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L’erreur de Madame la Speaker peut être corrigée

26 octobre 2017, 06:52

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J’appartiens à une génération d’ex-politiciens MMM qui auraient obéi à un ordre d’expulsion comme celui – pourtant injuste et en violation de la pratique parlementaire – pris par Madame la Speaker Maya Hanoomanjee à l’encontre du leader de l’opposition et du PMSD, Xavier-Luc Duval. Il faut comprendre la colère de ce dernier face à une situation bloquée par l’erreur commise à son égard, si je m’en tiens aux comptes rendus des séances questions-réponses entre le leader de l’opposition Jeremy Corbyn et la Première ministre Theresa May, lesquels comptes rendus en vidéo sont disponibles sur le site Internet de la House of Commons et reproduits sur YouTube.

Madame Hanoomanjee a totalement interdit tout préambule, toute critique du gouvernement, ou phrases introductoires aux questions posées par le leader de l’opposition et les autres parlementaires de l’opposition lors de la Private Notice Question, tant à l’époque où Paul Bérenger était leader de l’opposition qu’aujourd’hui, alors que XLD lui a succédé à ces fonctions constitutionnelles (sans lesquelles le Parlement n’existerait pas selon un jugement de la Cour suprême en 1982).

Or, lorsqu’on regarde la séance des questions au Premier ministre britannique sur le site de la House of Commons, on entend le leader de l’opposition et les autres députés faire une remarque, une introduction ou une critique qui mène ensuite à la question. Interdire cela, c’est interdire le contexte dans lequel la question est posée. Je prie les lecteurs de l’express de suivre ici un échange au moment des questions au Premier ministre sur le site de la House of Commons.

Le lecteur n’a qu’à copier ce lien et l’insérer dans son moteur de recherche pour entendre ce débat direct entre leader de l’opposition et la Première ministre et entendre aussi les autres questions. Une de ces séances directement filmées est encore plus révélatrice et reprise sur YouTube. Ecoutez surtout la question précédée d’une longue critique du gouvernement par Jeremy Corbyn, avant de poser sa première question supplémentaire au Premier ministre.

Par ailleurs, il y a des points de droit ou points of order qui s’appliquent. Le premier article, article 1 des Standing Orders à Maurice, rend obligatoire le recours du Parlement mauricien aux Standing Orders de la House of Commons en cas de doute. La pratique à la House of Commons pour les PNQ (Private Notice Questions) était l’interdiction par le Speaker des réponses trop longues par les ministres. En 2002, la PNQ fut remplacée à la House of Commons par les Urgent Questions et les Prime Minister’s Questions ou PMQ furent alors utilisées par le leader de l’opposition pour questionner directement le Premier ministre.

Lors des Urgent Questions, les parlementaires sont tous autorisés à faire venir des ministres pour répondre à des questions acceptées comme urgentes par les Standing Orders. Ce que rappelle la BBC sur son site : “Urgent Questions - described in the Commons as Private Notice Questions until 2002 - can be used by parliamentarians to ask a government minister to come to the House and make a statement on an important issue at short notice.”

Enfin, les Speakers peuvent se tromper. La preuve : Mme Hanoomanjee avait poussé une députée indépendante au walk-out en solitaire en 2016, interrompant son discours au moment où elle dénonçait les USA et la Grande Bretagne pour environ une douzaine de violations du droit international aux Chagos. La Speaker faisait fi de l’article 56 des Standing Orders en hurlant et répétant qu’un député ne peut parler en deuxième lecture que des articles spécifiques d’un projet de loi. C’était faux car l’article 56 des Standing Orders dit qu’en deuxième lecture on discute des «merits» et des «principles» du projet de loi. C’est au Committee Stage que les clauses sont spécifiquement discutées.

La plupart des parlementaires du gouvernement manquent de maturité et de connaissances des Standing Orders, ce qui explique leur soutien aveugle à cette bêtise alors que la Speaker, plus intelligente, avait réalisé son erreur et avait appelé la députée indépendante Danielle Selvon* et lui avait offert le prochain Ajournment pour se lever et prendre autant de temps qu’elle voulait pour prononcer… le même discours qu’elle avait interdit. Et c’était tout à son honneur en tant que Speaker. En plus, SAJ, alors PM et leader of the House, a prononcé sur le même thème des discours encore plus virulents sur les manquements des Anglo-Américains aux Chagos !

Je pense vraiment que l’expulsion de Xavier Duval est une violation, peut-être involontaire, des règles démocratiques telles que pratiquées à Westminster et qui nous sont imposées par nos propres Standing Orders dans l’article 1. Je fais ici un appel à la Speaker, avec tout le respect que je lui porte, de revoir, eu égard à ce que l’histoire retiendra de son mandat, sa décision et d’annuler sa décision d’interdiction contre le leader du PMSD et de l’opposition.

Sydney Selvon

*Au nom de l’éthique relative au conflit d’intérêts, je décline ici, pour ceux qui ne le sauraient pas, le fait que je me trouve être l’époux et le conseiller médias de la députée.

 

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