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Navin Ramgoolam : «Nous posons les fondations d’une véritable guerre contre les crimes financiers»

16 juillet 2025, 06:00

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Navin Ramgoolam : «Nous posons les fondations d’une véritable guerre contre les crimes financiers»

Le Premier ministre (PM), Navin Ramgoolam, a défendu le Financial Crimes Commission (Amendment) Bill comme une réforme structurante pour la république de Maurice. Selon lui, ce projet de loi marque un tournant fondamental dans la lutte contre la criminalité financière, la corruption et le blanchiment d’argent, en préparant le terrain à la création d’une National Crime Agency. Il a rappelé que cette réforme législative répond directement à une priorité affirmée dans le programme gouvernemental 2025-2029 : celle de restaurer l’État de droit, de renforcer les institutions et de lutter efficacement contre les infractions économiques.

Le PM a sévèrement critiqué l’administration précédente, l’accusant d’avoir non seulement toléré, mais favorisé l’implantation du trafic de drogue et des réseaux criminels au cœur même de la société mauricienne. Il est allé jusqu’à qualifier les dix dernières années de «décennie de connivence», quand les agences d’enquête auraient été utilisées à des fins politiques, au lieu de s’attaquer aux véritables auteurs de délits économiques. Navin Ramgoolam a pointé du doigt l’objectif originel de la FCC Act mise en place par l’ancien gouvernement, qui n’était, selon lui, ni de traquer les blanchisseurs, ni de poursuivre les fraudeurs, mais de cibler ou de protéger certains individus selon des intérêts partisans.

L’exclusion du Directeur des poursuites publiques (DPP), autorité constitutionnellement indépendante, de ce dispositif, en serait l’illustration la plus flagrante. Il a dénoncé les attaques «honteuses» et répétées contre le DPP et promis que sous son gouvernement, l’autorité du DPP serait respectée, consolidée et recentrée au cœur du processus judiciaire.

Le cœur du projet de loi réside dans l’introduction de l’article 58A, qui prévoit un cadre juridique clair et structuré pour la collaboration entre la police et la FCC. À ce jour, selon le PM, les deux institutions fonctionnent trop souvent de manière fragmentée, engendrant doublons, fuites d’informations et retards d’enquêtes. Cela nuit, selon lui, à l’efficacité de la justice et sape la confiance du public dans le système judiciaire.

Le nouvel article 58A définit trois scénarios clés de coopération. D’abord, lorsqu’une enquête policière met en lumière des éléments relevant de la criminalité financière, la police aura désormais le mandat légal d’en informer la FCC et de collaborer avec elle, dès le début. Ensuite, si la FCC mène déjà une enquête et que la police découvre des infractions connexes, un mécanisme sera mis en place pour permettre une action conjointe.

Dans l’intérêt de l’efficacité

Enfin, les deux agences pourront initier une enquête conjointe, mettant en commun leurs ressources, compétences et informations. Ces dispositions visent à garantir un traitement plus rapide, plus cohérent et plus approfondi des dossiers complexes, où les aspects criminels et financiers sont souvent imbriqués. Le PM a souligné que cette collaboration ne vise pas à interférer avec les compétences exclusives de la FCC ou de la police, mais à ouvrir des passerelles lorsque cela s’avère nécessaire dans l’intérêt de l’efficacité. Il a précisé que chaque enquête reste indépendante, sauf en cas de nécessité mutuellement reconnue, auquel cas des mécanismes seront mis en place pour permettre une planification et une conduite commune.

Cette réforme s’inscrit dans un cadre plus large, celui de la création prochaine de la National Crime Agency, inspirée du modèle britannique. Navin Ramgoolam a révélé que sa mise en place fait déjà l’objet d’une coopération active entre Maurice et le Royaume-Uni, dans le cadre du partenariat stratégique intégré dans le traité sur les Chagos. Le gouvernement britannique s’est engagé à fournir une assistance technique, législative et organisationnelle, ainsi que l’expertise d’enquêteurs chevronnés, déjà intégrés à certaines unités de la police mauricienne. Ces experts apportent, selon lui, une nouvelle méthodologie, une rigueur accrue et un esprit d’urgence dans le traitement des dossiers sensibles.

Le chef du gouvernement a insisté sur la gravité de la situation actuelle. Il a décrit comment les réseaux criminels exploitent les lacunes et rivalités institutionnelles, ce qui entraîne l’échec d’enquêtes majeures. Il a réaffirmé que le but ultime est d’assurer que les enquêtes soient menées jusqu’au bout, sans manipulation, sans obstruction, et avec l’objectif de traduire en justice ceux qui nuisent à l’économie du pays. Il a tenu à souligner que ces réformes ne visent en aucun cas à contourner le DPP, qui restera le seul décideur des poursuites. Loin d’être une centralisation de pouvoir, cette réforme veut au contraire promouvoir une synergie constructive entre les institutions d’enquête, dans le respect total de la séparation de leurs pouvoirs.

En conclusion, Navin Ramgoolam a affirmé que ces amendements posent les bases d’un changement structurel majeur, indispensable pour garantir à Maurice un avenir sûr, juste et transparent. Il a décrit ce projet de loi comme une étape intermédiaire mais cruciale vers la mise en place d’une architecture judiciaire et policière capable de relever les défis du XXIᵉ siècle. Selon lui, la réussite de la National Crime Agency dépendra directement de la mise en œuvre rigoureuse et efficace de cette loi.

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