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Harish Boodhoo: “Aidez-moi. Je suis sincère. Personne ne défend ces exploités»

27 avril 2009, 10:13

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De sa cellule, Harish Boodhoo écrit une lettre. Il explique les raisons de son combat et tente d’éclairer ceux qui ne le comprennent pas.

Nous reproduisons ci-dessous de larges extraits de cette lettre. Nous vous laissons tirer vos propres conclusions.

 

Lettre de Harish Boodhoo datée du 25 avril 2009 (New Wing Prisons Beau-Bassin)

«J’ai commencé à sentir une douleur atroce à partir de jeudi dernier suite à l’agression d’un membre de la force policière deux jours avant, lorsque j’étais présenté à la cour. Vendredi, cette douleur était devenue insupportable avec d’autres sérieuses complications médicales. Ma tension artérielle fluctuait dangereusement…A l’hôpital de Rose-Belle, bon nombre de médecins ont constaté de sérieux problèmes. Les ligaments du bras gauche étaient contusionnés. La tension artérielle n’était pas stable. Le docteur en charge voulait que je sois placé sous sa surveillance, vu mon problème cardiaque antérieur. J’ai refusé. Il y avait sept détenus malades avec des menottes aux pieds. Je ne voulais pas mourir avec des chaînes attachées. Donc, je suis retourné à la prison. Les conditions médicales sont jugées stables. (J’ai cessé de prendre des médicaments. Je suis au dixième jour de grève de la faim). D’ailleurs, Kishore Pertab, Madan Dulloo, Anil Gayan, Vijay Makhan et Sarita ont tous été horrifiés de voir des détenus gravement malades en train de mourir avec des chaînes attachées aux pieds.

Je suis fort mentalement et me prépare pour l’audition de lundi où je défendrai mon cas, moi-même. Je suis confiant de libérer tous les 36 accusés.

Il me semble que le gouvernement a réussi à contrôler certaines rédactions dites indépendantes. Certains éditoriaux ressemblent aux rêves et souhaits de Sithanen. D’autres n’ont pas compris l’enjeu ou encore ont peur de rapporter fidèlement le procès de la cour. Ou certains ne comprennent pas l’anglais… Peut-être la censure est de rigueur surtout après les déclarations du Premier ministre à l’effet que je lutte uniquement pour me préparer au poste de Premier ministre…

N’oubliez pas les mêmes accusations ont été successivement portées contre moi quand j’avais:

a) mené campagne contre les abus de la mafia de la vente à la barre et entamé deux grèves de la faim devant les instances judiciaires. (Le gouvernement avait été obligé de légiférer. Le PM avait même participé à une messe. Il avait rencontré les grévistes. Mais jamais, il n’avait mentionné mon nom). Néanmoins, il ne faut pas oublier qu’il avait fermé mon journal Sunday Vani, qui était à la base même de la lutte contre la mafia de la…

b) dénoncé les activités illégales et combien dangereuses de l’armée secrète du PM- la Voice of Hindu. Les panneaux publicitaires à Grand-Bassin- avec deux épées souillées de sang et les deux drapeaux indiens. Malgré mes trois déclarations à la police et plusieurs lettres au DPP, ces dangereux panneaux sont toujours présents au lac sacré parce qu’ils appartiennent aux milices populaires du PM. Le nouveau DPP ne bouge pas.

c) Entrepris plusieurs activités sociales pour aider les démunis de la société.

Il y a un gros danger: le public n’oubliera certainement

a) pas de si tôt les lois votées en janvier 2007 (Borrowers Bill). Je me suis retiré de la scène pour prendre une retraite bien méritée. J’étais fatigué et aussi j’avais fait banqueroute parce que le PM avait mis en marche une machine répressive et totalitaire. Sa milice populaire me menaçait sans répit. Je suis retourné pour prêter la main aux grévistes de la faim. Je ne pouvais pas rester indifférent face aux souffrances humaines.

