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Interview Bagooaduth Kallooa, président de la «Mauritius Nursing Association»

9 novembre 2012, 05:46

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Vous ne cessez, de jour en jour, de critiquer le système de santé public et le gouvernement. Au point que l’on vous traite d’éternel insatisfait...

Non. Ce n’est pas vrai de dire que je critique le gouvernement as such . La Mauritius Nursing Association ( MNA) croit dans le leadership du Premier ministre. Toutefois, les services de santé publics ne fournissent pas un service rentable par rapport au budget dépensé, qui est de plus de Rs 8 milliards. Je pense que si l’on veut améliorer un service, nous devons le voir d’un oeil critique. On ne peut pas se taire et laisser le service se dégrader et pourrir de jour en jour.

Il semble que ces critiques ne passent pas très bien auprès des autres membres du personnel...

Les médecins ont toujours eu une perception de « fausse suprématie » dans le service. Ils pensent que tout tourne autour d’eux et qu’ils sont les seules références en ce qui concerne la Santé. D’ailleurs, ce sont eux qui occupent les postes de décisions au ministère et à l’hôpital.

Mais les médecins en savent plus sur la santé, n’est- ce pas ?

Certes, ils ont plus d’expérience en médecine. Toutefois, un bon médecin n’est pas nécessairement un bon gestionnaire.

Je l’ai toujours dit. Je ne comprends pas pourquoi les médecins prennent ces critiques à titre personnel. Nous ne sommes pas en train de critiquer les médecins, mais les gestionnaires.

Etant eux- mêmes médecins, ils sont très subjectifs.

Toutes les décisions sont centrées autour des besoins et du fonctionnement des médecins. Les autres membres du personnel passent après.

A travers le monde, il y a un respect mutuel pour tous les grades dans le service médical. Ce respect est essentiel car le système ne fonctionne pas avec une seule catégorie de personnel, mais avec un ensemble. Toutefois, ici on ne fait que se servir de nous.

Les infirmiers ne sont- ils pas là pour servir ?

Nous sommes au service du public, pas des médecins.

C’est inacceptable qu’un Ward Manager tienne la serviette lorsque le médecin se lave les mains ! Les médecins ne peuvent pas toujours avoir la part du lion. Toutefois, il y a des exceptions. Il y a des médecins qui admettent que le système ne fonctionnerait pas sans les autres membres du personnel.

Mais, ce n’est pas le cas de tous. Nous souhaitons qu’ils réalisent l’importance du travail d’équipe et du respect mutuel pour donner un service de qualité. La solution à ce problème ne se trouve pas dans la main de quelques spécialistes.

Le ministre de la Santé n’a également pas échappé à vos critiques...

Nos critiques sont fondées. Lormus Bundhoo a lui- même avoué que la MNA avait raison sur plusieurs points. Il faut savoir que l’association n’a rien contre lui. Nous avons pareillement critiqué Rajesh Jeetah, Maya Hanoomanjee et ceux qui étaient là avant eux.

Mais votre association a ovationné Rajesh Jeetah lors de la 10 e conférence de l’ « East Central and Southern African College of Nursing » , en septembre...

C’était une conférence internationale avec des délégués de 20 pays et d’autres personnalités internationales du secteur de la santé. Le ministre Bundhoo était au courant de la tenue de cet événement un an à l’avance. Toutefois, ils nous ont traités avec indifférence. Le ministère sous- estime la capacité des infirmiers.

Lormus Bundhoo m’a fait savoir qu’il ne pourrait pas venir, deux ou trois jours avant. C’était un manque de respect total. Il devait partir à Rodrigues, on comprend, mais il aurait pu planifier ce voyage à une autre date.

Tout le monde s’attendait à voir le ministre de la Santé pour la cérémonie d’ouverture. Pour sauver la face devant nos invités, j’ai dû aller voir Rajesh Jeetah personnellement à la veille de la conférence. Il a accepté de venir alors même qu’il devait voyager ce jour- là. Nou ti prepar enn gro gato, fi ni met enn seriz tou lor la. Olie Lormus Bundhoo vinn manz li, linn refi ze . C’est pourquoi il y a eu une ovation. Nous ne sommes pas à blâmer. D’ailleurs lors de notre cérémonie pour la Nurses Day en mai, Lormus Bundhoo avait reçu le même accueil.

Le ministre de la Santé a toutefois pris des actions pour répondre aux demandes des infi rmiers. Comme recruter des « Student Nurse » . ..

Tap lestoma dir mo pe fer rekritman, infi rmie pena narien ladan ! Le recrutement est une chose essentielle dans tout secteur.

De toute façon, le ministère de la Santé ne peut continuer à fonctionner avec un manque de personnel généralisé dans les hôpitaux. Le personnel fait face à de nombreuses diffi cultés et le ministère doit dépenser de grosses sommes en heures supplémentaires afi• que le service soit assuré.

Effectivement, il n’y avait pas eu de recrutements pendant deux ou trois ans avant l’arrivée de Lormus Bundhoo. Mais, on ne peut pas dire qu’il fait une faveur à la MNA en recrutant des infirmiers. Le ministre a également annoncé la mise à jour de la formation des infi rmiers, en changeant le certifi cat en diplôme. La demande a été faite en 2008 et les cours pour ce Diploma in Nursing n’ont toujours pas commencé. Je ne doute pas de la parole du ministre, mais il n’y a rien d’extraordinaire dans tout cela. Il ne fait que son travail. Donc, pena narien pou tap lestoma ladan !

Les choses avancent quand même ?

Les choses avancent, oui, mais très très lentement. Nous ne demandons pas des changements immédiats, mais il faut au moins affi cher une volonté et donner des délais raisonnables.

Pour le moment, il nous faut absolument faire des requêtes, des manifestations et aller vers la presse pour faire avancer les choses.

Quand il y a des nouveautés, les médecins ont la meilleure part du gâteau et nous les restes. La situation à l’hôpital Jeetoo, notamment avec les dortoirs, en est un exemple.

Je ne demande pas de part égale. Les médecins pensent peut- être qu’ils doivent avoir plus de privilèges à cause de leurs longues études ou parce qu’ils sont essentiels, contrairement aux infi rmiers. OK, mais donnez- nous au moins ce que nous méritons.

Vous ne craignez pas des représailles, ou y en a- t- il déjà eu ?

Effectivement. Que le ministère ne respectait pas ses engagements ou faisait la sourde oreille, ça allait encore.

Mais, ce qui nous a agacés à la MNA, c’est qu’on a tenté de me faire taire et créer une discorde dans mon syndicat et avec les autres syndicats de la Santé. On a tenté de discuter avec mon négociateur en privé, sans passer par le syndicat.

Ensuite, on a regroupé toutes les personnes frustrées du secteur de la santé ( NdlR, le Front Commun pour la Santé, regroupant des syndicats ) pour venir dire que Kallooa en fait trop. Et, nos membres n’ont pas eu de time- off pour venir à notre rencontre autour du rapport du Pay Research Bureau . On a également essayé de transférer nos membres exécutifs vers d’autres départements et établissements pour qu’ils se taisent. Les transferts sont normaux, mais on devinait que c’était une manière déguisée de nous faire taire. Tout ceci est très lâche.

La dernière tentative date d’hier ( NdlR, mardi le 6 novembre). Des policiers sont venus chez moi, afin de vérifier mon adresse, alors que je l’ai donnée depuis plus de deux ans.

 
 Propos recueillis par Zubair HANSYE

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