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Shirin Aumeeruddy-Cziffra "En 1990, l''âge de consentement pour l''acte sexuel était de 12 ans"
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Shirin Aumeeruddy-Cziffra "En 1990, l''âge de consentement pour l''acte sexuel était de 12 ans"

? Une fi lle de 13 ans qui s’est enfuie avec un homme de 48 ans, une autre de 14 ans enceinte du concubin de sa mère, plusieurs cas d’attouchements rapportés… Il y a bien un problème quelque part, mais on n’est pas sûr de ce qu’est ce problème. Vous avez une meilleure idée ?
Je pense que nous sommes tous en train de faire la même lecture il y a quelque chose qui a changé dans notre société. Mais, en revanche, je pense qu’il faut faire très attention à ne pas tirer des conclusions d’ordre général sur tous les problèmes.
? Qu’est-ce qui a changé au juste ?
On sait que la société a changé, que la structure familiale a changé. A l’époque – et je prends mon époque et même celle de ma mère – on vivait avec les grands-parents, les oncles et les tantes. On grandissait dans de grandes familles et on avait, évidemment, des valeurs. A cette époque-là, nos parents avaient une autorité certaine sur nous. Mais, cela ne voulait pas dire que nous étions réprimés.
? Et les parents d’aujourd’hui n’ont pas d’autorité ?
Mais il y a des parents qui n’ont même pas la possibilité de s’occuper de leurs enfants parce qu’ils travaillent à des heures impossibles. Il y a des parents qui quittent la maison avant les enfants le matin et rentrent après eux le soir. L’enfant est livré à lui-même alors qu’il est important qu’un parent soit présent à ces moments. Pourquoi donc est-ce que l’enfant rentrera chez lui s’il n’y a personne ? Il y a aussi des parents qui ne savent pas comment être parents ! On apprend un métier, mais personne ne nous explique comment devenir de bons parents. D’ailleurs, le ministère de l’Egalité des genres est en train de travailler sur un projet très important : l’école des parents. Je crois qu’il est devenu très important d’expliquer aux parents leur rôle qui est de surveiller, d’éduquer et d’élever leurs enfants jusqu’à l’âge de 18 ans.
? Les parents iront donc à l’école alors que les enfants font l’école buissonnière ?
Cela aussi c’est un gros problème. Je suis persuadée que l’école a un rôle important à jouer. Si l’enfant pense que l’école est bien, il sera moins tenté de s’enfuir. Nous avons aussi un autre problème : à Maurice la plupart des écoles ne sont pas mixtes. Soyons honnêtes, les jeunes fi lles et les jeunes garçons ont envie de se rencontrer. Et puisqu’ils ne vont pas se rencontrer à l’école, ils trouveront des moyens pour le faire ailleurs.
? Oui, mais ces données ne sont pas nouvelles !
Bien sûr, mais ce n’est qu’une partie. Je pense que fondamentalement, il y a aujourd’hui une curiosité malsaine autour de l’activité sexuelle. C’est peut-être dû au fait qu’il y a une exposition de l’enfant à toutes sortes d’images, y compris pornographiques. Mais, quand il y a cela, cela veut dire que l’enfant, qui est exposé à tout cela, a besoin d’une éducation parce qu’il faut qu’il comprenne cela. Il faut démystifi er, sans gâcher le mystère du sexe. Les fi lles, je crois, sont toujours dans les romans à l’eau de rose.
? Malgré les clips pornographiques ?
Oui. Enfi n, cela dit, je suis étonnée que les fi lles regardent autant les fi lms pornographiques parce je ne vois pas l’intérêt pour les femmes. Je vois un intérêt pour les hommes. Mais bon, peutêtre que je suis de la vieille époque. Mais, ce qui est important, c’est qu’il faut qu’ils sachent quelle est la vraie vie et quelle est la vraie vie sexuelle. A quoi ça rime, qu’est-ce que cela va apporter et quels sont les risques pour les fi lles surtout ? Ce qu’on voit aujourd’hui, ce sont des garçons qui font boire les fi lles et elles acceptent de faire l’amour. Au-delà de cela, qu’est-ce qui se passer ? Le garçon ne va pas les épouser, il ne va pas y avoir d’histoire d’amour, de couple, la fi lle peut tomber enceinte et le garçon ne va pas assumer sa responsabilité de père. La fi lle va déchanter très vite.