b) Aussitôt après, le Parti travailliste a mis sa machine de propagande en marche… Tout d’abord Rama Sithanen a parlé de sa fameuse donation de Rs 100 millions destinées aux victimes de la vente à la barre et surtout de trois enfants censément utilisés comme cobayes à des fins politiques. Puis Sheila Bappoo, Shirin Aumeeruddy, Nita Deerpalsing, le PM et les autres se sont acharnés sur leurs proies, Harish Boodhoo et les victimes. Sithanen a dévié l’attention publique que sur les Rs 100 M. Comme si nous, les Mauriciens, ne sont que des mendiants. D’autant plus, son conseiller principal, un certain Oozeer, avait promis sur les ondes de Radio One, en ma présence que la nouvelle loi allait prendre en considération tous les cas, sans exception. Vérifiez l’enregistrement. Darmah Naëck avait présidé ce débat. Puis il a été délégué à mon bureau par Sithanen pour réaffirmer l’engagement de son ministre… Tout compte fait, le débat n’est pas uniquement sur cette somme de Rs 100 M. Ils essaient de détourner l’attention de l’opinion publique. D’ailleurs, ce sont certains politiciens et la VOH qui ont choisi certains des bénéficiaires. Il n’y a pas de transparence. C’est un gros scandale. Certains bénéficiaires m’ont confirmé leurs démarches auprès des politiciens, la VOH et la Voix Kreol de Mario Flore. Sithanen a peur de publier cette liste. Je demande aux journalistes d’interroger les bénéficiaires un par un. Après tout, c’est un gouvernement aux scandales.

c) Et soudainement, le PM a encore essayé de contourner l’opinion publique. Il parle de mon soi-disant appartenance au MMM que j’envie la place de son poste de Premier ministre que le MMM se sert de moi comme bouclier thermique- tout ceci pour faire une promenade de santé- que l’alliance 1982 qui avait causé la chute du Parti travailliste avec mon parti (PSM) d’alors n’était pas nécessaire car le MMM l’aurait emporté seul (le PM donne un coup de pied à Anerood Jugnauth etc). Il dirige le pays par la chance et pas par connaissance… Même aujourd’hui Sunday Vani a été obligé de fermer ses portes parce que nous avions osé écrire sur les affaires… J’espère je confierai tout et tout avant que la mort me surprenne. En tout cas, Sir Seewoosagur et son fidèle serviteur Aya, tous les deux, avaient raison quand ils avaient confié en moi…

d) Comme annoncé plus haut, cette affaire de Rs 100M n’est que le sommet de l’iceberg- qu’un tout petit canal dans le fleuve d’Amazone du Brésil. Je suis attristé que certains journalistes et surtout les animateurs de certaines radios se sont piégés par Rama Sithanen. Même Robert Ahnee a oublié les vraies plaies du système de la vente à la barre.

Voici, en somme, quelques-unes:
Il y a des avoués, avocats, notaires, arpenteurs, courtiers, casseurs et autres institutions financières véreuses qui sont à la solde du gouvernement du jour. Ils volent. Ils trichent. Ils exploitent les gens crédules surtout les illettrés et les pauvres. Les règlements du contrat ne sont jamais lus ou traduits… A Maurice, beaucoup ont perdu leurs propriétés parce que les avoués, les notaires et les créditeurs- qui forment un cartel- ont été complices. Puis ils extorquent de l’argent. Les clients ne reçoivent pas de reçu. La MRA et le public perdent gros. Dans certains cas (Mme Farida Bahlum), des clients payent plus d’argent aux avoués et avocats que leurs dettes contractées initialement… Le fait demeure que même aux instances judiciaires, les débiteurs sont torturés car les haut-gradés sont passés par ces mêmes portes. Qui plus est, certains avoués sont mêlés avec des courtiers et des casseurs. Bien des fois, il y a collusion, connivence entre eux. Celui qui a de l’argent gagne… Il y a certains avoués qui possèdent des centaines de millions de roupies. Personne ne pourra les inquiéter car ils paient gros au gouvernement/partis de l’opposition. Cette affaire de 10% de commission est toujours présente.

