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Agro-industrie

Élevage de porcs, un secteur en crise hérité du passé, selon le ministre Boolell

21 avril 2025, 13:00

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Élevage de porcs, un secteur en crise hérité du passé, selon le ministre Boolell

À l’Assemblée nationale, le 8 avril, le député Kaviraj Rookny a interpellé le ministre de l’Agro-industrie, le Dr Arvin Boolell, sur la gestion des exploitations porcines de St Martin. Cette interpellation a mis en lumière plusieurs lacunes structurelles et environnementales dans ce secteur névralgique de l’élevage à Maurice.

Dans sa réponse, le ministre Boolell a révélé que les exploitations de St Martin sont divisées en deux phases. La Phase I, mise en place depuis 1983, compte 44 éleveurs enregistrés et qui s’activent sur une superficie de dix arpents. Pour ce qui est de la Phase II, 136 éleveurs bénéficient de baux sur une surface de 26,17 arpents. Toutefois, le ministre Boolell a soulevé un point préoccupant : certains bénéficiaires de terrain auraient illégalement sous-loué leurs parcelles, une situation qui fait actuellement l’objet d’une enquête ministérielle. Des sanctions, voire des poursuites judiciaires, pourraient être envisagées contre les contrevenants.

Au niveau de la production, les chiffres sont révélateurs du sous-rendement du secteur. La Phase I abrite actuellement 3 824 porcs, pour une production estimée à 255 tonnes alors que le potentiel est évalué à 345 tonnes, soit une exploitation à 75 % de sa capacité. La Phase II, plus vaste et plus récente, affiche une situation plus critique : les 10 027 porcs recensés ne donnent que 609 tonnes de production, loin derrière l’objectif optimal de 1 740 tonnes – un rendement de seulement 35 %. Ce retard est, selon le ministre, la conséquence directe d’un manque d’investissement et d’encadrement sur la dernière décennie, sous l’ancien régime.

Autre élément alarmant : la vétusté des infrastructures. Si la Phase I dispose encore d’un réseau de traitement des déchets, bien que dépassée, la Phase II fonctionne sans aucun système centralisé d’assainissement. Résultat : une gestion anarchique des déchets, des odeurs nauséabondes, et un ruissellement de déjections animales, qui se déversent sur les routes et dans les drains d’eaux pluviales, menaçant la santé publique et l’environnement.

Le ministre a également pointé du doigt un facteur clé de la faiblesse du secteur : l’absence de renouvellement génétique depuis 2013. Cette stagnation a favorisé la consanguinité, réduisant la productivité et augmentant les risques sanitaires. L'alimentation à base de restes alimentaires (swill feeding) reste encore trop répandue, malgré ses risques avérés.

Face à ce constat accablant, plusieurs mesures correctives ont été prises. Une réunion interministérielle s’est tenue le 27 mars, marquant le début d’un plan de restructuration à l’échelle nationale. Parmi les actions engagées : la collecte plus régulière des déchets, la promotion des coopératives d’éleveurs, des formations par le Food and Agricultural Research and Extension Institute (FAREI) sur les bonnes pratiques d’élevage, et surtout, la suspension des nouvelles demandes de terrains pour la production porcine.

Une initiative a également été lancée pour la collecte et la transformation des déchets porcins à St Martin et Bassin Requin. Toutefois, seuls deux prestataires se sont manifestés alors que les règlements en exigent trois pour pouvoir enclencher la procédure d’appel d’offres. Une nouvelle procédure sera donc relancée, avec des termes de référence élargis.

Sur le plan des inspections, le ministre a assuré qu’un suivi régulier est effectué par les fonctionnaires du FAREI, avec des visites hebdomadaires, ainsi que des inspections conjointes trimestrielles avec les autres instances concernées. En 2024 et début 2025, neuf inspections de ce type ont été effectuées.

Enfin, de 2020 à 2025, 201 demandes de terrain ont été enregistrées mais seulement 65 ont été approuvées. Et 117 ont été rejetées pour non-viabilité ou manque de disponibilité tandis que 19 sont restées sans suite en raison d’une non-conformité environnementale.

En conclusion, le ministre Boolell a dénoncé une décennie d’inaction et de mauvaise gouvernance et a promis de remettre de l’ordre dans ce secteur négligé. Une relance durable de l’élevage porcin passe désormais par la modernisation des infrastructures, le respect des normes environnementales et une gouvernance plus rigoureuse.

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