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Questions à...
Ashok Subron : «Ma porte est ouverte aux syndicalistes»
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Questions à...
Ashok Subron : «Ma porte est ouverte aux syndicalistes»

🔵 Vous affirmez que la mesure de soutien aux revenus soulagera de nombreuses personnes, mais comment garantissez-vous que les plus vulnérables – femmes au foyer et personnes inaptes au travail – y auront réellement accès sans se heurter à des démarches administratives complexes ?
L’Income Support proposé par le gouvernement apportera un réel soulagement à de nombreuses personnes. En effet, à compter du 1er septembre 2025, environ 17 000 personnes atteindront l’âge de 60 ans et auraient été éligibles à la Basic Retirement Pension (BRP) avant l’annonce de la réforme. Parmi elles, 8 737 personnes seront éligibles à l’Income Support, soit 51,6 % de cette tranche de la population. Au cours des cinq prochaines années, 46,5 % des personnes atteignant 60 ans seront éligibles à cette mesure. Il convient de souligner que tous les bénéficiaires actuels de l’Invalid Basic Pension (BIP), soit environ 1 400 personnes âgées de 59 à 60 ans, ainsi que ceux percevant la Basic Widow’s Pension (BWP), soit plus de 3 182 personnes, viendront s’ajouter à ce chiffre de 51,6 %.
Selon les données fournies par le ministère des Finances et la Mauritius Revenue Authority, plus des deux tiers des Mauriciens n’exercent pas d’activité professionnelle ou ont un revenu inférieur à Rs 10 000 pour une personne seule ou Rs 20 000 pour un couple. L’Income Support a été conçu précisément pour couvrir les personnes les plus pauvres et vulnérables de la société – femmes au foyer, personnes inaptes au travail et selfemployed. Par ailleurs, si deux personnes dans un couple sont éligibles, le fait que l’un perçoive l’Income Support ne sera pas pris en compte dans le calcul du seuil de Rs 20000 , permettant ainsi à l’autre conjoint de bénéficier de cette aide. Il en va de même si l’un des conjoints touche la BRP ou la BIP : ce montant sera considéré comme revenu nul dans l’évaluation des revenus du couple.
Ainsi, si un conjoint travaille à temps partiel avec un revenu de Rs 12 000 et que l’autre est sans revenu, ce dernier pourra bénéficier de l’Income Support. Un couple dont l’un perçoit la BRP (Rs 15 000) et l’autre l’Income Support (Rs 10 000) aura un revenu cumulé de Rs 25 000. Le même principe s’applique dans le cas d’un couple combinant la BIP et l’Income Support. Enfin, aucune démarche administrative complexe ne sera exigée. Une demande unique (one-time application).
🔵 Pourquoi avoir choisi un montant fixe de Rs 10 000 pour tous les bénéficiaires alors que les besoins varient considérablement d’une personne à l’autre selon leur situation familiale, médicale ou géographique ?
Le montant proposé représente le maximum que permettent actuellement les finances publiques. Il a été défini dans le souci de rendre l’Income Support accessible à un plus grand nombre, tout en maintenant un juste équilibre entre le montant de l’aide et le nombre de bénéficiaires. Nous avons également tenu compte de certaines situations médicales spécifiques. Par conséquent, la BIP continuera d’être versée jusqu’à 65 ans aux personnes concernées. Cela dit, la mise en oeuvre d’un système à paliers (tiered system) n’est pas sans difficulté. Il demande une gestion rigoureuse et des moyens pour garantir que chaque bénéficiaire reçoive l’aide qui lui correspond. Cela suppose aussi une bonne coordination entre les services concernés et une mobilisation de ressources humaines et techniques.
🔵 La réforme des pensions pour les personnes en situation de handicap est en préparation. Pouvez-vous nous en dire plus sur les améliorations concrètes envisagées et sur les délais de mise en œuvre ?
