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Stéphane Sinclair : « Protégeons le patrimoine des archives »

6 mai 2011, 08:27

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Stéphane Sinclair, on a beaucoup entendu parler de vous, mais on vous a peu entendu.  « Faux historien », « Voleur d’archives », « agent secret », « hacker de haut vol », on a tout entendu sur vos activités, mais que faites-vous exactement à Maurice ?

Avant toute chose, merci à vous de me donner l''''''occasion de répondre de ces allégations infondées, ce que malheureusement je n’ai pas pu faire jusqu’ici.

En sollicitant cette interview, je pensais que vous me remettriez un document secret sur l’histoire de Maurice…

Eh bien au risque de vous décevoir, ma mission pour la Commission Justice et Vérité (CJV), confidentielle jusqu''à publication du rapport final de la CJV, est principalement technique : elle concerne la gestion et la conservation des documents anciens à Maurice. C''est en effet ce à quoi j''ai été formé à l''École des chartes, en France, dont je suis sorti avec une thèse en Histoire de l''Art (1988).

Mais sérieusement on a l’impression, en lisant la presse mauricienne et reunionnaise , que vous êtes en fuite.

C''est l''une des nombreuses inexactitudes de certains qui sont allés jusqu''à prétendre que j''avais pris trois billets d''avion pour tromper les investigations ! En fait, je n''ai jamais changé mes dates de voyage et tous mes amis et relations professionnelles en étaient informés depuis belle lurette. En plus, je suis chargé d''une mission scientifique pour la CJV, et je dois revenir à Maurice pour l''achever. C''est d''ailleurs précisément ce qui explique l''enchaînement des faits : je détiens la preuve écrite et formelle que la machination dont je fais l''objet était prévue de longue date et destinée à empêcher ce voyage et surtout à nuire à ma mission pour la CJV,et, par ricochet, à ternir la réputation de cette importante institution mauricienne.

Comment expliquez-vous ce qui vous arrive ?

Je suis par nature bien peu enclin à croire aux complots et pourtant, il a bien fallu me rendre à l''évidence puisque j''en connais maintenant le déroulement : quatre personnes ont, à de degrés divers, comploté contre moi. En premier lieu, Catherine Boudet, probablement manipulée par trois autres individus. Elle s''est gravement compromise pour sa tentative d''impliquer le cabinet du Premier ministre de Maurice, ses impairs vis-à-vis de la police et pour l''exploitation à mauvais escient de son statut dans la presse.

A l’aéroport de Plaisance, on a failli vous arrêter comme un vulgaire criminel, vous qui travaillez sur un important projet de la CJV,…

J''étais déjà assis en cabine, dans l''avion, quand deux inspecteurs de la police mauricienne m''ont demandé de les suivre. J''avoue ma surprise, mais je tiens à les remercier pour leur parfaite courtoisie : ils ont très vite compris, dès que je leur ai présenté mes lettres de créance de la CJV,, que la déposition de Catherine Boudet était un tissu d''absurdités à la fin de ce simple contrôle d''identité (ils n''avaient pas de mandat de perquisition), ils ont été, à juste titre, franchement cordiaux avec moi et fort désolés d''avoir été pris au piège d''un tel canular.

Et que dire de certains légistes auto-proclamés qui s’étonnent d’un soi-disant excès de zèle de la police à l’encontre d''une journaliste, crient à l''État liberticide et vont même jusqu’à prétendre que j’aurais manipulé la police pour qu’elle soit arrêtée ? Étant aux antipodes, je n’ai évidemment pas ce pouvoir et la police n''a fait, selon moi, que son travail avec diligence et conscience.

Ce que je pense de tout cela ? Je suis scandalisé par les atteintes répétées aux droits de l''homme, faisant fi de la présomption d''innocence et ne me laissant pas les armes pour me défendre, puisque j''étais au loin et puis, pensez à l''inquiétude ressentie pour mes proches – notamment pour mes vieux parents que certains ont eu l''outrecuidance d''importuner jusqu''en France, alors que je n''avais encore rien pu leur dire, me trouvant dans l''avion.

Je me reprends ici, auprès d''amis que j''aime. J''ai toute confiance dans la justice mauricienne et dans les mesures que prend l''institution par laquelle je suis missionné.

Pensez-vous qu’on fait votre procès de manière injuste ?

Je voudrais avant tout balayer les allégations proférées contre moi. Inutile de revenir trop longuement sur les accusations supposées de Johann Wiehe, selon lesquelles j''aurais séquestré ou volé des archives à la maison Labourdonnais à l''occasion de l''écriture commune du livre Sucre et Raffinement, en 2010. Johann s''est amplement expliqué à la police, m''a longuement écrit et a fait passer un communiqué dans la presse, me disculpant, dénonçant nommément les personnes ayant monté une machination contre moi et niant formellement les accusations portées dans la déposition de Catherine Boudet et qui lui étaient faussement attribuées.

Je n''ai pas non plus volé de documents dans les archives ou bibliothèques mauriciennes : pour mon enquête, la CJV m''a fourni des lettres de créance nominatives et signées par les personnes en charge c''est donc avec des saufs-conduits en règle que je me suis présenté aux responsables des principaux lieux de conservation d''archives et de livres du pays. Personne n''y a d''ailleurs rien trouvé à redire, même quand il s''agissait de lieux de conservation privés. D''autre part, ma mission portait sur la gestion et la conservation des documents anciens : nul besoin, donc, de me faire communiquer tel ou tel document supposément « secret » ni de le scanner.

