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Jayen Chellum, Secrétaire général de l’ACIM: «C’est de l’insolence envers le public voyageur»
3 août 2013, 06:29
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Jayen Chellum, Secrétaire général de l’ACIM: «C’est de l’insolence envers le public voyageur»

Jayen Chellum de l’ACIM exhorte le consommateur à refuser les augmentations «obscures» – il fait référence ici à l’augmentation du prix du ticket d’autobus et à la redevance télé et dénonce l’obscurité qui entoure les finances de ces deux corps parapublics. Il est temps, dit-il, que le peuple dise «non».
L’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM) est passée à l’offensive mercredi en lançant un appel au boycott des autobus si le gouvernement allait de l’avant avec une augmentation du prix du ticket. N’est-ce pas y aller un peu fort pour une augmentation de 12 % ?
Nous sommes à un stade où l’ACIM est persuadée que la population doit se tenir prête à faire entendre sa voix.
Mais pourquoi ?
Parce que c’est bien la première fois qu’une augmentation du ticket d’autobus est occasionnée par un accident où dix personnes sont mortes. Et ce, dans un autobus prototype dont l’achat est entaché d’ingérence politique.
N’est-ce pas de la démagogie de votre part ?
Pas du tout. Cette affaire d’augmentation de prix du ticket d’autobus découle directement de la décision du gouvernement de réallouer les routes profitables de la CNT à d’autres compagnies de transport. Cette décision a donné lieu à une action syndicale et, dans la foulée, cette stratégie syndicale a aussi poussé vers une demande d’augmentation de salaires.
Le gouvernement accepte alors d’accorder une augmentation de 19 % sur trois ans, commençant avec une augmentation de 15 % pour la première année. Or, à la table des négociations, le ministre du Travail Shakeel Mohamed a bien dit qu’une augmentation de salaires de 15 % n’allait pas nécessiter une augmentation du prix du ticket d’autobus.
Etes-vous sûr de ce que vous avancez ?
Oui, je l’ai entendu prononcer ces mots à la télé. Donc, la question que je me pose est comment Anil Bachoo peut d’un coup décider – subitement il y a une semaine –, qu’il fallait augmenter le prix du ticket d’autobus ? Cette décision est avalisée par le cabinet dès le lendemain. Je trouve que c’est totalement inacceptable. Cela est d’autant plus grave que tout est fait dans l’opacité ; alors que l’on préconise une augmentation du prix du ticket, la CNT n’a pas déposé son bilan financier au Parlement. Donc, on ne sait rien de sa situation financière.
Sauf ce que son ancien président a dit publiquement: que la CNT était profitable et que la seule raison pour laquelle il y avait un problème au niveau de la balance des comptes, c’est à cause d’une vieille dette qui aurait dû être rayée !
Exactement. Je vous rappelle aussi que la compagnie Rose-HillTransport (RHT), malgré le fait qu’elle ait connu des pertes en 2012, a affirmé qu’elle pouvait financer une augmentation de salaires de 15 % sans avoir recours à une hausse du prix du ticket d’autobus.
Cela démontre qu’il y a du mismanagement à la CNT. Le Triolet Bus Service (TBS) fait des profits, RHT est profitable malgré des pertes l’année dernière alors que United Bus Service (UBS) n’a pas déposé de bilan en 2012. Dans un cas pareil, j’estime qu’on n’a d’autre choix que de se rebeller. Mais ce n’est pas tout car là n’est pas le plus grave. Le plus grave c’est qu’aucun bilan moral n’a été déposé en ce qui concerne la mort de dix personnes. Il n’y a pas eu de commission d’enquête, il n’y a pas d’accountability. C’est inconcevable, inacceptable qu’après que dix personnes ont péri dans un autobus qui ne correspondait pas à la norme, ils essayent d’imposer une hausse du prix du ticket comme s’il revenait au consommateur de payer pour leur négligence. Nous veillerons à ce que cela change.
Vous avez certes un point mais je me fais l’avocate du diable par rapport à la situation financière de la CNT. Il ne faut pas oublier que la CNT offre un service public et dessert des routes à perte parce qu’il le faut. Comparer sa performance financière aux autres opérateurs n’est pas juste.
