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Edley Maurer: «Il y a plus de 6 000 enfants de rues à Maurice»
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Edley Maurer: «Il y a plus de 6 000 enfants de rues à Maurice»

Le Service d''''accompagnement, de formation, d''intégration et de réhabilitation de l''Enfant (SAFIRE), ONG fondée en mai 2005, s’occupe des enfants de rues. Aujourd’hui, selon son porte-parole, l’Etat a démissionné devant ses responsabilités.
Vous parlez de 6 000 enfants de rues à Maurice. Comment êtes-vous arrivé ce chiffre?
Certes, Safire n’a pas fait une étude scientifique sur la question. Mais à travers les observations systématiques de nos éducateurs et en compilant les informations sur les fiches techniques que nous recueillons dans le cadre de notre travail, je peux affirmer qu’il y a plus de 6 000 enfants de rues à Maurice.
Justement, quelle est votre définition de l’enfant de rues?
Nous ne sommes pas en Inde ou à Madagascar et nous n’avons pas les mêmes critères. A Maurice, le critère principal, c’est que l’enfant de rues est celui qui n’est pas pris en charge par les institutions et traînent régulièrement les rues. Il y a les enfants qui se retrouvent sans prise en charge après les heures de classe et qui restent à l’extérieur jusqu’à la tombée de la nuit et ne rentrent chez eux que pour dormir. Soit, entre autres, ceux qui se sont retrouvés en dehors du système éducatif, beaucoup à la fin du cycle primaire. A ce premier groupe, viennent s’ajouter chaque année tous ceux qui sont éjectés du cycle secondaire. Ces enfants sont vulnérables et sont exposés quotidiennement aux discriminations qui rongent notre société. Ils développent une tendance aux mœurs faciles et un comportement antisocial.
A part le système éducatif qu’est-ce qui pousse les enfants à la rue?
Il y a d’abord la première institution qu’est la famille. On a les parents qui travaillent jusqu''à fort tard. Des parents qui ont d’autres priorités quand ils se réveillent le matin: alcool, drogue, pauvreté… Ou encore, ils reproduisent leur propre modèle familial. On se retrouve, par conséquent, avec un dysfonctionnement de la cellule familiale. Il y a aussi le dysfonctionnement du système éducatif et des institutions éducatives.
6 000 enfants de rues. C’est énorme pour une population comme celle de Maurice. Quels sont les dangers?
Aujourd’hui, tout le monde se plaint de la montée de la criminalité et du manque de sécurité. Si nous prenons l’histoire personnelle des personnes qui ont un comportement antisocial et qui grossissent la population carcérale, nous comprendrons, tout de suite, le danger que représentent plus de 6 000 enfants livrés à eux-mêmes pour une petite population comme la nôtre. Si aujourd’hui, nous n’arrivons pas à sortir ces enfants de la rue pour les réintégrer dans la société et si nous n’investissons pas massivement dans ces enfants, cela nous coûtera beaucoup plus cher à l’avenir.
L’Etat assume-t-il ses responsabilités dans ce dossier?
La prise en charge de chaque enfant mauricien est le devoir de l’Etat avant d’être celui des ONG. L’ancien gouvernement l’avait bien compris. C’est d’ailleurs l’Etat, sous l’égide du ministère de la Sécurité sociale de l’époque, qui avait initié le projet d’encadrement des enfants de rues. L’Etat nous avait même fourni une formation de trois ans, dispensée par un consultant français, et on était tous employés par ce ministère. Mais l’actuel gouvernement a mis un terme à ce projet. Nous avons repris le projet. Nous sommes aujourd’hui dix éducateurs à œuvrer auprès de ces enfants au sein de Safire.
Quel type d’encadrement, comme vous le dîtes, peut-on apporter à ces enfants?
Il faut aller directement vers eux. Travailler à gagner leur confiance. Ensuite, œuvrer afin de changer leur comportement. Les déstructurer pour ensuite les restructurer. Il y a tout un travail à entreprendre auprès des familles afin de récupérer tout le monde dans le mainstream. Il s’agit, en somme, d’à peu près trois mois de travail pour obtenir leur confiance et environ un an pour la rééducation.
 
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