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Kris Lutchmenarraidoo : « Maurice est déjà traité comme un pays à risque par les réassureurs »
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Kris Lutchmenarraidoo : « Maurice est déjà traité comme un pays à risque par les réassureurs »

A ce jour, c’est un montant se situant entre Rs 500 et Rs 600 millions qui est réclamé aux assureurs, suite aux inondations du 30 mars. Kris Lutchmenarraidoo, CEO du groupe «Mauritius Union» et président en exercice de l’Association des Assureurs de Maurice, soutient que sur la base de ce montant de réclamations, les assureurs devront absorber entre Rs 50 millions et Rs 120 millions, la différence sera prise en compte par les réassureurs. Il ajoute que l’effet de ces réclamations influera négativement sur la profitabilité des compagnies d’assurance. Le patron de la MUA s’est confié à «l’express».
Les compagnies d’assurance sont actuellement sollicitées par les clients pour des réclamations après les inondations du 30 mars qui ont causé des dégâts à des centaines de véhicules et de bâtiments. Quel constat faites-vous de la situation ?
Disons qu’au niveau de l’industrie, nous avons des réclamations estimées entre Rs 500 millions et Rs 600 millions pour quelque 200 cas enregistrés. Je note que Rs 350 millions ont été réclamées au niveau de l’assurance-automobile auprès des assureurs impliqués dans ces inondations et la différence, soit près de Rs 250 millions pour les bâtiments et autres stocks de produits endommagés suivant cette calamité naturelle. Ce sont des chiffres provisoires vu qu’une bonne partie des véhicules affectés n’a pas encore été analysée par les spécialistes. Dans le cas des voitures, le montant réclamé pourrait être révisé à la baisse dans la mesure où elles ne sont pas toutes des pertes totales. En revanche, au niveau des bâtiments, c’est un chiffre qui sera appelé à augmenter une fois l’étendue des dégâts déterminée et après que l’élément de business interruption sera pris en considération.
Il va sans dire que des réclamations de Rs 600 millions auront un impact sur la profitabilité des assureurs ?
L’impact financier sur l’industrie sera atténué si des réassureurs interviennent. Chaque compagnie d’assurance déterminera sa limite de rétention en fonction de son portefeuille de risques et la différence sera prise en compte par des sociétés de réassurance.
Globalement, on pense que l’industrie absorbera entre Rs 50 millions et Rs 120 millions, laissant la différence aux réassureurs internationaux. Il est évident qu’à ce stade, il est difficile d’estimer le chiffre exact, car, pour ce faire, il faut qu’on ait des détails des traités de réassurance de chaque compagnie.
Il est clair qu’au niveau de l’industrie, cela affectera la profitabilité des compagnies vu qu’elles auront à absorber les réclamations de Rs 50 millions à Rs 120 millions. Du coup, leurs profits pour l’année financière en cours seront réduits.
Et spécifiquement pour la MUA ?
Nous avons des réclamations pour 89 voitures d’une valeur de Rs 45 millions et Rs 105 millions pour le segment non-moteur, soit un total de Rs 150 millions. De ce montant, il faudra exclure la partie qui sera prise en compte par le réassureur, ce qui mène à une somme de Rs 22 millions à Rs 23 millions, ainsi qu’à un coût supplémentaire de Rs 5 millions pour rétablir les limites de la réassurance. De ce fait, le profit final sera réduit de Rs 27 millions.
Doit-on s’attendre à une majorationdes primes, surtout pour l’assurance automobile et non-automobile après les inondations ?
Ce n’est pas parce que nous payons des réclamations que les primes vont augmenter. La prime d’assurance est fixée en fonction du degré de risques qu’un assuré est appelé à prendre. Dans le cas de bâtiments situés dans les zones où les risques d’inondation sont élevés, il est évident qu’il y aura une augmentation de primes. Chaque cas doit être traité selon ses propres spécificités. Pour ce qui est de l’assurance-automobile, chaque compagnie a son approche et il est difficile de généraliser.
Par ailleurs, il ne faut pas considérer la prime uniquement sur ce qui vient de se passer et des réclamations payées à cet effet. Car, il y a plusieurs données qui sont prises en considération. A mon avis, le plus important pour des compagnies est de créer des réserves pour faire face à des obligations, en cas de catastrophe impliquant de grosses réclamations.
Certains automobilistes ne sont pas contents, car ils ne bénéficieront d’aucun remboursement des compagnies d’assurance, bien que leurs voitures aient été affectées. Comment expliquez-vous cette situation ?
