs d’entreprises. C’est en tout cas dans cette dynamique d’ouverture au Grand Océan Indien que je crois, pour le succès partagé de nos petites économies insulaires.

La gestion des déchets est, pour les petites îles en développement, un enjeu prioritaire. Il y a là aussi matière à coopérer...

Les déchets sont avant tout une ressource. Paradoxalement ce sont les pays les moins développés qui en ont le plus conscience puisqu’ils n’ont pas les moyens ni le luxe de «jeter». La problématique de nos deux îles est différente.

Nos sociétés ont connu une forte croissance démographique et économique qui nous a propulsés dans la société de consommation. Nous devons réapprendre à réutiliser, à recycler, à revaloriser les matières que nous nous contentons aujourd’hui d’enfouir. Il ne s’agit plus de se débarrasser de nos déchets mais de voir comment donner une nouvelle vie, à ces objets que nous considérons comme sans valeur. En réalité leur traitement constitue une source d’emploi pour nos populations. Dans ce domaine sans doute nos entreprises trouveraient avantage à collaborer plus étroitement et d’une manière plus équilibrée et cela dans un délai très rapproché.

Revenons sur l’expertise réunionnaise. L’un des succès c’est la diffusion des technologies d’énergies renouvelables dans les foyers...

L’une des expériences les plus concluantes a sans doute été le soutien à la filière du chauffe-eau solaire, outil exemplaire et efficient de la maîtrise de l’énergie à l’échelle individuelle, mais également de la baisse des factures d’électricité pour les familles. Notre choix politique est de porter dorénavant cet effort vers tous les Réunionnais, vers les ménages les plus modestes ou en situation de précarité. La Région est aujourd’hui engagée dans la construction d’un Pacte de solidarité écologique avec le chèque énergie, le projet Millener en partenariat avec Electricité de France ou encore le dispositif chauffe-eau solaire pour les foyers à faible revenu.

Il faut préciser que le développement des énergies renouvelables à l’échelle du ménage réunionnais a bénéficié des incitations fiscales et des réglements européens et métropolitains...

Ces interventions ont effectivement reçu le soutien financier de l’État français et de l’Union Européenne mais il n’en reste pas moins qu’il s’agit avant tout d’un engagement fort de la Région Réunion. Il est évident que les leviers fiscaux favorisent la diffusion et l’utilisation des technologies vertes. Et ce sont des dispositifs que nous devons conserver car les efforts que nous faisons aujourd’hui pour développer les énergies renouvelables porteront demain leurs fruits. Lorsque le prix du pétrole aura doublé, nous serons heureux d’avoir investi et anticipé pour éviter l’importation encore croissante du charbon et du pétrole

L’aménagement du territoire est une politique publique centrale dans toute approche durable du territoire, a fortiori insulaire. La Région Réunion dispose-t-elle d’une expertise à partager avec Maurice où l’aménagement du territoire fait défaut, notamment sur le point critique des transports ?

L’inscription de La Réunion au patrimoine mondial de l’Humanité, le Parc national, la Réserve nationale marine, les zones protégées, donnent une plus-value à notre pays et obligent à avoir une vision dynamique de l’urbanisme, de l’aménagement et du développement durables.

Ce sont des éléments que nous avons intégrés dans tous nos outils d’urbanisme tels que le Schéma d’aménagement régional (SAR), celui du Schéma régional des infrastructures de transports (SRIT) qui s’imposent aujourd’hui à tous à l’échelle de l’île. Le suivi du SAR et du SRIT qui sont des documents stratégiques est notamment assuré par l’Agence régionale pour l’observation de La Réunion, l’aménagement et l’Habitat (AGORAH).

La mission de cette structure est de répondre, au regard des évolutions démographiques, de la demande de mobilité et du besoin d’infrastructures urbaines, à ce besoin d’observation, de connaissance et d’expertise des évolutions urbaines du territoire réunionnais. Cette expertise, l’AGORAH est disposée à la mettre au service des pays de la zone en développant davantage la coopération régionale et la coopération inter-îles afin d’apporter à l’échelle de l’océan Indien une analyse sur l’aménagement, les risques naturels, le traitement et la valorisation des déchets ou la mobilité durable.

Propos recueillis par Gilles RIBOUËT

 

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