b) Que se passe-t-il devant la Master’s Court? Un autre drame humain! Pour chaque affaire renvoyée, le client doit payer à son avoué quelque Rs 10 000 à Rs 25 000. Bien des fois, ils paient quelque Rs 200 000 alors que la dette initiale était seulement de Rs 150 000. Parfois les affaires sont renvoyées plus d’une dizaine de fois. Quand la propriété est vendue, il y a une autre corruption flagrante. A la Master’s Court, il y a seulement une dizaine d’acheteurs. Ils s’organisent entre eux pour partager leurs proies. Les propriétés sont vendues d’avance (parfois les créditeurs ne savent même pas si leurs maisons seront vendues- ils reçoivent des visites surprises de ces courtiers de la Cour suprême. Qui plus est, c’est l’huissier qui fixe les valeurs marchandes. Il n’a aucune expérience dans ce secteur. Bien des fois, il ne visite même pas le lieu. Sans surprise, des acheteurs de la Master’s Court ont été dupés… puisque les prix ont été fixés au préalable et les avoués sont en connivence. Une maison qui vaut Rs 2 M peut se vendre à seulement Rs 250 000. Les Nuckcheddy ont perdu leur maison à étage à Vallée Pitot pour seulement Rs 400 000 alors que la dette était gonflée à Rs 7 M. Le courtier qui l’a achetée sort immédiatement de la cour et négocie avec eux «donne moi Rs 900 000, mo retourne zotte la cage». C’est un gros scandale… C’est dommage que certains n’arrivent pas à comprendre et se concentrent sur les Rs 100 M de Sithanen. D’autant plus les casseurs puent surtout en cette période difficile… Seuls les imbéciles et les palefreniers et autres lèche-bottes de l’Etat diront que ceux qui sont endettés sont des accusés, des voleurs et devront payer. Oui, ils ont payé mais le système les a meurtris. Allez voir les comptes de ces gens qui ne comprennent pas…

Le problème n’est pas seulement la vente à la barre. Que dire de ces grévistes de la faim qui ont tout perdu à travers le système de prescription parce qu’ils n’ont pas pu payer un grand avocat ou parce que leurs hommes de loi les ont lâchés, truqués et ont fait cause commune avec la partie adverse? Que dire de ces descendants d’esclaves qui ont été dépouillés par de gros propriétaires, usiniers. Leurs ancêtres possédaient des terrains…Comment récupérer ces terrains? Le cas Tackun de Floréal saute aux yeux. Son terrain a été prescrit par un certain… dans les années 1980. Il avait dépensé plus de Rs 200 000, frais des avocats et avoués. Trois jugements de la Cour suprême étaient contre lui. Je réfère l’affaire à la police. Rien de concret pendant une année. J’ai fait ma propre enquête. La police témoigne. Les deux témoins de… avouent qu’ils avaient été soudoyés. Les trois sont arrêtés en 2007. Les Tackun (76 ans) vivent chez des parents. L’affaire est en cour intermédiaire. Vivront-ils pour voir la justice? Quelle honte pour le gouvernement et la justice! Ceux qui défendent Sithanen et ses Rs 100 M ne comprendront rien. Ils sont coupés des réalités.

Nous avons aussi parmi les grévistes de la faim des locataires. Un ministre avait passé une loi pour augmenter les prix des locations. Plus de 100 magasins sont fermés à Port-Louis. Un locataire payait Rs 6 000. On lui réclame Rs 48 000 maintenant. Un imprimeur payait Rs 4 000. On lui réclame Rs 26 000 aujourd’hui. Ils sont impuissants.

Résumé. Sithanen, Bappoo, Deerpalsing, le Premier ministre, ils ont tous faussé le débat… Ne tombez pas dans leurs pièges. Détrompez-vous. Ne passionnez pas le débat. Il n’est pas politique. Aidez-moi. Je suis sincère. Il n’y a personne à défendre ces exploités. Les créoles sont les plus affectés, bien-sûr… Je me battrai pour ces pauvres une dernière fois.»

Harish Boodhoo

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