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Sydney Adelson : « Nous passerons par la formation pour faire de l’intégration sociale »
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Sydney Adelson : « Nous passerons par la formation pour faire de l’intégration sociale »

Le projet de Faucon Flacq Sporting Club de passer de simple équipe de football à club multisports apporte un nouveau souffle au sport dans la région est. Enfin, pourrait-on dire. Car il devrait permettre à la régionalisation de devenir effective et d’être vécue au quotidien dans plusieurs disciplines. Sydney Adelson, président du club, lève le voile sur un projet qu’il caressait depuis plus de quinze ans.
? Faucon Flacq Sporting Club(FFSC) était connu jusqu’ici comme une équipe de football. Quand est-ce que l’idée d’y introduire une vraie notion de club, en y intégrant des sections volley-ball, basket-ball et athlétisme, a-t-elle germé ?
Au fait, depuis plus de quinze ans, l’idée d’un regroupement des forces sportives de la région de l’Est me trotte dans la tête, mais les circonstances ne s’y prêtèrent pas. Ayant travaillé 33 ans dans cette région, j’ai côtoyé presque toutes les figures sportives, dirigeants et joueurs, que ce soit en football, volley-ball, athlétisme, pétanque et cyclisme. En 2008, Nicolas Boullé, qui habite à Flacq, membre de l’équipe de football de FFSC, m’a approché et a réveillé en moi mon rêve. Il avait pris contact avec Christian Marot, administrateur de Deep-River-Beau-Champ (DRBC), et nous tenons une première réunion au bureau de ce dernier en présence de Bardwaz Mungur, président de FFSC, Mario Antonio et Jay Hurry, tous deux « Personnel Manager » et PRO de DRBC et de Constance SE respectivement. Nous partageons notre point de vue commun et nous décidons de faire avancer le projet de club avec l’ouverture à d’autres disciplines sportives.
? Dans la pratique, comment s’est opéré cet amalgame ? Comment se vivra-t-il dans le concret, au jour le jour ?
Regrouper des équipes de football, volley-ball ou des groupes de jeunes pratiquant la boxe et le basket-ball était facile grâce aux dirigeants tels que Christian Marot, Bardwaz Mungur, Nicolas Boullé, Jay Hurry, Soogam Ramkelawan, Mario Antonio, Elton Georges et Dominique Rosalba. Ils ont compris que la création d’un club ayant pour objectif surtout le développement du sport dans l’Est ne peut faire que du bien à la jeunesse flacquoise.
L’équipe de football du FFSC, dirigée par Bardwaz Mungur, évoluait en deuxième division en 2008. Elle a repris sa place chez l’élite, fidèle à notre objectif, mais il y a encore du progrès à faire. En 2008, l’équipe de Camp-Ithier Volley-Ball Club, dont le président est Soogam Ramkelawan, était sixième au classement final du championnat de première division nationale. En 2009, quand elle s’associe au FFSC, nous avions fixé comme objectif de jouer les premiers rôles dans cette discipline. Nous avons recruté des joueurs qui avaient le potentiel et qui étaient à la hauteur de notre objectif. Le résultat est là, elle remportera la Mauritius Volley Ball Cup, le championnat national. Elle a été sacrée championne de la zone 7 et se classa quatrième en Coupe d’Afrique.
En tête du classement après sept rencontres dans le championnat 2010, nos volleyeurs et l’encadrement nous donnent beaucoup d’espoir. Je souhaite de tout coeur que cette équipe réédite sa performance de 2009. Elle est connue officiellement comme Faucon Flacq Camp-Ithier Volley Ball Club. Le travail de création du club continue. La boxe et le basket-ball, sous la responsabilité de Dominique Rosalba et d’Elton Georges respectivement, se sont intégrés avec beaucoup de facilité. Nos jeunes font très bien dans leurs catégories respectives, aux Jeux de l’Espoir, dans les deux disciplines. Sans jeu de mots, il y a de gros espoirs.
? Quelle est l’histoire de Faucon Flacq Sporting Club sur le plan purement footballistique ?