? Mais est-ce que c’est ce que les fi lles recherchent ? Comment sait-on qu’elles aussi ne sont pas à la recherche du «fun» comme les garçons ?
Les garçons ont besoin de prouver qu’ils sont devenus des hommes. Pour les fi lles, je ne peux pas vraiment dire. Est-ce que s’envoyer en l’air n’est devenu qu’un «nissa», comme on dit maintenant ? Est-ce qu’elles cherchent le plaisir pour le plaisir ?
? Mais il se pourrait bien que !
Je ne sais pas. Peut-être qu’il faudrait faire des recherches pour savoir. Est-ce qu’il y a du plaisir pour les fi lles dans des trucs – excusezmoi de le dire crûment – «kwi vide» ? Elles croient que. Mais elles déchantent vite. Dans l’acte sexuel, il n’y a pas que cette histoire de tuyauterie. Il y a au-delà quelque chose que l’on prépare et qui aboutit à quelque chose qui ne
dure pas que le temps de l’acte.
? Mais nous sommes choqués car il est clair qu’il y a un fossé entre les générations. Se pourrait-il que les fi lles recherchent autre chose, du moins à cet âge, que construire une relation ?
En parlant de génération, laissez-moi vous dire que l’âge de consentement pour l’acte sexuel, qui est maintenant de 16 ans, était de 12 ans en 1990. Ma grand-mère a eu son premier enfant à 13 ans. A cette époque, les femmes étaient sexuellement actives très tôt, mais depuis il y a eu une
évolution dans le monde entier pour dire que ce n’est pas normal que des jeunes, simplement parce qu’elles sont pubères, sont capables d’avoir des relations sexuelles et des enfants.
? Mais justement, si auparavant les fi lles étaient sexuellement actives tôt, pourquoi est-ce aussi choquant qu’elles le soient maintenant ?
Il est clair que la société est un peu hypocrite. Et il est vrai qu’on peut se poser la question de savoir qui on est pour décider qu’untel peut avoir des relations sexuelles ou pas. Le problème est que dans la société, on considère que les jeunes – pour moi ceux qui ont de 0 à 18 ans sont des
enfants – ont besoin d’être protégés. Quelque fois contre eux-mêmes. Mais, je ne crois pas que la loi est si mauvaise que cela. A partir de 12 ans, les jeunes ont le droit de tout faire, sauf passer à l’acte. A partir de 16 ans, ils peuvent passer à l’acte. Mais je rappelle que nous attendons toujours un Sexual Offences Bill dans lequel il faut mentionner tous ces problèmes.
? Revenons à l’âge de consentement. A un moment, il était acceptable que les jeunes de 12 ans aient des relations sexuelles. L’âge légal a été porté à 16 ans. Pourtant, il y a des hommes qui continuent d’être attirés par des jeunes fi lles et vice versa. Qu’est-ce qui est normal et qu’est-ce qui ne l’est pas ?
Il y a des hommes qui sont aussi attirés par des petites fi lles de 5 ans aussi, vous savez ! Qu’est-ce qu’il faut faire ? Dire qu’ils peuvent aller de l’avant ? Non, la raison pour laquelle on a remplacé 12 ans par 16 ans, c’est pour protéger des jeunes pubères. C’est arbitraire, mais que voulez-vous ? Il faut bien que la loi tranche quelque part !
? Tout à fait, mais auparavant un homme de 30 ans pouvait se marier et donc avoir des relations sexuelles avec une jeune de 13 ans. On ne trouvait rien à redire parce que la loi le permettait. Maintenant, la loi dit non, mais ces choses-là se passent encore !
Ce n’était pas seulement la loi, mais aussi les moeurs. Cela existe aussi dans certains pays et cela se passe très mal parce que, très souvent dans ces pays, beaucoup de ces petites fi lles qui sont mariées sont maltraitées, exploitées par leurs maris. Elles se retrouvent en diffi culté parce qu’elles n’ont pas la maturité nécessaire pour assumer tout cela.
 
 
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