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Applications mobiles de l’état
Rs 56 millions pour un service qui peine à convaincre
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Applications mobiles de l’état
Rs 56 millions pour un service qui peine à convaincre

Les applications mobiles gouvernementales ont beaucoup coûté mais ont été peu adoptées.
Près de Rs 56 millions des fonds publics ont été investis dans le développement de multiples applications mobiles gouvernementales. Pourtant, leur efficacité et leur utilité suscitent aujourd’hui de vives interrogations. C’est dans ce contexte que le député Ludovic Caserne a interpellé, mardi 15 avril à l’Assemblée nationale, le ministre des Technologies Avinash Ramtohul. Sa question était limpide : ne serait-il pas plus judicieux de regrouper les services offerts par MoKloud, MauPass, MoRendezVous et Mwa Mo Wallet dans une application unique ?
Le ministre n’a pas tardé à répondre. Dans un constat sans équivoque, il a reconnu que l’approche adoptée jusqu’ici manquait cruellement de cohérence. «Il y a eu une explosion d’applications mobiles sans vision d’ensemble, sans base structurelle solide», a-t-il déclaré, allant jusqu’à qualifier cette situation de «crime envers les citoyens», notamment en raison de l’absence d’un site de secours pour le principal centre de données gouvernemental. En cas de sinistre, comme un incendie au bâtiment Atal Bihari Vajpayee, c’est l’ensemble des services publics numériques – y compris ceux du Parlement – qui deviendrait inopérant.
L’exemple des quatre applications mentionnées dans la question parlementaire illustre les limites d’une stratégie numérique fragmentée. Lancée en 2021, MoKloud permet d’obtenir et de stocker en ligne des documents officiels, tels que les actes de naissance ou de mariage. Mais faute de reconnaissance juridique, son usage reste restreint – une lacune que le ministère tente actuellement de combler avec l’aide du bureau de l’Attorney General.
De son côté, MoRendezVous, censée faciliter la prise de rendez-vous avec les services publics, affiche des résultats modestes : à peine 5 000 utilisateurs en plus de trois ans, pour un coût de développement d’environ Rs 5 millions.
MauPass, qui assure une identification sécurisée des usagers dans l’écosystème numérique, se distingue avec ses 369 000 utilisateurs et un coût de développement de Rs 8 millions. Le ministre la considère comme une application stratégique.
Quant à Mwa Mo Wallet, lancée plus récemment, en août 2024, elle a mobilisé à elle seule Rs 43 millions. Malgré son ambition de desservir tout le territoire, y compris les îles périphériques, elle ne compte que 10 000 utilisateurs à ce jour.
Au-delà de leur faible taux d’adoption, ces applications souffrent de nombreux problèmes : interfaces peu intuitives, fonctionnalités limitées, vide juridique, et absence d’analyse des données d’usage. Résultat : une perte non seulement financière, mais aussi en temps et en opportunités pour la transformation numérique du pays. Le ministre ne mâche pas ses mots : «Ces applications étaient comme des ennemies pour les utilisateurs. Elles semblaient dire : ne m’utilise pas.»
Face à ce constat d’échec, le ministère entend repartir sur de nouvelles bases. Une stratégie repensée est en cours d’élaboration, avec pour objectif la création d’une application mo bile unifiée. Cette «super-app» regroupera l’ensemble des services publics dans une interfacehomogène, multilingue, et intégrant un système d’identification unique basé sur MauPass. L’idée : proposer aux citoyens un guichet numérique centralisé, simple, rapide et intuitif.
Ce projet d’envergure est piloté par un comité multipartite, réunissant notamment le Central Informatics Bureau, le Mauritius Emerging Technologies Council et la Mauritius Digital Promotion Agency. Ce comité aura pour mission de réaliser un audit complet des applications existantes, d’évaluer leur per formance et leur mode de dé veloppement, et d’identifier les opportunités de rationalisation.
Conscient que l’adhésion du public est un facteur clé de réussite, le ministre mise également sur une campagne de communication nationale, à la fois sur les médias traditionnels et les plateformes numériques. «La meilleure application du monde ne sert à rien si personne ne l’utilise», a-t-il martelé.
Ce projet s’inscrit dans une volonté plus large de modernisation des services publics. Il vise à rendre les démarches administratives accessibles à tous, y compris aux seniors, souvent laissés pour compte dans l’univers numérique. À ce jour, la majorité des applications sont uniquement en anglais, ce qui constitue une barrière supplémentaire. La future application unifiée sera donc pensée pour être inclusive et accessible au plus grand nombre.
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