Dans la tradition des petits villages ou des agglomérations des villes où la proximité des habitants facilita le regroupement au niveau sportif, une équipe de football était appelée « club ». Il y avait un local ou un lieu pour se réunir, une amitié, l’amour du football, la volonté et des volontaires. Se souvient-on encore des équipes régionales de football telles que Bolton de Souillac, La Ville Noire et Mahebourg United dans le Sud, de Blackpool, Peacock de St Georges et encore de Leeds à Plaisance, Rose-Hill, de Cité Père Laval de Quatre-Bornes, et l’équipe de Père Laval, de Vallijee Citizen et Cassis Sporting, Roche Bois Boys Scouts à Port-Louis, celle d’Abraham Lincoln de Moka- Saint-Pierre, des Young Tigers de Fond du Sac ? Il y a eu aussi l’équipe de Chelsea de FUEL Youth au Happy Village Union Flacq, le Red Spartak et Faucon
Noir de Poste-de-Flacq ainsi que Bel Air United. Ces équipes ont évolué à un moment donné en troisième, deuxième et première division nationale. Faucon Noir fut fondé en 1980 dans le village de pêcheurs de Poste-de-Flacq et avait pour membres fondateurs des pêcheurs et des travailleurs de la sucrerie de Constance La Gaieté. A cette époque, l’équipe s’entraînait sur un terrain jouxtant l’église de Saint-Maurice à Poste-de- Flacq. Depuis sa création, les dirigeants, avec les moyens du bord, ont démontré qu’ils étaient un groupe exemplaire avec la volonté de forger des bases solides. L’équipe changea de nom pour devenir Faucon Flacq Sporting Club vers 1994. La sucrerie de Constance La Gaieté et la United Basalt Products Ltd (UBP) sont les gros sponsors. La sucrerie de Constance avait mis son terrain de football et des locaux administratifs à la disposition de l’équipe. UBP lui accorde un soutien financier et lui a fait don d’un véhicule. Il ne faut pas oublier que cette équipe a déjà remporté La Coupe de la République en 2004 et a été deux fois finaliste de la MFA Cup.
? Qu’est-ce qui explique, selon vous, son parcours en dents de scie ?
Le niveau du football national n’est pas motivant pour aucun joueur digne de ce nom. L’amateurisme de la fédération contribue aussi à cette démotivation. Au niveau interne, il y a aussi des difficultés, les joueurs font des métiers durs et doivent subvenir aux besoins de leurs familles. Le football ne nourrit pas son homme. Concilier entraînement, rencontres et travail n’est pas chose facile. Le terrain d’entraînement n’étant pas éclairé, l’entraîneur a des grosses difficultés à faire des entraînements dosés et selon un plan. L’absentéisme au niveau des joueurs influence aussi les résultats.
Jouer devant ses dirigeants et ceux de son adversaire avec une poignée de spectateurs n’est pas motivant non plus. Il y a aussi la mentalité de certains joueurs qui n’aide pas à l’évolution du football. Certains sont mercantiles et les dirigeants n’arrivent pas à maîtriser ce phénomène. Je pense qu’il faut professionnaliser ce sport avec des bases légales solides et rigoureuses. Nous ne pouvons pas continuer à accorder des « allowances » à des joueurs avec l’argent public et privé sans que les joueurs ne soient redevables. Il y a beaucoup de jeunes talents dans le pays mais ils doivent avoir des « role models ».
Je discutais tout récemment avec un joueur de première division. Il me disait qu’il peut se permettre de ne pas aller à tous les entraînements de son équipe car il n’y a pas de compétition entre les joueurs. Ils sont payés de toute façon, même en partie.
Les équipes sont « result oriented » avec des plans à court terme. Je ne blâme pas les encadrants. Je comprends qu’il faut avoir des structures, des moyens financiers, un encadrement formé et l’infrastructure appropriée pour bien faire les choses. Je n’invente pas la roue. La réussite est associée aux clubs qui disposent de ces facilités.
? Mais qu’à cela ne tienne, il y a eu malgré tout une volonté de survivre et de poursuivre l’aventure coûte que coûte…
Oui, la persévérance est une des qualités d’un bon sportif. Je sens que cette fièvre de bien faire est présente dans la tête de tous ceux concernés par l’esprit FFSC. Mais il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs, il y a du chemin à faire « ensemble ». Ce n’est qu’en regardant dans la même direction que nous parviendrons à atteindre nos objectifs, le principal étant notre devise : « Un Club au service d’une Jeunesse ».