Enfin, lors de mes visites de dépôts d''archives ou de réserves de livres j''étais, c''est la règle, toujours accompagné d''un ou de plusieurs conservateurs.

Mon « doctorat » maintenant. J''aimerais qu''on me montre un document où je m''attribue le titre de « docteur » : dans aucun de mes CV, sur aucun de mes sites web, cela n''est mentionné.

Pour qui connaît le système à deux vitesses de l''enseignement supérieur français, ce n''est d''ailleurs pas vraiment étonnant. J''ai accompli mes études à l''École nationale des Chartes, l''une des grandes écoles d''administration françaises, prestigieux organisme d''enseignement et de recherche, avec un concours d''entrée particulièrement sélectif et qui forme les cadres dirigeants des services de conservation du pays : archives, bibliothèques, musées et inventaire.

Quant à ma qualité d''historien, qui m''est tant contestée, il suffit de savoir que la préparation puis l''enseignement de haut niveau dispensé à l''École des chartes (www.enc-sorbonne.fr) sont essentiellement d''histoire et d''histoire de l''Art, de méthodes de recherches en histoire et de langues anciennes.

Vous dites que les allégations de Catherine Boudet ne reposent sur rien, mais pourtant le bureau du Premier ministre, par la voix du conseiller Alain Gordon Gentil, affirme que vous avez fait usage de "faux documents"...

Ayant été fonctionnaire dans l''administration française, je mets un point d''honneur à comprendre et respecter les procédures. Celles de la CJV sont draconiennes car elle traite de sujets sensibles : tous les documents écrits à l''occasion de ma mission ont donc été visés par les personnes en charge de la CJV, qui en détient un double dans ses archives.

Je n''ai reçu à ce jour aucune remarque de la part de la CJV,sur la teneur de ces documents. Il en va de même des fonctionnaires en exercice au Cabinet du Premier ministre.

D''ailleurs, la police s''est rendue à la CJV,et a pu constater que tous mes saufs-conduits étaient parfaitement légitimes. C''est, selon moi, une des raisons immédiates de l''arrestation puis de l’inculpation de Catherine Boudet : on ne s''amuse pas à mentir sur des sujets aussi sensibles et l''on prend des risques démesurés quand on le fait.

Selon vous que cherchait-on, en vous faisant ce procès ?

Le but était de m''intimider et de m''empêcher d''accomplir ma mission sur la conservation des documents anciens à Maurice. Il y a des intérêts en jeu – dont je ne peux guère parler maintenant, étant tenu à la confidentialité – mais que l''on connaîtra mieux à la lecture du rapport final de la CJV,, auquel ma contribution sera intégrée. J''ai la conviction qu''il faudrait rendre plus efficaces les procédures et les organismes nationaux de conservation, donner à ces derniers plus de moyens matériels et humains et surtout former sur le long terme toute la population mauricienne à apprécier son bien commun et son histoire. Le rapport que j''ai écrit pour la CJV,va dans ce sens, et toute l''action que je mène au sein de Patrimoine en Partage (www.patrimoine-en-partage.com) depuis deux ans également.

Comptez-vous réclamer réparation pour les torts et préjudices causés à votre personne et à votre entourage ?

Mais oui, évidemment. J''ai pour habitude d''aller jusqu''au bout des choses. À mon retour à Maurice, début juin, nous y verrons beaucoup plus clair.

Interview réalisée par Nad Sivaramen


Les dernières reactions

Affaire tres mysterieuse & contradictoire..personne n`est saint ici bas

Par:-Johann Wiehe May 06, 2011

Oui, la culture du flou et les batons dans les roues sont monnaies courantes ici.. et les fonds de la verite eclatent rarement au grand jour ici, la majorite preferant la culture de l`etouffement d`affaires + les protections occultes + la memoire courte... esperons qu`un jour on y verra plus clair s`il n`y a pas pliage de bagages dans ce cas.

Clear as mud

Par:-Emiliano Z May 06, 2011

“… sa tentative d''impliquer le cabinet du Premier ministre de Maurice” explains why police were so keen to grab Boudet. But some things just don’t add up. Why would four people suddenly decide to make up stories about the well-travelled Sinclair? Why did police dimiss their complaints so quickly? Why were senior police all over this petty affair? I smell a rat.

Les attaques indûes dontre vous

Par:-Chazan Suzanne May 06, 2011

Je vous félicite d''avoir eu le courage de mettre à plat avec des moyens juridiques l''objet de la calomnie à votre encontre. Je serais intéressée à recevoir votre rapport final à la CJV si celui-ci peut être rendu public. Bonne chance dans vos entreprises. Suzanne Chazan-Gillig

STEPHANE SINCLAIR

Par:-BRUN Marie Claude May 06, 2011

J''ai pu apprécier la qualité du travail de recherche de Stéphane Sinclair à l''occasion du livre de Johann Wiehe SUCRE ET RAFFINEMENT et j''espère que cette campagne de diffamation ne lui portera pas préjudice.

Enfin l''autre version

Par:-Jean Francois Lagesse May 05, 2011

Je me disais bien qu''il y avait autre chose derriere ces allegations de la journaliste. Le travail que fait l''expert de la commission est difficile, et c''est clair que plusieurs vont tenter de le descendre. On aime le statu quo, et on attaque ceux qui viennent changer ce cours des choses. Courage Stephane, plusieurs autres expats ont dû plier bagages à cause des réalités locales.

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