C’est clair que la CNT a hérité de certaines routes non profitables de par sa fonction sociale. Mais il y a surtout le fait que la CNT a été mal gérée et qu’elle souffre d’ingérence politique. Nous l’avons vu rien que dans l’achat des bus. Les bus accidentés sont du batch de 2007 et nous savons désormais dans quelles conditions ces bus ont été achetés. N’oubliez pas non plus les tentatives d’ingérence dans l’achat prochain de 65 autobus. Mais, pour moi, le plus grave reste la question de transparence. Si, certaines compagnies peuvent payer leurs augmentations de salaires sans avoir à transférer ce coût aux voyageurs, pourquoi faut-il imposer une augmentation juste parce que la CNT en a besoin ? C’est ce système-là qu’on doit revoir. Dans la plupart des cas, ce sont les problèmes de la CNT qui font que tout le public voyageur doit payer. J’appelle cela une insolence vis-à-vis du public voyageur.
Est-ce que l’ACIM est contre toutes les augmentations de prix ou juste contre celle du ticket d’autobus ? Car n’oublions pas que des fois, des augmentations sont inévitables !
Certainement. Il y a eu, dans le passé, des augmentations du prix du ticket justifiées. Je conçois qu’aucune compagnie ne puisse survivre en l’absence de profits. Mais comment se fait-il que TBS fasse des profits, que UBS en a fait en 2011, idem pour RHT ? Seule la CNT fait des pertes ? L’ACIM n’est pas contre les augmentations de prix qui sont justifiées. Ce que nous dénonçons, ce sont des augmentations obscures. Il faut connaître les vraies raisons de cette augmentation.
Le plus extraordinaire dans cette histoire, c’est que les autres opérateurs disent qu’ils ne veulent pas d’augmentation !
Effectivement, parce que, disent-ils, la hausse va profiter aux taxis marron. Cette situation démontre l’indifférence du ministre Bachoo face aux consommateurs. Au lieu d’adresser les principaux soucis des opérateurs de bus qui font face à certains problèmes, au lieu de s’attaquer aux vrais problèmes, on les contourne et on finit par tout aggraver. Ce faisant, on met certaines compagnies en banqueroute pour soutenir ceux qui sont dans l’illégalité. C’est une approche qui occulte complètement les vrais problèmes et qui est symptomatique du fait que l’on refuse de voir la réalité en face. Et nous sommes dans cette situation à cause d’une absence de politique nationale sur le transport public.
L’argument de ceux qui ne veulent pas de l’augmentation est que c’est le quantum de la compensation que le gouvernement donne par rapport à ceux qui voyagent gratuitement qu’il faut revoir. Ça a du sens, non ?
Tout à fait. Car les consommateurs de produits pétroliers financent déjà le transport gratuit à travers les taxes que l’on paie sur les produits pétroliers ! D’autre part, d’une manière étonnante, l’augmentation proposée était de Rs 2 across the board. Dans le passé, les trajets courts n’étaient pas trop affectés par les augmentations mais, depuis que l’on subventionne le transport gratuit, tout le monde paie, surtout celui qui fait un trajet court ! Car ce sont les tarifs pour ces trajets-là qui augmentent le plus. On est en train de financer à plusieurs reprises le transport gratuit.
Honnêtement, vous pensiez que votre appel au boycott allait être entendu du public ?
Dans tout leadership, il arrive un moment où l’on doit s’engager dans l’appel que l’on fait. Ce qui fait que ce matin (NdlR, jeudi), nous allions demander à une cinquantaine de volontaires de se joindre à nous et de monter dans un bus en refusant de payer. Nous étions mêmes prêts à braver une arrestation. Est-ce que le peuple aurait suivi ? Je pense que le peuple est à bout et je suis sûr que le gouvernement le sait. Je ne pense pas que la population dans son ensemble nous aurait suivis mais je pense que c’est important de montrer au gouvernement que nous n’allons pas accepter de telles décisions prises dans le mépris total de la population.
Dans un autre registre, comment allez-vous faire pour refuser de payer la redevance télé, un autre de vos combats ?
Nous sommes en train de circuler une pétition publique contre la redevance télé et nous visons plusieurs dizaines de milliers de personnes. Ce sera un des moyens de faire pression. Ce qui nous chiffonne extraordinairement avec cette augmentation, ce n’est pas tant le montant de Rs 50 que la façon dont le gouvernement a transformé la télévision nationale en un outil de propagande par excellence pour le régime au pouvoir. Matin et soir, on nous matraque avec la pensée unique que tout ce que le gouvernement fait est bon. C’est inacceptable. Et les gens, même la presse, ont peur de critiquer la MBC. On ne peut pas encourager cette manipulation et c’est pour cela que payer même un sou de plus est hors de question.
J’ajoute que le problème est le même qu’à la CNT ; manque de transparence dans les finances. Car ce qu’on ne dit pas, c’est que la MBC accumule des pertes de Rs 400 millions. Et c’est le public qui est supposé payer pour ce propagandiste patenté du gouvernement qui ne dépose pas de bilan financierdepuis 2009 ?
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