Les structures de formation pour les disciplines choisies par le club seront des moyens de motivation pour les jeunes de la région. Nous avons une vision à long terme : nous passerons par la formation pour faire de l’intégration sociale le résultat de notre mission. Il y a actuellement une quarantaine de jeunes boxeurs qui sont dans les catégories poussins, minimes, cadets et juniors et qui sont encadrés par un Dominique Rosalba débordant d’enthousiasme. Ils s’entraînent trois fois par semaine au Centre Social d’Argy. Certains résultats dans les compétitions nationales sont très satisfaisants.
Nous avons le champion national junior 2010 des 54 kg, Jean-Luc Rosalba. Il participera aux Jeux de la CJSOI en décembre prochain aux Seychelles. Il y a aussi Rachelle Zama, la meilleure boxeuse minime, catégorie 48 kg, qui a participé aux Jeux de l’Espoir cette année. Il y a eu d’autres médaillés à ces Jeux. L’équipe de basket-ball est composée de jeunes qui sont aussi prometteurs. Ils n’ont pas mal fait aux Jeux de l’Espoir 2010. Elton Georges, secrétaire et membre du comité exécutif de FFSC, et son équipe misent sur la jeunesse de Flacq. L’équipe de basket-ball envisage une première participation au championnat de deuxième division cette année. Ils sont entraînés par AldoValet. L’école de volley-ball, sous la direction de Soogam Ramklelawan, et son équipe technique sont déjà en verve pour la formation d’une quinzaine de garçons, dans un premier temps, en attendant de créer une structure filles, plus difficile, mais réalisable. La formation des jeunes footballeurs se fait actuellement sous la tutelle du ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS) en collaboration avec la MFA et la Fondation. Nous envisageons d’avoir notre propre structure.
? Quand on regarde de plus près les développements qui ont cours à Flacq, il faut reconnaître qu’il a de plus en plus les allures d’une ville moderne. Il est temps que ce développement bifurque par le sport…
Je ne dirai pas une ville moderne mais un développement très peu structuré et peu visionnaire. Je pense qu’il y a de bonnes intentions. La participation de tous les acteurs socio-économiques devrait être prise en considération pour dégager un plan directeur. Ce qui pourrait faire de cette région du pays une belle ville.
? Avec l’annonce de la création d’une piscine bientôt à Camp-Garreau, on peut se permettre de voir le sport autrement quand on sait qu’il existe déjà un stade où peuvent se pratiquer le football et l’athlétisme…
Une piscine à Flacq, on en parle depuis plus de dix ans, mais il faut quatre piscines dans la région de Flacq. Une à Médine-Camp de Masque, pour couvrir la région de Saint-Julien d’Hotman, Quartier-Militaire, Montagne-Blanche, Bel-Etang et Sébastopol. Une autre à Brisée-Verdière, pour couvrir la région de Pont-Praslin, Mare d’Australia, Lallmatie, Saint-Julien, Rich Fund, Belvédère. Une troisième à Camp-Garreau pour couvrir Queen Victoria, Bonne-Mère, Boulet- Rouge et Boulet-Blanc, Bramsthan, Argy Camp-Ythier, Camp-de-Gersigny, Centre- de-Flacq, Poste-de-Flacq, Belle-Mare, Quatre-Cocos et les environs. Une quatrième près de Bel-Air pour les régions de Kewal Nagar, d’Olivia, Bel-Air-Clémencia, Caroline, Beau-Champ et Trou d’Eau Douce, Palmar. Je dois y ajouter quatre terrains de football, aux normes, autant de gymnases, de centres de boxe, de judo etc...
? Il manque un gymnase moderne à Flacq où pourraient se pratiquer les sports en salle…
Le volley-ball, le basket-ball, la boxe, le judo, la lutte, le tennis de table, le badminton sont les disciplines qui souffrent du manque d’espace d’entraînement et de compétition dans toutes les régions de l’île. C’est un vaste programme pour le MJS. Il nous faut des salles polyvalentes qui seraient utilisées par différents groupes pour la culture comme pour le sport. Il n’y a pas que les infrastructures, il faut former les jeunes encadrants, et des administrateurs. Il y a dans le domaine sportif, des jeunes qui pourraient faire carrière.
