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Questions à Pierre Dinan, économiste

1 avril 2010, 06:00

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Quelle est votre appréciation de la politique économique du gouvernement ces cinq dernières années ?

Dans l’ensemble, la politique économique a été positive. Des efforts ont été faits pour réduire le déficit budgétaire, gérer la dette publique et la ramener à des proportions moins élevées mais il y a encore du chemin à faire. Il y a eu l’allègement des procédures par rapport au climat des affaires, et le pays a eu de bonnes notes de la part des institutions internationales.

Après des tergiversations, trop longues avec la Commission européenne, un accord est intervenu pour permettre à l’industrie sucrière de se transformer graduellement en une industrie cannière.

Cela a contribué à réduire notre dépendance énergétique sur l’importation des produits pétroliers.

Les autres industries d’exportation sont sur la bonne voie.

Mais elles ont encore de gros défis à relever.

Oui. Elles subissent les contrecoups de la récession mondiale, et cela ne peut être imputé au gouvernement.

Il faut saluer le fait que, dans son ensemble, l’économie mauricienne n’est pas entrée dans une croissance négative. Elle a dû se contenter d’une croissance réduite ces deux dernières années.

Et les points faibles de cette politique économique ?

Effectivement, il y a des points faibles. C’est tout d’abord le déficit conséquent du solde courant de la balance de paiements, soit la valeur des exportations moins les importations de biens et services. La deuxième faiblesse, c’est l’incapacité de ramener le chômage à un taux faible même s’il faut reconnaître que durant les cinq dernières années il a quelque peu diminué.

Notre agriculture doit produire davantage en termes de production maraîchère et la pêche.

Des méthodes modernes pour les équipements et la formation n’ont pas été adoptées.

Il y a du travail à faire du côté des industries d’exportation et des services. Il faut mettre plus d’accent sur la qualité des produits exportés et leurs coûts.

La productivité des facteurs de production notamment le capital, la main-d’oeuvre, le management et l’utilisation des technologies est un autre point faible. La productivité doit être un des objectifs majeurs du prochain quinquennat.

Qu’en est-il de votre appréciation de l’économie mauricienne face à la crise ?

Depuis 2005, le gouvernement a mis en oeuvre une réforme visant l’assainissement des finances publiques et il y a eu un encouragement plus fort de l’entreprise privée. La volonté d’ouverture à des investissements étrangers est caractérisée par des projets d’Integrated Resorts Scheme, qui se manifeste par un flux de capitaux étrangers, chose jusqu’ici inconnu à Maurice. Cette réforme nous a permis de tenir le coup.

Mais il y a le fait que les finances publiques s’étaient constituées des réserves. Une partie a pu être utilisée pour la création de fonds.

Le gouvernement a ainsi puiser de ces fonds pour financer les projets d’infrastructure de son plan de stimulation de l’économie.

Y a-t-il des pays qui sont sortis de la crise ?

Nous sommes dépendants des marchés étrangers pour nos exportations. Nous sortirons de la crise quand ils en sortiront. Il y a des signes de reprise, et si cela se maintient, cela aura un impact positif sur nos exportations. La Chine, l’Inde et d’autres pays d’Asie sont sortis de la crise. Mais nous n’exportons pas vers ces pays. Cela devrait nous inciter davantage à trouver des marchés dans ces pays d’Asie.

Vous pensez à quoi ?

Le tourisme. Mais il nous faut des liaisons aériennes directes avec la Chine, ou encore le Japon.

Nos hôtels auront à s’adapter à la clientèle asiatique. Les touristes asiatiques seront forcément différents des touristes européens.

Etes-vous satisfait des mesures prises pour l’allègement de la pauvreté ?

Il y a eu des efforts qui ont été faits pour s’attaquer à ce problème, à savoir le Corporate Social Responsibility. Bien qu’il y ait eu croissance économique, il est permis de douter de la réduction de la pauvreté. Il est souhaitable que davantage d’efforts soient fournis pour éliminer le gaspillage dans certains secteurs. Il s’agit aussi d’améliorer la qualité et l’environnement des habitations des plus démunies. Car la multiplication des villas doit impérativement être accompagnée d’une amélioration de la qualité de vie des économiquement faibles.

Il y a eu du retard dans les investissements concernant les infrastructures ?

Ce gouvernement, comme les précédents, a toujours pris trop de temps pour se décider à investir dans de nouvelles routes et moderniser le port et l’aéroport. Le stimulus package l’a forcé à prendre certaines décisions. Le gouvernement devrait continuer à prendre rapidement d’autres décisions pour améliorer les infrastructures.

C’est impératif pour le maintien de la croissance économique.

L’amélioration des infrastructures permettra à nos ressources humaines d’être en meilleur position pour contribuer à la marche de l’économie et partant, leur offrira une meilleure qualité de vie.

Qu’en est-il de l’endettement public ?

Nous sommes mieux lotis que bien des pays européens, où les dettes publiques dépassent 100 % du produit intérieur brut.

Le climat des affaires s’est-il amélioré ?

Il me semble que oui, mais il existe certainement des améliorations à apporter. Cela dit, il est dommage qu’il n’y ait pas beaucoup de volonté de mettre de l’ordre dans le secteur informel.

Ce secteur a un impact négatif sur la qualité des produits et des services, le traitement équitable des employés et la concurrence déloyale. Il y a du travail à faire et cela aidera à assainir le climat des affaires et à introduire l’équité dans tout le système.

 

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