Avec la réforme des pensions et les problèmes soulevés par de nombreuses personnes, nous préparions déjà une réforme de la pension aux personnes en situation de handicap. La proposition sera faite très rapidement et bientôt soumise au Cabinet. La réforme touchera plusieurs aspects. Premièrement, elle vise à changer le Medical Board, très décrié. Ce board sera transformé en un Assessment Panel qui prendra en compte non seulement des critères médicaux, mais aussi sociaux et fonctionnels, répartis à 50 % pour le médical, et 50 % pour le social et fonctionnel (par exemple, la capacité à marcher ou à prendre les transports). Il n’y aura pas uniquement des médecins, mais aussi des travailleurs sociaux pour l’évaluation sociale. Nous prévoyons des dossiers médicaux mieux adaptés pour ces évaluations. Dans ce panel, des représentants d’associations qui défendent les personnes en situation de handicap seront également présents. Moins de personnes devront se déplacer car une partie des évaluations pourra se faire à domicile.
Deuxièmement, l’évaluation sera faite non seulement pour la BIP, mais aussi pour différents degrés d’invalidité. Nous prévoyons une échelle avec différents niveaux d’évaluation. Quand une personne fait une demande pour la BIP ou d’autres prestations liées au handicap (allocation de soins, carte d’invalidité, etc.), cette évaluation sera prise en compte.
Troisièmement, concernant l’employabilité, il y aura la possibilité de réorganiser et de réformer le système de formation pour les personnes handicapées mais capables de travailler, afin de les rendre autonomes et indépendantes. L’évaluation sera graduée et les paiements des prestations seront aussi gradués en fonction du degré d’invalidité. Avec ce système, une évaluation ne sera plus valable seulement pour un an, mais sa durée dépendra des cas. Ce modèle all-inclusive vise à humaniser le système, en le rendant plus rationnel et socialement acceptable. J’ai d’ailleurs abordé ce sujet dans un statement à l’Assemblée nationale hier.
🔵 La classe syndicale vous a un peu dans le collimateur depuis quelque temps. Elle vous reproche de n’être pas du côté de la classe travailleur. Pensez-vous qu’un dialogue est envisageable avec elle ?
Je suis issue de la classe ouvrière. J’ai consacré plus de 40 ans de ma vie à défendre les intérêts de la classe ouvrière. Aujourd’hui, je continue ce combat dans un autre espace – au sein de l’État et du gouvernement. Cependant, je fais aussi partie d’un gouvernement où le parti Rezistans ek Alternativ compte seulement trois députés sur 60, un ministre sur 24 et un junior minister sur dix. Diriger un pays où coexistent des intérêts de classes différents, souvent conflictuels, n’est pas une tâche simple. Mon parti et moi-même sommes au gouvernement pour assurer l’avenir de nos enfants et des générations à venir. Nous sommes également là pour concrétiser notre accord sur les réformes constitutionnelles.
Après la présentation du Budget, ce sont quelques syndicalistes proches de l’ancien régime qui ont systématiquement refusé tout dialogue avec le gouvernement. Je dis maintenant : s’il y a des centrales syndicales qui souhaitent me rencontrer pour discuter, ma porte est ouverte, n’importe quel jour, à n’importe quelle heure. Je tiens aussi à préciser deux points concernant les critiques et commentaires à mon égard. Le premier concerne ce qu’ils appellent le «means test». Le gouvernement ne pratique pas de means test comme avant. Ce que fait le gouvernement, c’est établir des critères d’éligibilité à une Income Allowance, de la même manière qu’il existe des critères d’éligibilité pour l’impôt sur le revenu ou la Contribution sociale généralisée (CSG) Allowance. C’est le même principe qui est adopté.
Certains syndicalistes, lorsque l’ex-ministre Padayachy avait mis en place ces critères d’éligibilité, trouvaient cela acceptable. Maintenant, quand ce gouvernement réagit aux healthy concerns du peuple après le Budget et propose un critère d’éligibilité pour déterminer un revenu, ils râlent, sans arguments valables. Aujourd’hui, c’est un changement dans la manière dont la pension de vieillesse est versée – prestation qui reste un acquis important des luttes syndicales et sociales de 2008. Nous réformons la pension en passant de 60 à 65 ans. Il faut garder à l’esprit que, lorsqu’elle a été instaurée en 1958, l’espérance de vie était entre 55 et 58 ans. Aujourd’hui, l’espérance de vie moyenne est de 74 ans. L’universalité de la pension de vieillesse s’applique à tous les pensionnés au-delà de 65 ans.
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