? Pour que naissent et croissent le sentiment d’appartenance et l’identité régionale tant souhaités depuis de nombreuses années, il faut une régionalisation qui se vit dans la pratique et non en théorie, ne le pensez-vous pas ?
Vous savez, demander à un habitant de Mahébourg d’aller habiter à Rose-Hill pose un certain problème d’adaptation. La régionalisation du football a malheureusement commencé de cette façon, ce qui fait que nous avons aujourd’hui la disparition de Sunrise Flacq United. Nous devons faire attention : il faut laisser le temps faire son oeuvre. La régionalisation doit d’abord venir des quartiers, des villages et des villes.
Nous avons, nous-mêmes, au FFSC, eu à faire face à une certaine attitude par rapport à l’identité et l’appartenance régionales.
Je comprends très bien que les habitants et supporteurs de Camp-Ithier Volley Ball Club prennent du temps pour s’identifier à la région de Flacq et avoir comme club Faucon Flacq Sporting Club. C’est normal et plus confortable qu’ils s’identifient au village Camp-Ithier. La régionalisation du sport est un phénomène vécu par des habitants de différentes villes du monde, mais je pense qu’à Maurice il y a plusieurs facteurs sociétaux et culturels qu’il faut considérer.
? Ce pas en avant a malheureusement un coût. FUEL injecte Rs 1 million dans les projets de Faucon Flacq Sporting Club. Cette somme vous permettra-t-elle d’atteindre vos objectifs ?
Oui, tout projet a un coût et c’est normal, mais les coûts doivent être raisonnables et justifiés. Il faut se rappeler que ce don est autorisé par le CSR Committee du ministère des Finances seulement si une entreprise fait des profits. Nous sommes conscients que toutes les années pourraient ne pas être similaires. Cela, tous ceux qui ont bénéficié d’un don CSR doivent le savoir, don de leur Corporate Social Responsibility Fund. Ce don nous permettra d’éclairer le terrain de football que FUEL va nous louer et soulager les boxeurs et basketteurs pour l’année courante. Nous sommes reconnaissants envers les sponsors suivants : CIEL Group, Constance Accademy, DVS Transport, Easterlies, FUEL, Jianvi, Top Shop, UBP Co LTD, WAY de Flacq et La Compagnie 361.
? Le sport parviendra-t-il, selon vous, à se rebâtir une image et rétablir la confiance sans lesquelles il ne peut prétendre obtenir le soutien d’éventuels sponsors ?
Vous voulez me dire que l’image actuelle du sport est mauvaise et que les sponsors pourraient ne pas soutenir le mouvement sportif ? L’image est créée, maintenue et communiquée tout au long des relations entre les parties concernées. Nous avons des exemples où les entreprises n’hésitent pas à faire du sponsoring. Il faut que la confiance entre l’entreprise et l’athlète ou le club existe et se maintienne. Si nous prenons le cas des Buckland, Milazar, Sunee, Chimier, qui ont tout fait pour maintenir la relation par rapport à l’image, leur image, les sponsors ont répondu positivement. Ici l’image a plusieurs composantes : le rayonnement de l’individu sur la discipline, son attitude dans le public et en privé, ses résultats sportifs, sa relation avec sa fédération, sa relation avec son sponsor et même sa relation avec les médias. L’image n’est pas un phénomène abstrait, plaqué, mais bien la représentation d’un état de fait. Elle est mesurée ou appréciée dans le temps, à un moment précis.
Le monde sportif est composé de plusieurs « stakeholders » : le MJS, les dirigeants des fédérations, les dirigeants des équipes ou des clubs, les arbitres, juges, les sportifs, les médias et le public en général. Ils sont tous interactifs et influencent l’image d’une discipline ou du sport. Nous pouvons l’analyser sous plusieurs angles, selon le cas. Dans celui qui nous concerne, ce sont les parrains qui analyseront l’image du monde sportif et qui auront le dernier mot : sponsoriser ou pas ! L’image aura définitivement une influence sur la décision des parrains.
Propos recueillis par Robert D’Argent
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