Il faut savoir qu’une voiture qui est assurée au tiers n’est pas couverte quand elle subit des dommages tels que les inondations. L’assurance au tiers ne couvre que les dégâts causés par la voiture appartenant au propriétaire. En revanche, une assurance tous risques couvre les dommages couverts par l’assurance au tiers mais aussi la voiture assurée. C’est ce qu’on appelle owned damaged en cas d’accident.
Par ailleurs, outre les dommages aux voitures, il y a d’autres incidents à risque qui sont couverts, tels que le feu, la vie des passagers, les inondations, les cyclones, entre autres.
Certaines compagnies proposent des offres comme la Comprehensive Cover, qui incluent tous ces risques. Chez d’autres, en revanche, certains de ces risques doivent être pris comme options supplémentaires. Il est donc recommandé au grand public de bien se renseigner sur les modalités de la couverture au moment de la signature d’un contrat chez un assureur.
Estimez-vous que les réassureurs doivent aujourd’hui redéfini leur portefeuille de risques et inclure les inondations, si ce n’est pas déjà le cas ?
Maurice est déjà traitée comme un pays à risque par les réassureurs vu que nous sommes localisés dans une zone cyclonique. Donc, nous payons déjà une prime plus élevée par rapport aux pays qui ne se situent pas dans cette zone.
Les incidents du 30 mars sont peut-être les plus marquants de ces dernières années, les dommages causés étant beaucoup plus considérables que lors des inondations de 2008. Mais comme je l’ai mentionné plus haut, les assureurs, de même que les réassureurs, fondent leurs analyses sur la base des statistiques de 10, 15 et 20 ans de plus.
L’affaire «Whitedot» défraie l’actualité depuis trois semaines. Comment expliquez-vous que des milliers de personnes boudent des fonds d’investissement légalement constitués pour faire confiance à des «Ponz Schemes» douteux ?
Comme vous le savez déjà, le groupe MUA, à travers sa filiale National Mutual Fund , offre un fonds d’investissement au grand public. Ce fonds opère dans la plus grande transparence et brasse une clientèle qui lui fait confiance depuis son rachat en 2010.
Dans le cas de Whitedot, je constate tout simplement que la prolifération de ces Ponzi Schemes à travers le pays découle du fait que les Mauriciens sont devenus matérialistes et cherchent à s’enrichir rapidement sans faire de gros efforts.
Nous avons, à Maurice, un système bancaire bien établi tout comme un secteur des assurances dynamique comprenant 21 opérateurs qui ont déjà fait leurs preuves sur ce marché. En proposant différents types d’investissement au grand public. Toutes les informations nécessaires sont fournies afin d’aider les investisseurs à comprendre la raison pour laquelle ils sont appelés à investir et quels sont les bénéfices dont ils disposent. Il ne suffit pas d’être attiré par des taux d’intérêts mirobolants qui sont offerts. Il faut essayer de comprendre s’ils sont réalisables dans le cours normal des choses.
Tout investisseur avisé s’interrogera forcément si quelqu’un lui offre 25 % d’intérêt par an alors que les marchés financiers proposent 6 % à 7 % au maximum.
Les banques sont réglementées par la Banque de Maurice et les sociétés d’investissement par la Financial Services Commission. Ces deux entités régulatrices imposent une obligation à ces institutions pour que celles-ci fournissent toutes les informations aux clients. Cela, afin que ces derniers comprennent la nature des transactions dans lesquelles ils sont impliqués. Quelque part, ceux qui ont investi dans les Ponzi Schemes ont une grosse part de responsabilité.
Plus généralement, quel regard portez-vous sur le secteur des assurances à Maurice ?
Le secteur se porte bien avec les compagnies affichant une bonne santé financière. Les primes ont baissé depuis l’année dernière, ce qui ne peut que faire plaisir aux clients. Même si ce n’est pas nécessairement bon pour les assureurs dans les moyen et long termes. Le principe de base de l’assurance est d’accumuler des réserves lorsqu’il fait beau afin de faire face aux réclamations après une calamité.
Vous venez d’être élu président de l’Association des Assureurs de Maurice. Quelles sont les priorités ?
S’assurer qu’il y ait des consultations régulières avec les autorités et qu’on puisse faire évoluer ce secteur et le consolider. Cela, pour le bien-être et la sécurité des clients. De même qu’essayer, en collaboration avec mes confrères, de voir comment l’on peut rendre les procédures pour les réclamations moins douloureuses pour nos clients.
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